Chez le patient présentant un cancer, l’état nutritionnel et l’altération de la masse musculaire (sarcopénie) sont des facteurs pronostiques importants : « plus il perd du poids et des muscles, plus il risque de subir les complications des traitements. Et plus leurs effets secondaires seront intenses », souligne le Dr Bruno Raynard, nutritionniste à l’Institut Gustave Roussy (IGR).
Toute perte de poids chez une personne traitée pour un cancer doit mener à une prise en charge spécifique, menée par un nutritionniste spécialisé en oncologie. « Pour cela, tous les moyens sont bons, la prise en charge dépend de l’importance de la perte de poids et des éventuels symptômes associés : troubles du goût, de l’odorat, douleurs dans la bouche (aphtes, mucites…), douleurs et difficultés pour avaler, troubles du transit… . Au niveau cérébral, une inhibition de l’appétit peut survenir : cela est dû à des médiateurs inflammatoires liés au cancer, qui passent la barrière hématoméningée et bloquent certains signaux qui stimulent l’appétit dans l’hypothalamus », indique le Dr Raynard.
Ne pas se forcer
Les maladies psychiques (anxiété, dépression) et les troubles du sommeil peuvent également affecter l’envie de manger. D’autres problèmes peuvent intervenir : « le ‘forcing’ alimentaire est délétère. Les soignants et aidants familiaux ne doivent jamais contraindre une personne atteinte de cancer à manger davantage (en quantité) que son envie car cela risque d’aggraver le dégoût », note le Dr Raynard. Pour améliorer l’appétit, le nutritionniste ou diététicien doit d’abord s’attacher à traiter les symptômes associés.
Par exemple, certaines chimiothérapies peuvent être à l’origine d’une altération gustative (goût métallique dans la bouche). Ce phénomène peut être aggravé par les mucites. « Dans ce cas, il existe certaines astuces pour atténuer le goût métallique : il faut notamment diminuer l’inflammation buccale liée aux mucites, par le biais de bains de bouche. Par ailleurs, la prise de certains corps gras (une cuillère d’huile, de crème fraîche, de complément nutritionnel, ou tout simplement un plat en sauce) peut tapisser la cavité buccale et former une fine couche entre les aliments et la muqueuse venant bloquer le goût métallique. Les patients peuvent également faire le tri pour éliminer les aliments qui exacerbent ce goût désagréable », conseille le spécialiste.
Éviter la dénutrition
Le conseil diététique doit toujours être prodigué avant le début des traitements. « Dans l’idéal, tout patient qui démarre une chimiothérapie, une radiothérapie ou qui va être opéré, doit avoir vu, au moins une fois, un diététicien. Celui-ci va dresser un état des lieux ; peindre le paysage alimentaire du patient et ses habitudes personnelles pour adapter ses conseils en conséquence », résume le Dr Raynard. Le diététicien ou nutritionniste devra insister sur le fait que toute perte de poids (régime restrictif ou éviction du sucre) doit être bannie durant le traitement du cancer.
Pour améliorer l’appétit, maintenir un apport énergétique suffisant et éviter la dénutrition, les stratégies sont diverses et doivent être adaptées à chaque patient : celui-ci pourra notamment fractionner sa prise alimentaire, orienter davantage ses choix vers les aliments qui lui font envie, densifier et enrichir son alimentation (davantage de matières grasses). Dans certains cas, des compléments nutritionnels oraux sont nécessaires, pour combler le manque de calories et de protéines. Quoi qu’il en soit, le patient doit être revu par le diététicien ou nutritionniste dans le mois qui suit le premier rendez-vous, pour faire le point sur son état nutritionnel. « En cas de dénutrition sévère, une nutrition artificielle (entérale, le plus souvent) est proposée d’emblée, avant le début du traitement, à l’hôpital. Une sonde nasogastrique est posée. Cela permet d’apporter au patient un produit liquide, hautement nutritif », précise le Dr Raynard.
Exergue : « Toute perte de poids doit mener à une prise en charge spécifique »
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