DES EQUIPES FRANÇAISES ont évalué, au cours de l’année 2010, le nombre d’hospitalisations pour insuffisance cardiaque (IC) et leur coût. Les données, extraites du PMSI/MCO, incluant toutes les hospitalisations liées au code ICD-10, correspondant à l’insuffisance cardiaque comme diagnostic principal, couvrent 96 % des hospitalisations pour cette pathologie. Le nombre annuel d’hospitalisations pour insuffisance cardiaque s’élève à 210 490, intéressant 160 092 patients du fait des hospitalisations multiples. La durée de séjour moyenne est longue, 9,6 jours. Un insuffisant cardiaque nécessite en moyenne, 1,3 hospitalisation par an, soit un temps passé à l’hôpital de 12,7 jours. Pour 17,5 % de ces hospitalisations, les patients restent en moyenne 4,2 jours en unité de soins intensifs. La mortalité hospitalière est de 7,5 %. Après une hospitalisation, 20,6 % des patients ne peuvent retourner à leur domicile et sont dirigés vers des structures médicalisées. À partir d’un coût annuel moyen des hospitalisations pour insuffisance cardiaque qui s’élevaient en 2009 à 4 500 euros, le coût annuel des hospitalisations pour insuffisance cardiaque en France peut être estimé à 1 milliard d’euros.
Les deux types d’insuffisance cardiaque, à fraction d’éjection altérée ou préservée, sont à part égale à l’origine de ces hospitalisations pour insuffisance cardiaque. Il faut donc s’attaquer à ces deux types de pathologies distinctes tant par leur physiopathologie que par leur traitement.
Une confirmation des effets bénéfiques de l’ivabradine.
Dans l’insuffisance cardiaque systolique, les effets de l’ivabradine sur les hospitalisations itératives pour insuffisance cardiaque ont été analysés à partir des données de l’étude SHIFT. Chez les patients en rythme sinusal présentant une fraction d’éjection ≤ 35 % et une fréquence cardiaque ≥ 70 battements par minute (bpm), hospitalisés dans les 12 mois précédents pour une aggravation de l’insuffisance cardiaque, l’ivabradine, après ajustement aux facteurs pronostiques classiques, diminuent de 25 % l’incidence cumulée de toutes les hospitalisations pour insuffisance cardiaque par rapport au placebo. Concernant les hospitalisations itératives qui sont particulièrement fréquentes au cours de l’insuffisance cardiaque, l’ivabradine, qui réduit de 25 % le risque d’une première hospitalisation, diminue significativement, de 34 %, le risque d’une deuxième hospitalisation et de 29 % le risque d’une troisième, et allonge le délai entre la première hospitalisation et la suivante. Ces données démontrent le caractère pérenne des effets bénéfiques de l’ivabradine qui prévient 93 hospitalisations pour 1 000 patients traités.
Deux études de phase II encourageantes.
L’insuffisance cardiaque diastolique a fait l’objet de deux études de phase II dont les résultats laissent espérer qu’elle pourrait enfin bénéficier de mesures thérapeutiques efficaces.
L’essai ALDO-DHF a confirmé le rôle clef joué par l’aldostérone dans la genèse de ce syndrome du fait de son action profibrosante myocardique. Son inhibition par 25 mg/j de spironolactone pendant un an chez 422 patients présentant une insuffisance cardiaque diastolique symptomatique avec une fraction d’éjection› 50 %, une dysfonction diastolique à l’échocardiographie-Doppler et un pic VO2 ‹ 25 ml/kg/min a entraîné une diminution du rapport E/e’, qui était le premier critère d’efficacité, sans toutefois provoquer d’amélioration de la capacité fonctionnelle mesurée par le pic VO2, deuxième critère d’efficacité, ni de la classe fonctionnelle de la NYHA.
La diminution significative de la masse ventriculaire gauche indexée observée sous spironolactone, favorisée par une baisse plus importante de la pression artérielle, pourrait être à l’origine de cette amélioration des pressions de remplissages ventriculaires gauches qui est accompagnée d’une baisse significative des taux de NT-proBNP. Logiquement, l’utilisation de spironolactone est associée à une augmentation de l’incidence des hyperkaliémies ≥ 5 mmol/l et des altérations de la fonction rénale, mais sans entraîner de surmortalité ou un risque accru d’hospitalisations.
