Trithérapie fixe dans l’HTA

Une simplification du traitement

Publié le 20/06/2013
Article réservé aux abonnés
1371692541440534_IMG_106976_HR.jpg

1371692541440534_IMG_106976_HR.jpg
Crédit photo : BSIP

Depuis trois ans, les praticiens disposent d’une trithérapie fixe antihypertensive (Exforge HCT, laboratoires Novartis) qui a obtenu une autorisation de mise sur le marché (AMM) dans l’hypertension artérielle (HTA) en tant que traitement de substitution, lorsque la pression artérielle est suffisamment contrôlée et stabilisée par l’association d’amlodipine, valsartan et hydrochlorothiazide, pris soit séparément soit sous forme d’un composant double et d’un composant seul. Plusieurs associations fixes à différentes doses d’amlodipine (5 ou 10 mg), de valsartan (160 et 320 mg) et d’hydrochlorothiazide (12,5 ou 25 mg) sont disponibles.

« Mais après l’obtention de cette AMM, la commission de transparence a émis des avis contradictoires, rappelle le Pr Xavier Girerd. Tout d’abord un avis négatif, soulignant notamment un risque de mésusage, ce qui a abouti à l’absence de soumission de prix et à la commercialisation de ce médicament sans remboursement. Puis, suite aux nouvelles données apportées par le laboratoire, prouvant que le mésusage n’était pas observé dans les pays européens et aux États-Unis où ce médicament est remboursé et prescrit, la Commission de transparence a donné son accord pour un remboursement en tant que traitement de substitution. Décision ensuite contredite par l’autorité ministérielle qui, malgré l’avis de la commission de transparence, n’a pas délivré de prix à la spécialité, en mettant à nouveau en avant un risque de mésusage . Un recours devant le Conseil d’État a été déposé par le laboratoire Novartis, l’affaire est en cours. Le dossier d’une autre association triple et fixe (olmésartan, amlodipine et hydrochlorothiazide, Sevikar HCT, laboratoire Daiichi Sankyo), a été soumis aux autorités avec une demande d’AMM dans deux indications : en traitement de substitution et en trithérapie fixe dans les suites d’une bithérapie. Une troisième association pourrait également demander une AMM », expose le Pr Girerd, pour lequel « la décision de ne pas rembourser l’association fixe de trois antihypertenseurs a comme conséquence de bloquer la commercialisation de nouveaux produits pour le traitement de l’HTA en France, alors que le contrôle de l’HTA n’est obtenu que chez 50 % des hypertendus traités ».

Un intérêt démontré

« L’attente des professionnels de santé, en particulier les experts de l’HTA et les cardiologues, est pourtant dans l’intérêt des trithérapies (bloqueur du système rénine angiotensine, inhibiteur calcique avec l’amlodipine à 2 doses et diurétique avec l’hydrochlorothiazide à 2 doses) qui ont montré leur efficacité supérieure chez les hypertendus insuffisamment contrôlés par une bithérapie et qui sont maintenant clairement recommandées pour améliorer le contrôle de l’HTA en population », poursuit le Pr Girerd avant de souligner que le fait de disposer d’associations fixes, avec une possibilité de moduler les doses, permet une simplification du traitement et une amélioration de l’observance. « Il a été prouvé dans des essais et dans les méta-analyses, qu’une association fixe de deux médicaments améliore l’observance par comparaison à une asociation libre. Le rapport récent de la HAS sur l’efficience des traitements antihypertenseurs (http://www.has-sante.fr) a montré que l’inobservance était un obstacle important à un suivi efficient des hypertendus traités. Outre l’amélioration de l’observance, les associations fixes présentent l’avantage de faciliter le recours aux bonnes doses, alors que la tendance de nombreux prescripteurs dans les associations non fixes est de donner des posologies trop faibles, source de non contrôle tensionnel. Au cours de la période 2002-2007, on a d’ailleurs constaté une amélioration du contrôle tensionnel en France, contemporaine de l’augmentation des prescriptions de bithérapies fixes » souligne le Pr Girerd.

Risques potentiels

Quels pourraient être les risques des associations fixes ? Le problème de l’adaptation des doses n’en est pas vraiment un. Plusieurs doses sont disponibles et les praticiens peuvent à tout moment, en cas de situation particulière (déshydratation, maladie intercurrente…), diminuer les doses de la trithérapie ou repasser à une bithérapie. Autre argument avancé par les autorités de santé : les risques de rebond hypertensif lié à l’arrêt brutal de la prise d’un comprimé contenant 3 principes actifs. « Dans les pays où la trithérapie fixe est utilisée, aucun signal sanitaire défavorable lié aux arrêts de traitement n’a été observé. Ce qui est assez logique car le problème de l’inobservance est surtout rencontré dans les premiers mois de prise en charge thérapeutique. Or, les trithérapies ne sont pas prescrites chez les hypertendus nouvellement traités (au cours des six premiers mois). Il s’agit donc d’un risque théorique, qu’aucun constat dans la vraie vie n’est venu étayer. Les autres risques potentiels (cumul des effets secondaires par exemple) sont connus et sont les mêmes que les associations soient fixes ou non. Quant au risque de mésusage, il sous-tendrait une incompétence des prescripteurs, ce qui est un jugement très désobligeant pour les médecins qui prennent en charge les hypertendus », conclut le Pr Girerd.

D’après un entretien avec le Pr Xavier Girerd, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, Paris.

Liens d’intérêt : le Pr Xavier Girerd déclare participer en 2 013 à des expertises et des actions d’enseignement au bénéfice des laboratoires Novartis et Daiichi-Sankyo.

Dr Isabelle Hoppenot

Source : Bilan spécialistes