Troubles neurologiques dans l’infection par le VIH

Toxoplasmose et lymphome chez un quadragénaire

Publié le 23/01/2012
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L’EXAMEN neurologique montre une négligence de l’hémicorps gauche et une hémiparésie gauche. Le reste de l’examen est normal, de même que le bilan sanguin. On fait une IRM cérébrale qui montre des deux côtés de multiples lésions avec renforcement annulaire. La plus grosse de ces lésions se situe au niveau du ganglion basal droit, avec un effet de masse prononcé. On porte le diagnostic de toxoplasmose cérébrale et on instaure un traitement adapté : sulfadiazine (15 mg/kg, 4 fois par jour), pyriméthamine (200 mg en dose de charge puis 75 mg par jour), acide folinique (10 mg par jour). Parallèlement, on détecte des IgG actives anti-toxoplasmose et on découvre une infection par la VIH ; la charge virale est de 870 976 copies/ml et les CD4 sont à 68 cellules /µl (11 %).

Une hypertonie droite.

Vingt-quatre heures après l’instauration du traitement, le tonus et la force musculaire du membre supérieur gauche se normalisent mais il persiste une baisse de la force musculaire du membre inférieur gauche. Dans les deux semaines qui suivent, le patient développe une hypertonie droite et devient progressivement mutique. Les IRM répétées montrent une amélioration modérée des modifications de l’hémisphère droit avec réduction de l’œdème vasogénique. En revanche, on constate la progression graduelle d’une masse dans la corona radiata gauche. Au PET-scan, avec marquage au fluorodéoxyglucose, réalisé trois semaines après l’admission, on note que cette lésion « capte » davantage que les autres, lesquelles captent moins que le cortex. Ces résultats suggèrent que le patient n’a pas seulement une toxoplasmose cérébrale mais ausi, probablement, un lymphome.

Malgré l’instauration d’un traitement anti-rétroviral hautement actif (HAART) et de fortes doses de dexaméthasone, le patient devient moins présent, et, à la quatrième semaine, il apparaît des crises convulsives nécessitant la mise sous ventilation artificielle. La biopsie de la masse solide dans l’hémisphère gauche confirme qu’il s’agit d’un lymphome diffus à grandes cellules B. De fortes doses de méthotrexate puis de cytarabine sont administrées mais il n’y a pas d’amélioration. Huit semaines après l’admission, le traitement est interrompu et le patient meurt.

IRM et le PET-scan.

« La toxoplasmose cérébrale, expliquent Alex Mentzer et coll. qui rapportent cette observation dans le «Lancet », est un des modes de présentation les plus fréquents de l’infection avancée par le VIH. Le lymphome cérébral primitif est rare, mais plus de 30 % des cas sont associés à une infection par le VIH. Il est difficile de différencier les deux pathologies étant donné les similitudes des présentations clinique et radiologique mais l’IRM et le PET-scan sont les techniques d’imagerie de choix et la biopsie est le " gold standard ". Le pronostic des patients infectés par le VIH et présentant un lymphome cérébral primitif est sombre, avec une médiane de survie de deux mois ; mais le traitement antirétroviral peut améliorer l’espérance de vie. Le choix de la chimiothérapie est fondé le méthotrexate associé à d’autres agents comme la vincristine et la cytarabine. »

Cette observation permet de rappeler la complexité du tableau des patients dont l’infection par le VIH est vue à un stade tardif. Au Royaume-Uni, précisent les auteurs, on estime que 30 % des individus porteurs d’une infection par le VIH sont sous-diagnostiqués et qu’une proportion identique est vue à un stade tardif.

Alex Mentzer et coll. Ther Lancet du 21 janvier 2012, p. 286.

 Dr EMMANUEL DE VIEL

Source : Le Quotidien du Médecin: 9070