1) L’insuffisance cardiaque diastolique ne se définit plus négativement comme une insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée, mais nécessite la présence de quatre conditions :
– des symptômes typiques d’insuffisance cardiaque ;
– des signes caractéristiques d’insuffisance cardiaque ;
– une fraction d’éjection ≥ 50 % et un ventricule gauche non dilaté ;
– l’existence d’une anomalie structurale cardiaque, cause de la dysfonction diastolique, l’hypertrophie ventriculaire gauche, ou conséquence de cette dernière, la dilatation de l’oreillette gauche (› 34 ml/m2), et/ou la présence de signes de dysfonction diastolique (onde e’‹ 9 cm/s et/ou onde E/e’ › 15).
2) Les symptômes d’insuffisance cardiaque ne sont pas toujours typiques, le diagnostic doit être évoqué devant des sifflements respiratoires (wheezing), un ballonnement intestinal, une perte d’appétit, une confusion chez le sujet âgé, une dépression.
3) Le diagnostic d’insuffisance cardiaque peut maintenant faire appel à deux stratégies différentes, l’une fondée sur l’échocardiographie et l’autre sur les peptides natriurétiques. Ainsi, si l’échocardiographie, qui demeure un examen clef, n’est pas disponible, une approche alternative fondée sur les peptides natriurétiques peut être mise en œuvre, en utilisant un seuil différent pour les situations chroniques et aiguës. Le diagnostic d’insuffisance cardiaque est éliminé par des valeurs de BNP ou de NT-proBNP respectivement ‹ 35 et 125 pg/ml chez un patient ambulatoire présentant des symptômes progressifs et ‹ 100 et 300 pg/ml chez un sujet présentant une dyspnée aiguë, avec une excellente valeur prédictive négative. Chez les patients dont les valeurs sont supérieures, une échocardiographie est recommandée.
4) L’importance des examens biologiques est soulignée, devant comprendre, en dehors des peptides natriurétiques :
– un examen chimique sanguin – Na+, K+, Ca++, urée, créatinine, estimation du DFG, TGO, TGP, bilirubine, ferritine, TSH – pour détecter les causes réversibles d’insuffisance cardiaque (hypocalcémie, dysthyroïdie), des comorbidités et évaluer les possibilités thérapeutiques ;
– une numération sanguine à la recherche d’une anémie.
5) La place du régime sans sel, qui reste impératif dans l’insuffisance cardiaque aiguë, est maintenant discutée au cours de l’insuffisance cardiaque chronique où l’apport sodé a été revu à la hausse aux environs de 6 g/j dans les formes les moins sévères.
6) L’intérêt d’un exercice physique d’endurance régulier pour améliorer les symptômes et les capacités fonctionnelles a été souligné (recommandations de classe I et de niveau A).
7) La place des antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II a été revue à la baisse, ils ne sont recommandés que :
– chez les patients intolérants aux IEC (toux) avec une fraction d’éjection ≤ 4 % en association aux bêtabloquants et aux antagonistes des récepteurs minéralo-corticoïdes (ARM) pour diminuer le risque de décès et d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque (recommandations de classe I et de niveau A) ;
– chez les patients demeurant symptomatiques malgré un traitement par IEC et bêtabloquants, avec une fraction d’éjection ≤ 40 % et ne pouvant tolérer les antagonistes des récepteurs minéralo-corticoïdes pour diminuer le risque d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque (recommandations de classe I et de niveau A).
8) La place des antagonistes des récepteurs minéralo-corticoïdes (terme à préférer aux antagonistes de l’aldostérone car plus précis) devient essentielle et ils sont recommandés :
– chez tous les patients demeurant symptomatiques en classe II à IV de la NYHA avec une fraction d’éjection ≤ 35 % malgré un traitement par IEC (ou ARA II si les IEC ne sont pas tolérés) et bêtabloquants pour diminuer le risque de décès et d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque, si le DFG est ≥ 30 ml/kg/min et la kaliémie est ≤ 5 mmol/l (recommandations de classe I et de niveau A),
– en association aux IEC et aux bêtabloquants au cours des dysfonctions ventriculaires gauches du postinfarctus chez les patients ayant présenté en phase aiguë une insuffisance cardiaque pour diminuer le risque de décès et d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque (recommandations de classe I et de niveau B).
9) L’association IEC-ARA II-ARM est contre-indiquée du fait des risques d’hyperkaliémie et d’altération de la fonction rénale (recommandations de classe III et de niveau C).
