Vorinostat et nucléases à doigts de zinc

À l’essai contre le VIH, un anticancéreux et la modification des CD4

Publié le 14/12/2011
Article réservé aux abonnés
1323829022309974_IMG_74207_HR.jpg

1323829022309974_IMG_74207_HR.jpg

Vorinostat

Les Prs David Margolis (Chapel Hill, États-Unis) et Sharon Lewin (Melbourne, Australie) ont présenté les résultats préliminaires d’une stratégie fondée sur l’essai d’un anticancéreux, le vorinostat. Le principe sous-tendant cette approche est de réveiller le VIH qui persiste à l’état latent dans les réservoirs sous trithérapie et empêche une « guérison stérilisante », caractérisée par une éradication du virus de l’organisme. Le principal critère d’évaluation de cet essai d’efficacité, est l’évaluation de l’effet du vorinostat sur les CD4 latents infectés par le VIH, en mesurant l’ARN du VIH non épissé à l’intérieur de ces cellules.

Le vorinostat (inhibiteur des histones déacétylases) est un médicament orphelin, indiqué dans les lymphomes cutanés à cellules T. Le produit est-il à même de réveiller les cellules infectées dormantes, les forcer à produire du virus, le traitement antirétroviral étant là pour éradiquer le virus qui apparaît et empêcher l’infection de nouvelles cellules, interrogent les chercheurs. L’hypothèse est que le vorinostat induira la transcription du VIH dans les CD4 infectés latents. On cherche à savoir si l’acétylation des histones va être déclenchée et on teste la tolérance du produit chez ces patients qui reçoivent une trithérapie. « Dans les deux protocoles en cours, la tolérance du produit est bonne et une réactivation de la réplication du VIH dormant dans les cellules est mise en évidence, ce qui valide cette stratégie de " purge " des réservoirs viraux », indique le Pr Alain Lafeuillade.

Thérapie génique

Des données intéressantes ont concerné l’usage d’une forme de thérapie génique dans l’infection par VIH. Deux essais menés dans l’objectif de modifier les lymphocytes CD4 + des patients afin de les rendre résistants à l’infection par le VIH sont rapportés. On sait que le VIH infecte ces cellules en se fixant sur le récepteur CD4 plus un corécepteur : CCR5 ou CXCR4.

Le Pr Carl June (Philadelphie) rapporte un essai où on a modifié in vitro les CD4 + de 12 patients. L’expression du CCR5 a été bloquée à l’aide de « nucléases à doigts de zinc ». Les cellules ont été réinjectées aux patients. Avec presque un an de recul, on observe la persistance de ces cellules modifiées et une amélioration des défenses de l’organisme. Les traitements antirétroviraux ont été suspendus chez 6 patients ; cela a entraîné un rebond de la charge virale, mais les cellules modifiées ont été capables d’induire une baisse de la virémie, qui est même devenue indétectable chez un patient.

D’autres données montrent que cette approche réduit le réservoir mesuré par le taux d’ADN proviral du VIH dans les cellules. Des résultats très encourageants obtenus avec une seule administration des CD4 modifiés.

Paula Cannon (Los Angeles) a présenté d’autres technologies sur les nucléases à doigts de zinc, nommées « TALENs », qui permettent « un blocage très spécifique, plus facile à réaliser et moins coûteux du récepteur CCR5 ».

Craig Wilen (Philadelphie) a décrit la possibilité de modifier également le co-récepteur CXCR4, « laissant espérer la création de cellules totalement imperméables au VIH ».

* « International workshop on HIV persistence, reservoirs et eradication strategies » (Sint Maarten), organisé à l’initiative des Prs Alain Lafeuillade (Toulon) et Mario Stevenson (Miami, États-Unis), avec le soutien de l’ANRS français et du NIH américain.

 Dr BÉATRICE VUAILLE

Source : Le Quotidien du Médecin: 9058