Le référentiel sur l'insuffisance cardiaque (IC) chronique est un des cinq élaborés dans le cadre de la sortie des Expérimentations de la télémédecine pour l’amélioration des parcours en santé (ETAPES). La télésurveillance de l'IC chronique est inscrite dans les dernières recommandations de la Société européenne de cardiologie (ESC), et la France est pionnière dans ce domaine grâce au programme ETAPES. La Haute Autorité de santé (HAS) l’officialise donc dans le droit commun grâce à l’avis adopté par la CNEDiMTS. Ceci va permettre de poursuivre la télésurveillance, selon les mêmes indications et modalités.
Une sélection rigoureuse des patients
Les dispositifs médicaux numériques de télésurveillance doivent au minimum recueillir les données sur le poids du patient, les symptômes et les signes cliniques potentiellement prédictifs d'une décompensation cardiaque.
Pour que cette télésurveillance soit efficace, les patients doivent être parfaitement sélectionnés. En effet, elle s'adresse aux patients sévères, symptomatiques de stade II de la NYHA ou au-delà, ayant été hospitalisés dans le mois ou l’année précédents mais présentant des facteurs de gravité (BNP > 100 pg/ml ou NT-proBNP > 1 000 pg/ml).
L'analyse en sous-groupes, de l'étude multicentrique française OSICAT, avait bien montré que les patients retirant un bénéfice de la télésurveillance étaient initialement de stade III ou IV.
Une réduction de 70 % des hospitalisations
L'étude OSICAT avait comparé la télésurveillance, avec suivi du poids et de la symptomatologie, à la surveillance classique (2). Sur les 440 patients actuellement inclus dans le programme ETAPES au CHU de Toulouse, les données des 200 premiers ont été analysées. En cas de symptômes suspects, dans OSICAT, l'infirmière demandait au patient d'aller chez son généraliste, à qui était laissé le libre choix de la stratégie. Au contraire, dans ÉTAPES, c'était au cardiologue d'en décider. Si on compare a posteriori le groupe surveillé par un non-cardiologue d'OSICAT et un groupe avec télésurveillance cardiologique du programme ÉTAPES, on constate dans ce dernier une diminution de 70 % des hospitalisations pour IC et de la mortalité totale. « C'est l'intervention des cardiologues qui fait la force d'ETAPES, avec un cardiologue joignable 5 jours sur 7 et 12 heures par jour, insiste le Pr Galinier. Agir très en amont limite les décompensations. Or, on sait que chaque hospitalisation pour décompensation de l'IC chronique est associée à une mortalité de 8 % ». La télésurveillance de la pression artérielle et de la fréquence cardiaque va aussi permettre de titrer à distance les médicaments de base, en alternant titration par téléconsultation et par visite classique.
Un rapport coût/efficacité favorable
La télésurveillance nécessite des équipes pluriprofessionnelles, avec impérativement des infirmières spécialisées et des cardiologues intéressés par l’IC chronique, dont la prise en charge se complexifie en raison d’un éventail thérapeutique de plus en plus étoffé. L'initiative d’officialiser la télésurveillance a un coût et on espère que le financement sera comparable à celui du programme ETAPES. « Il est évident que le rapport coût/efficacité de la télésurveillance est très favorable, surtout chez les patients avec IC à fonction systolique réduite sévère et à risque d'évènements, relève le Pr Galinier. On sait que 70 % des coûts chez l'insuffisant cardiaque sont liés aux hospitalisations. La réduction des hospitalisations pour décompensation sera donc bénéfique, non seulement pour le patient mais aussi pour la société ».
D'après un entretien avec le Pr Michel Galinier (CHU de Toulouse)
(1) Télésurveillance médicale du patient insuffisant cardiaque chronique, https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2022-01/avis_refer…
(2) Galinier M et al. Telemonitoring versus standard care in heart failure: a randomised multicentre trial. Eur J Heart Fail 2020 Jun;22(6):985-94
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024