Au sens large du terme, l’exposome désigne la totalité des expositions que subit un organisme humain depuis sa conception à des facteurs environnementaux, y compris le mode de vie. Dans son acceptation plus restreinte, celle choisie par la Fondation de l’Académie de médecine pour son nouveau cycle de débats, ce terme fait référence aux polluants, notamment chimiques, présents dans l’environnement, qu’il s’agisse de l’eau, de l’air, de l’alimentation, des sols ou encore des objets de la vie courante.
Quatre grands types de pathologies sont ainsi associés à la multi-exposition aux polluants environnementaux : des maladies hormonodépendantes, pour lesquelles l’implication de perturbateurs endocriniens est avérée ou suspectée (diabète, cancers hormonodépendants, troubles du développement et de la reproduction) ; des cancers liés à des polluants présents dans l’environnement ou en milieu professionnel ; des troubles cardiovasculaires, respiratoires ou allergiques en lien avec la pollution de l’air extérieur et intérieur ; des troubles neuropsychologiques.
De la complexité des perturbateurs endocriniens
Parmi les polluants, les perturbateurs endocriniens continuent de faire largement débat tant il est complexe de les caractériser et d’évaluer leurs effets sur les populations. « Le terme de perturbateur endocrinien, apparu en 1991, fait avant tout référence à un mode d’action et non à un effet », indique le Pr Luc Multigner, directeur de recherche à l’Inserm. « Pour qu’une substance puisse être considérée comme perturbateur endocrinien, elle doit présenter trois caractéristiques : avoir des propriétés hormonales, entraîner des effets indésirables et qu’il y ait une relation entre ces propriétés hormonales et les effets indésirables », précise-t-il. « Selon une estimation de l’OMS et du programme des Nations unies de 2012, environ 800 substances sont des perturbateurs endocriniens suspectés ou avérés », ajoute Sébastien Denys, directeur Santé-environnement-travail à Santé publique France (SPF).
Or, ces substances, qui peuvent être d’origine naturelle (phyto-œstrogènes) ou industrielle (pesticides, plastifiants, adhésifs, retardateurs de flammes, etc.), sont présentes dans tous les compartiments environnementaux, avec parfois une forte rémanence. Lipophiles, elles sont bioaccumulables et ont une action à faible dose, selon des modalités non linéaires. « Elles vont, de plus, pouvoir interagir entre elles pour imprégner les populations par le biais d’une multitude de voies d’exposition que l’on sait plus ou moins bien caractériser à l’heure actuelle », complète Sébastien Denys. « Elles peuvent également avoir d’autres effets que celui de perturbateur endocrinien, cancérigènes par exemple ; or, en interaction, ces effets peuvent être démultipliés sans que l’on sache vraiment quel impact cela peut avoir », ajoute-t-il.
Enfin, la fenêtre d’exposition joue un rôle majeur sur les conséquences prévisibles. L’embryon est ainsi une cible vulnérable, ces substances étant capables de traverser la barrière placentaire, « entraînant des altérations de l’expression génomique, sans modification de la structure nucléotidique, qui persistent après la naissance et sont susceptibles d’affecter plusieurs générations », complète le Pr Claude Jaffiol, président honoraire de l’Académie de médecine.
Effets avérés… et suspectés
Les effets de certains perturbateurs endocriniens sont donc multiples : cancers du sein, cancers vaginaux, anomalies gonadiques et obésité chez les descendants de femmes traitées par le Distilbène pendant la grossesse ; augmentation du risque d’accouchement prématuré, du risque de cancer de la prostate et de troubles du développement chez les nourrissons et jeunes enfants exposés in utero à la chlordécone aux Antilles françaises ; augmentation du risque de cancer du sein chez les jeunes filles exposées dans l’enfance ou in utero à l’insecticide DDT ; augmentation du risque de cancer du sein chez les femmes exposées au bisphénol A.
De nombreuses interrogations demeurent sur le rôle des perturbateurs endocriniens dans la progression de l’épidémie de diabète de type 2 à travers le monde. « Bien sûr, les principaux facteurs responsables sont les dérives alimentaires, la sédentarité et la génétique », rappelle le Pr Jaffiol. « Mais la question se pose depuis une vingtaine d’années », ajoute-t-il. Un certain nombre d’arguments expérimentaux et d’études prospectives plaident en ce sens. Et font que « l’importance relative des perturbateurs endocriniens dans la pandémie de diabète par rapport aux facteurs de risque traditionnels mérite d’être approfondie », conclut le président de l’Académie.
D’après une visioconférence organisée par la Fondation de l’Académie de médecine
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