Comment évolue la cardiologie libérale en cette période de pandémie ?
Il est clair que la crise sanitaire que nous traversons va laisser des traces. Il y aura un avant et un après Covid-19, y compris pour la cardiologie libérale. Durant le confinement, plus d’un million de patients ne sont pas venus dans nos cabinets. Parmi eux, on peut estimer entre 10 et 20 % le nombre de patients « urgents » pour lesquels il va maintenant falloir trouver une place dans nos agendas déjà surchargés. Et cette difficulté, liée aujourd’hui au Covid, pourrait se poser de la même manière d’ici quelques années, même en dehors de toute épidémie.
Comment continuer à assurer un accès aux soins pour tous sur tout le territoire ?
C’est un défi que les cardiologues libéraux ne peuvent pas ignorer. Devant l’augmentation des maladies chroniques, le vieillissement de la population, une démographie médicale stable et une répartition pas toujours harmonieuse des effectifs de médecins sur le territoire, la question de l’accès aux soins se pose en effet de manière cruciale. Une des solutions, selon moi, est de réfléchir à une amélioration de nos pratiques et à une réorganisation de nos cabinets. L’objectif est de permettre aux cardiologues de se mobiliser sur les tâches à haute valeur ajoutée. Cela pourrait passer au départ par un regroupement de plusieurs cardiologues, soit physique, soit virtuelle (chaque cardiologue restant dans son cabinet habituel, tous en étant rattaché à une structure commune). La mise en place de structures de plus grande taille pourrait ensuite permettre de budgéter l’emploi d’assistants médicotechniques ou d’infirmières de pratiques avancées.
Les cardiologues peuvent suivre l’exemple des ophtalmologistes. Il y a vingt ans, ils avaient 2 % de personnels non administratifs dans leurs cabinets. Aujourd’hui, ils en ont 60 %, avec notamment des orthoptistes libéraux ou salariés des cabinets.
Que pourraient apporter les infirmières dans les cabinets de cardiologues ?
L’objectif est de permettre un suivi du patient dans sa globalité et tout au long de son parcours de soins. L’idée est de suivre dans la durée les personnes qui viennent chez nous avec des facteurs de risque. Là, on pourrait d’ores et déjà avoir des infirmières pour faire de l’éducation thérapeutique, pour donner des conseils en matière de nutrition, d’activité physique ou d’aide à l’arrêt du tabac. Il s’agit de conseils que nous évoquons bien sûr dans nos consultations mais souvent de manière rapide, faute de temps.
Nous aurions également intérêt à collaborer avec des infirmières ayant une compétence en gériatrie. La moyenne d’âge de nos patients est de 70 ans. Nous avons donc beaucoup de patients, parfois très âgés et cela peut être intéressant d’avoir à nos côtés des professionnelles de santé qui ne soient pas uniquement focalisées sur le cœur et les vaisseaux. C’est important qu’on puisse repérer et tenir compte de certaines particularités de patients assez âgés : le risque de dénutrition, d’éventuels troubles cognitifs ou de mémoire, la capacité de soutien de l’aidant...
Ces infirmières de pratiques avancées pourraient aussi s’investir dans d’autres domaines. Elles pourraient très bien faire des prises de tension, debout et allongé, poser et lire des holters ECG ou MAPA en les interprétant sous le contrôle du cardiologue. Elles pourraient également assurer le contrôle de certains facteurs de risque ou, via des questionnaires, mesurer l’observance des patients. Toutes ces solutions doivent être imaginées au plus près des réalités locales et de terrain.
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