Voici un an, l’IPC lançait des débats publics sur « le cancer hors les murs », favorisant ainsi la démocratie sanitaire. À la veille de la journée mondiale de lutte contre le cancer, les chercheurs, oncologues et responsables des organismes de santé, ont été invités à réfléchir sur cette question essentielle de « l’autonomie de décision du patient atteint du cancer ».
Alors qu’il existe une véritable reconnaissance du droit des patients et qu’on les invite à priori à s’exprimer de façon individuelle ou collective, leur laisse-t-on véritablement la place pour exercer ce droit sur le traitement qui les concerne ? Peut-on parler de décision souhaitée ou subie ? Tous les médecins et chercheurs semblent s’accorder sur la nécessité de promouvoir une autonomie de décision, mais en réalité « la décision clinique est toujours difficile à mettre en œuvre et se situe dans ce rapport si singulier entre le médecin et le patient, rappelle le docteur Patrice Viens, directeur général de l’IPC. « Jusqu’à présent, cette autonomie de décision est plutôt un droit négatif, ne s’exprimant que dans la situation extrême du refus de soins, rappelle le Pr Eisinger. Mais la question, pour nous, doit être posée à tous les stades du traitement et non pas seulement dans le temps, douloureux, de la fin de vie. Le patient est-il suffisamment bien informé pour formuler des choix ? Le système de santé français peut-il supporter une prise en charge « à la carte » ? »
Une alliance vraie entre le médecin et son patient
Toutes ces questions se posent aux professionnels de santé, à chaque cas de malade qui tente de faire valoir sa singularité. « Avant on dispensait son savoir de manière autoritaire, indique le Dr Jean-Luc Raoul, responsable du département d’oncologie médicale 1 à l’IPC, maintenant, le patient est plus informé, plus actif, et cela change les rapports. C’est au Kansas aux Etats Unis que la loi a évolué pour la 1re fois, en obligeant les médecins à délivrer des infos claires de manière à permettre au patient de prendre une décision éclairée sur l’intervention ou les traitements à venir. » De fait, le patient est responsable des décisions thérapeutiques qui le concernent. Cela implique deux notions, la vérité partagée selon ce modèle, sur de la discussion informée et la possibilité réelle d’autonomie du patient, suivant son état physique, ses valeurs, etc. « Quoi qu’il en soit, cette demande de plus d’autonomie, d’avoir la liberté de décider de ce qui est bon pour soi, reste dépendante d’une information claire, complète et précise qui, en cancérologie, doit notamment permettre au patient de mettre en balance les avantages (gain en taux de guérison, en durée de vie, en qualité de vie) et les inconvénients (mutilations, complications, toxicités visibles et invisibles...) des traitements », rappelle le Dr Raoul.
Une solution intermédiaire s’impose
Après avoir décrit le changement de type de relation depuis l’arrivée de multiples infos vraies ou fausses sur internet, il a rappelé que l’on ne peut s’en tenir pour parler aux patients, de données seulement statistiques. Chacune des décisions reflète ce qu’est l’oncologue avec ses croyances et ses convictions sur les traitements et ce qu’est le patient. On voit aussi dans le cas de la cancérologie, notamment pour des cancers avancés, qu’il peut exister un arbitrage difficile entre durée de vie et qualité de vie. Notamment pour des soins qualifiés de « déraisonnables » en fin de vie. « En conclusion, dit le Dr Raoul. Si l’autonomie de décision du patient est fortement souhaitable, sa mise en œuvre demande beaucoup d’efforts de la part du praticien mais également du patient. Plus que d’opposer le paternalisme d’il y a 20 ans à l’autonomie totale, une solution intermédiaire s’impose. Dans ce cadre le patient ne se voit pas imposer une option par un médecin tout-puissant, mais ne se voit pas non plus proposer « à la carte » toutes les options possibles pour prendre sa décision mais uniquement un choix fait par le médecin de ce qui lui semble le mieux pour le patient en lui laissant le choix final. Ce compromis reconnaît en fait la pratique actuelle dans laquelle le médecin présente de façon différente, les divers choix au patient et traduit une alliance vraie entre le patient et le médecin, alliance basée sur la confiance, la responsabilité et le dialogue. »
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