10) L’ivabradine, qui est un agent bradycardisant pur, fait son entrée dans le traitement de l’insuffisance cardiaque systolique :
– elle est indiquée chez les patients en rythme sinusal dont la fréquence cardiaque est ≥ 70 bpm malgré un traitement par une dose maximale tolérée de bêtabloquants, avec une fraction d’éjection ≤ 35 %, demeurant symptomatiques en stade II à IV malgré un traitement par IEC (ou ARA II si les IEC ne sont pas tolérés) et ARM pour réduire le risque d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque (recommandations de classe IIa et de niveau B) ;
– elle peut être utilisée chez les patients en rythme sinusal dont la fréquence cardiaque est ≥ 70 bpm ne pouvant tolérer les bêtabloquants, avec une fraction d’éjection ≤ 35 %, traités par IEC (ou ARA II si les IEC ne sont pas tolérés) et ARM pour réduire le risque d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque (recommandations de classe IIb et de niveau C).
10) La digoxine, qui est également chronotrope négative, perd donc du terrain dans le traitement de l’insuffisance cardiaque systolique en rythme sinusal. Elle peut être utilisée :
– chez les patients en rythme sinusal ne pouvant tolérer les bêtabloquants avec une fraction d’éjection ‹ 45 %, traités par IEC (ou ARA II) et ARM, pour diminuer le risque d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque (recommandations de classe IIb et de niveau B), bien que l’ivabradine soit une alternative chez les patients dont la fréquence cardiaque est ≥ 70 bpm,
– chez les patients en rythme sinusal tolérant les bêtabloquants avec une fraction d’éjection ≤ 45 %, traités par IEC (ou ARA II) et ARM, demeurant symptomatiques en stade II à IV, pour diminuer le risque d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque (recommandations de classe IIb et de niveau B),
Chez les patients en fibrillation atriale avec une fraction d’éjection ≤ 45 %, elle est indiquée en première intention chez les patients ne tolérant pas les bêtabloquants (recommandations de classe I et de niveau B) et en deuxième intention en association aux bêtabloquants en cas de réponse incomplète à ces derniers pour ralentir la fréquence ventriculaire (recommandations de classe I et de niveau B).
12) La stimulation multisite voit ses indications étendues aux patients en stade II de la NYHA présentant une fraction d’éjection ≤ 30 % et soit une durée du QRS ≥ 130 ms en présence d’un bloc de branche gauche, soit une durée› 150 ms en l’absence d’un bloc de branche gauche, pour diminuer le risque de décès et d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque (recommandations de classe IIa et de niveau A). Dans les deux cas, une CRT-D est préférable à une CRT-P.
13) L’assistance circulatoire voit ses indications élargies chez les patients les plus sévères. En sus de son indication classique en attente d’une transplantation cardiaque (recommandations de classe I et de niveau B), elle est indiquée dans quatre autres situations :
– en destination-thérapie pour les patients non éligibles à une transplantation cardiaque (recommandations de classe IIa et de niveau B) ;
– en pont à la décision chez les patients dont le pronostic vital immédiat est en jeu pour les maintenir en vie jusqu’à ce qu’une évaluation complète permette de proposer une décision thérapeutique ;
– en pont à la candidature à la transplantation pour rendre éligible un patient temporairement contre-indiqué à cette dernière en améliorant ses fonctions vitales ;
– en attente d’une récupération myocardique, comme dans les myocardites aiguës.
Les candidats à l’assistance circulatoire sont ainsi les patients en insuffisance cardiaque avancée depuis plus de deux mois malgré un traitement médical et électrique optimal, présentant plus d’un des critères suivants :
– fraction d’éjection ‹ 25 % et pic VO2 ‹ 12 ml/kg/min ;
– avoir été hospitalisé au moins trois fois pour décompensation cardiaque dans les douze derniers mois sans facteur précipitant évident ;
– être dépendant des inotropes intraveineux ;
– présenter une dysfonction rénale et/ou hépatique due à un bas débit circulatoire et non à des pressions de remplissage inadéquates ;
– avoir une fonction ventriculaire droite s’altérant.
14) Pour l’insuffisance cardiaque aiguë, les recommandations soulignent qu’en cas d’altération de la fonction systolique la trithérapie antineurohormonale par IEC, bêtabloquants et ARM doit être débutée puis augmentée dès que possible avant la sortie, qui doit être associée à un plan d’optimisation des posologies pour compléter la titration en ambulatoire. De plus, en cas de décompensation, en l’absence de choc cardiogénique, les bêtabloquants peuvent être poursuivis.
15) Le traitement de l’insuffisance cardiaque diastolique continue à marquer le pas puisque les recommandations reconnaissent qu’aucun traitement n’a, à ce jour, démontré de bénéfice dans cette indication.
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