La chirurgie robotisée freinée par une class action aux Etats-Unis

Publié le 11/10/2013
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Crédit photo : S. Toubon

Selon Bloomberg News, un site spécialiste des marchés financiers, la Food and Drug Administration (FDA) aurait comptabilisé 70 décès depuis 2009 en rapport avec l’usage des équipements de robotique chirurgicale, sans compter un certain nombre de lésions nerveuses, vasculaires, viscérales... pour la plupart d’entre elles très préoccupantes.

La FDA a donné un assentiment « silencieux » à l’usage de cette robotique chirurgicale tout en demandant d’en rapporter au fur et à mesure de son usage les évènements indésirables. La FDA n’a cependant imposé aucune réglementation au sujet de la publicité utilisée par les centres hospitaliers autour de ces équipements. Le réveil est pour le moins brutal. C’est la mise en cause d’un Hôpital de Denver (Colorado) au cours d’une plainte en nom collectif qui a sonné le glas de ce développement. Cette avancée technologique avait séduit tant d’acteurs que de nombreux hôpitaux la faisaient figurer sur leur site internet.

Quand le rêve est devenu réalité

Depuis de nombreuses années de nombreux chirurgiens caressent le rêve de pouvoir faire réaliser une intervention par un robot, en restant assis derrière leur console de commande. L’industrie, parfois assistée par des fonds à risque, s’est lancée, principalement aux Etats-Unis, dans une recherche opiniâtre pour tenter de faire de ce rêve une réalité.

Certains hôpitaux, encore plus aux Etats-Unis qu’en Europe, ont lancé des campagnes publicitaires autour de cette technologie d’avant-garde pour recruter plus de patients aux dépens d’institutions non équipées de ces robots. Malgré un coût très élevé, l’accent de ces campagnes publicitaires était mis sur une chirurgie moins invasive, et sur une plus grande précision du geste technique. Dans la phase initiale d’enthousiasme à l’égard de cette chirurgie elle a pu être utilisée dans des interventions très diverses : résection prostatique, hystérectomie, cholécystectomie, parathyroïdectomie, voire même remplacement valvulaire cardiaque...

Pas d’essais comparatifs randomisés

Le leader industriel de cette épopée chirurgicale est une Société du nom de « Intuitive Surgical » qui se défend en arguant du fait que tout progrès chirurgical doit faire les frais d’une courbe d’apprentissage. Cependant de nombreux éléments restent à charge à l’encontre de cette chirurgie robotisée : il n’existe pas d’essai randomisé irréprochable prouvant la supériorité de ce type de chirurgie par rapport à la chirurgie traditionnelle ; de nombreux essais cliniques ont été biaisés par un tri très sélectif des candidats et des indications ; bon nombres d’études réalisée se trouvent en conflit d’intérêt patent ou non avec les sociétés engagées dans cette aventure industrielle ; enfin d’un point de vue éthique la plupart des patients recrutés au sein de ces études ont fait l’objet d’une information beaucoup plus orientée vers les mérites et bénéfices de ce type de chirurgie que vers ses éventuels inconvénients et/ou risque.

Au total, si la chirurgie robotisée peut encore continuer de faire l’objet d’une recherche en chirurgie expérimentale, son utilisation humaine mérite pour l’instant se cantonner à certaines étapes sélectionnées d’une intervention mais en aucun cas se substituer au chirurgien de bout en bout sur l’essentiel d’une intervention.

Chirurgien Orthopediste, Membre de la Société Française de Chirurgie Orthopédiques (SOFCOT)

Pr CHARLES MSIKA

Source : lequotidiendumedecin.fr