L’essai PARAMOUNT porte sur un nouvel agent thérapeutique, le LCZ696 qui agit à la fois comme un antagoniste des récepteurs de l’angiotensine II, le valsartan, et un inhibiteur de la neutroendopeptidase, la néprilysine, enzyme qui dégrade le BNP, permettant ainsi une augmentation des taux endogènes de cette hormone vasodilatatrice et natriurétique. Chez 308 patients symptomatiques, présentant une fraction d’éjection ≥ 45 %, des antécédents documentés d’insuffisance cardiaque et un NT-proBNP› 400 pg/ml, traités par diurétiques, dont 95 % avaient des antécédents d’hypertension artérielle mais dont les chiffres étaient normalisés à l’inclusion, le LCZ à la dose de 200 mg x 2/j a été comparé au valsartan à la dose de 160 mg x 2/j, posologie assurant un blocage comparable des récepteurs AT1 de l’angiotensine II. Après 12 semaines de traitement, les taux plasmatiques de NT-proBNP, dont les variations après ce délai constituaient le critère primaire de jugement, étaient passés de 783 à 605 pg/ml sous LCZ et de 862 à 835 pg/ml sous valsartan, soit une baisse supplémentaire significative de 23 % sous LCZ. L’analyse en sous-groupes témoigne de l’homogénéité des résultats, avec cependant un effet plus marqué chez les diabétiques et chez les hypertendus. Bien qu’après 36 semaines de traitement, la diminution du NT-proBNP ne soit plus significative, le LCZ a réduit significativement la taille de l’oreillette gauche, alors que les variations de la masse ventriculaire gauche et du rapport E/e’ n’étaient pas significatives, et a amélioré la classe de la NYHA. Une diminution plus marquée de la pression artérielle sous LCZ que sous valsartan pourrait être en partie à l’origine de ces effets. Le double mécanisme d’action du LCZ semble ainsi particulièrement intéressant dans l’insuffisance cardiaque diastolique, les effets de l’inhibition de la néprilysine étant amplifiés par le blocage simultané du système rénine-angiotensine, alors que l’association de l’inhibiteur de la néprilysine (AHU) au valsartan augmente la fixation de ce dernier sur son site d’action au niveau du récepteur AT1, soulignant leur synergie d’action.
Les résultats de ces études pilotes de phase II, suggérant une baisse des pressions de remplissages ventriculaires gauches et un effet antiremodelage ventriculaire ou auriculaire gauche sous spironolactone et LCZ, méritent d’être confirmés par des essais de phase III portant sur la morbi-mortalité. Cela sera bientôt le cas pour la spironolactone grâce à l’étude TOP-CAT. Quant au LCZ, il devrait dans l’avenir faire l’objet d’un essai d’envergure dans l’insuffisance cardiaque diastolique, comme c’est actuellement le cas dans l’insuffisance cardiaque systolique avec l’essai PARADIGM où il est comparé à l’énalapril. Il restera à déterminer le comparateur, ce qui n’est pas évident en l’absence de recommandations de niveau de preuve élevé pour le traitement de l’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée.
*CHU Toulouse-Rangueil
Liens d’intérêt : intervenant auprès des laboratoires Roche-Diagnostic, Pfizer et Servier.
Une définition plus précise de l’IC diastolique
L’insuffisance cardiaque diastolique bénéficie depuis les dernières recommandations européennes d’une définition précise, exigeant la présence de symptômes typiques et de signes caractéristiques d’insuffisance cardiaque, une fraction d’éjection ≥ 50 % sans dilatation ventriculaire gauche et de l’existence, soit d’une anomalie structurale cause de la dysfonction diastolique, l’hypertrophie ventriculaire gauche, ou conséquence de cette dernière, la dilatation de l’oreillette gauche, soit d’une anomalie écho-Doppler témoignant directement de la dysfonction diastolique (élévation E/e’ au DTI en ETT notamment). Ce syndrome complexe ne se limite plus ainsi à un simple diagnostic négatif d’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée.
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