Les anticoagulants oraux directs (AOD), qu’il s’agisse du dabigatran (anti-IIa) ou des antiXa (rivaroxaban et apixaban) sont aujourd’hui très largement utilisés en première intention à la place des antivitamines K. Et s’ils sont prescrits à doses fixes, sans surveillance biologique, le risque de survenue d’une hémorragie majeure ou la nécessité de réaliser un geste chirurgical en urgence ont conduit à développer des antidotes spécifiques. « Le développement d’agents de réversion des AOD répond à une demande forte des autorités de tutelle et des patients, les praticiens étant plutôt en attente de produits à demi-vie courte, rappelle le Pr Jean-Claude Deharo. En effet, le meilleur des antidotes est le temps et les situations nécessitant le recours à un antidote sont en pratique assez rares ».
Une rapide efficacité de l'idarucizumab
Aujourd’hui, un seul agent de réversion est commercialisé en France, spécifique du dabigatran : l’idarucizumab (Praxbind, développé par le laboratoire Boehringer Ingelheim qui commercialise également le dabigatran). Il s’agit d’un fragment d’anticorps monoclonal humanisé, qui présente une très forte affinité avec le dabigatran, dont il neutralise l’effet antithrombotique. Son utilisation est réservée à l’usage hospitalier, en situation d’urgence (chirurgicale ou procédurale) ou en cas de saignements incontrôlés ou menaçant le pronostic vital. Les résultats de l’étude REVERSE-AD, qui ont conduit à l’autorisation de mise sur marché de l’idarucizumab, ont souligné l’efficacité de cet antidote, « qui s’exerce en quelques minutes, sans entraîner d’hypercoagulabilité », indique le Pr Jean-Claude Deharo. « L’effet est de courte durée, de 24 heures environ, sans problème de tolérance. Notamment, aucun signal inquiétant d’ordre immunoallergique n’a été rapporté avec ce produit qui pourrait être utile au bloc opératoire, aux urgences ou dans les “stroke centers” ».
Des antidotes antiXa en développement
D’autres agents visant la réversion de l’effet des antiXa sont en cours de développement, mais aucun n’est pour l’instant commercialisé. L’andexanet alpha (du laboratoire Portola pharmaceuticals) vient d’être approuvé par la Food and Drug Administration aux États-Unis. Il s’agit d’un facteur Xa recombinant modifié, qui présente une haute affinité pour les inhibiteurs directs du facteur Xa mais aussi pour les complexes héparines-antithrombines et le fondaparinux, sans activité catalytique. Les données de l’étude ANNEXA-4, présentées en mars dernier lors du congrès de l’American College of Cardiology font état de l’obtention d’une hémostase de bonne ou très bonne qualité dans les 12 heures après une injection chez 83 % des patients. « Cet agent est donc d’une très bonne efficacité, sans qu’elle ne soit absolue comme cela est le cas avec l’idaricuzumab », note le Pr Deharo, estimant qu’un agent de réversion doit idéalement avoir une efficacité immédiate très rapide et totale.
« Jusqu’alors nous avions à notre disposition des agents hémostatiques non spécifiques, rendant les patients hypercoagulables. Désormais, nous avons donc un antidote très spécifique du dabigatran, qui peut être utile dans certaines situations d’urgence ».
D’après un entretien avec le Pr Jean-Claude Deharo, hôpital de la Timone (Marseille)
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024