Sur les 5 000 nouveaux cas de cancer de l’ovaire dénombrés chaque année, 80 % des diagnostics interviennent au stade déjà localement avancé. Nombre de ces patientes peuvent, depuis peu, bénéficier de la chimiohyperthermie intrapéritonéale (Chip) lors du traitement initial. Malgré tout, les récidives restent nombreuses. Une étude récente suggère que la Chip reste efficace lors de récidives. Elle pourrait dès lors concerner encore plus de femmes à l’avenir.
Traitement initial des cancers ovariens localement avancés
La chimiohyperthermie intrapéritonéale (Chip) a des résultats intéressants dans la carcinose ovarienne. Elle n’est néanmoins pas dénuée de risque. C’est pourquoi elle ne peut être pratiquée que dans des centres experts — une vingtaine en France. Elle n’est indiquée, dans le cancer de l’ovaire, que lorsque l’on peut pratiquer une chirurgie d’exérèse complète d’intervalle. Il s’agit d’une chirurgie par voie ouverte, le plus souvent multiviscérale, associant chirurgie gynécologique et digestive, la carcinose ovarienne tendant à essaimer dans tout le péritoine, avec un temps opératoire pouvant atteindre les 4 à 5 heures.
Ce n’est qu’en fin d’opération, avant fermeture et si une chirurgie de résection complète a bien pu être effectuée, qu’est pratiquée la Chip. Un bain de chimiothérapie par platine de l’abdomen à la température de 42 °C est alors mis en place durant une heure et demie. Cette intervention, non dénuée de risque, nécessite d’ailleurs des anesthésistes entraînés et un secteur postopératoire de type unité de soins continus.
Un bon état général est requis. Enfin, les femmes opérables d’emblée et celles nécessitant l’ensemble de la néochimiothérapie (six cycles) avant opération ne sont pas candidates, en absence de données dans ces situations.
C’est pourquoi la Chip est aujourd’hui réservée à la chirurgie d’intervalle initiale (après trois cycles), seule situation à avoir été testée dans un essai randomisé avec succès. L’étude néerlandaise publiée en 2018 montre en effet qu’ajouter la Chip augmente non seulement la survie sans récidive mais aussi la survie globale, améliorée de près d’un an : 46 vs 34 mois (1). Le suivi à dix ans a récemment confirmé ce bénéfice (2). Résultat, les recommandations internationales ont intégré cette stratégie en 2023.
Récidives non précoces après traitement systémique
Peut-on étendre les bénéfices de la Chip aux récidives de cancer de l’ovaire ? C’est la question qu’a testée l’étude ChipOR, initiée il y a près de dix ans (3). Cette étude internationale menée dans 31 centres, dont de nombreux centres français, a testé la Chip sur plus de 400 femmes en récidive. Elles devaient avoir répondu à la chimiothérapie et ne pas avoir développé de récidives précoces (au moins six mois de réponse). Elles ont tout d’abord été traitées par la chimiothérapie systémique de référence (platine/taxane avec ou sans bevacizumab : six cycles). Celles pouvant ensuite bénéficier d’une chirurgie de résection complète ont été randomisées, après stratification (centre, résidu opératoire ou pas, survie avant récidive, anti-Parp ou pas), en deux bras : chirurgie et Chip vs chirurgie seule.
À six ans de suivi médian, la mortalité est de 65 %. Le bras Chip est à nouveau associé à une augmentation de la survie sans récidive et, surtout, à une augmentation de la survie globale. On est à 54 vs 46 mois (RR = 0,69 [0,5-0,9]). On obtient donc, là aussi, près d’un an de bénéfice en survie. Et cela, sans dégradation de la qualité de vie, qui a été évaluée dans les deux bras sur deux échelles. Cet essai, en cours de publication, pourrait faire bouger les lignes et étendre à l’avenir les indications de la Chip dans les récidives.
Entretien avec le Pr Jean Marc Classe (Institut cancérologique de l’Ouest, Saint-Herblain) (1) WJ Van Driel Wjet al. N Engl J Med. 2018 Apr 5;378(14):1363-4 (2) Aronson L et al. J Clin Oncol 2023(41):16_suppl ASCO 2023, Abstract 5509 (3) Classe JM et al. J Clin Oncol 2023(41):16_suppl ASCO 2023, Abstract 5510
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