Présentée comme une alternative à la chirurgie, la technologie des ultrasons focalisés de haute intensité (HIFU) modifie la prise en charge des tumeurs malignes de bas grades de la prostate et bientôt celles des adénofibromes du sein. Les avantages sont à la fois technique, offrant un maximum de précision pour cibler la tumeur, et clinique, puisque la procédure est non invasive, limitée dans le temps, et sans cicatrice s’agissant des interventions féminines. Deux dispositifs innovants, Focal One qui vient d’obtenir le Forfait innovation et Echopulse, sont aujourd’hui au-devant de la scène.
Allongé sur la table d’opération, le patient est maintenu sous rachianesthésie pendant qu’un bras robotique préprogrammé déplace la tête de tir chargé de projeter les ultrasons à travers la prostate. Ses derniers se croisent à l’endroit précis où se situe une tumeur en cours de destruction.
Assis derrière son moniteur, un chirurgien urologue contrôle l’opération, prêt à reprendre la main en cas de besoin. La scène se déroule dans un bloc opératoire de l’hôpital Édouard Herriot, à Lyon. L’appareil entre le patient et le chirurgien se nomme Focal One, et représente une avancée importante dans le domaine des ultrasons focalisés. Avec la photonthérapie et la cryothérapie, le traitement par les ultrasons focalisés est l’une des alternatives récentes à la chirurgie et à la radiothérapie. Il consiste en des séances de 400 à 600 tirs d’ultrasons de haute intensité au niveau de la tumeur préalablement repérée par IRM. Les tirs d’ultrasons sont réalisés sous le contrôle d’un échographe. Le grand avantage de Focal One est d’ajouter à l’échographie une couche d’informations supplémentaire fournie par des données IRM. Pour l’opérateur, cette évolution est de l’ordre du passage de la conduite d’une automobile à l’aide d’une carte Michelin à celle assistée par GPS.
Trouver, détruire et vérifier
Il est bien plus facile de localiser une tumeur avec l’IRM qu’avec l’échographie, mais seule cette dernière peut être aisément employée pour guider une opération. Pour le chirurgien urologue, le Dr Sébastien Crouzet de l’hôpital Édouard Herriot, « le couplage de ces deux technologies d’imagerie change notre approche car l’appareil compile toute la chaîne de traitement, depuis le repérage jusqu’à la vérification de son efficacité. » Grâce à l’échographie de contraste, l’opérateur peut également vérifier si la zone ciblée est bien dévascularisée, et donc détruite, ou s’il faut effectuer quelques tirs supplémentaires. L’autre évolution de Focal One réside dans sa « tête de tir à focale dynamique, détaille Sébastien Crouzet. On peut choisir la profondeur de la zone sur laquelle on va tirer jusqu’à 40 mm à l’intérieur de la prostate, et chaque tir détruit un cylindre de 5 mm sur 1,7 au lieu de 19 mm sur 1,7 avec une HIFU classique. » Cette précision accrue ouvre en outre la possibilité de s’attaquer à des zones jusqu’ici évitées. « On peut traiter l’apex prostatique, qui était inaccessible aux dispositifs antérieurs en raison du risque d’incontinence », poursuit le praticien.
Un traitement du patient âgé à faible risque
Le traitement par ultrasons focalisés est indiqué chez les patients âgés à faible risque, c’est-à-dire ayant un cancer localisé au stade T1 ou T2, avec un score de Gleason inférieur à 7. Il s’agit d’un traitement encore en cours d’évaluation. Sébastien Crouzet participe d’ailleurs à deux études dans lesquelles sont comparées les survies sans hormonothérapie palliative après la chirurgie classique, radiothérapie et ultrasons focalisés. « Au bout de 10 ans de suivi, on n’observe pas de différence significative entre l’HIFU et la chirurgie, mais il y a significativement plus d’hormonothérapies palliatives dans le groupe radiothérapie que dans le groupe HIFU, précise-t-il. La particularité de l’HIFU, c’est aussi qu’il ne ferme pas la porte aux autres traitements et qu’il y a assez peu d’effets secondaires. »
L’évaluation de l’HIFU reste entravée par l’absence de prise en charge par la sécurité sociale, qui de fait bloque la constitution de larges cohortes de patients. Lors de sa venue dans le service d’urologie de l’hôpital Édouard Herriot vendredi 17 avril, la ministre des Affaires Sociales Marisol Touraine a confirmé qu’elle avait autorisé l’accélération de cette prise en charge dans le cadre du « forfait innovation ». Un tel examen coûte environ 10 000 euros par patient, aux établissements qui assurent le coût des procédures dans le cadre du financement de programmes de recherche.
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