Une équipe de l'université de Miami publie dans « The New England Journal of Medicine » de bons résultats à 12 mois pour la greffe d'îlots pancréatiques, pour la première fois, au niveau de l'épiploon, chez une patiente diabétique de type 1.
« Cette étude confirme que la greffe d'îlots pancréatiques, ça marche en dehors du foie, explique le Pr François Pattou, chirurgien au CHRU de Lille. C'est un concept merveilleux. C'est la première fois qu'on le prouve avec l'épiploon. D'autres sites ont été testés avec succès, comme nous l'avons démontré en 2010 dans le muscle ».
Comme la greffe de pancréas, la greffe d'îlots pancréatiques est une option thérapeutique exceptionnelle réservée à quelques rares cas de diabète de type 1 instable avec hypoglycémies fréquentes, sévères et non ressenties.
Des limites techniques
« Aujourd'hui en France, une vingtaine de patients sont opérés d'une greffe d'îlots pancréatiques allogéniques dans une dizaine de centres, dont le nôtre, dans le cadre de la recherche, rappelle le Pr Pattou. À terme, si le système était déployé en routine, la cible serait de viser 100 à 200 patients par an, avec comme limite principale le nombre de donneurs. Mais dans l'absolu, si l'on arrivait à surmonter les deux freins que sont l'isolement très compliqué des îlots et l'immunosuppression, la greffe d'îlots pourrait intéresser tous les diabétiques ».
Moins lourde que la greffe de pancréas, la greffe d'îlots pancréatiques reste néanmoins limitée par des contraintes techniques, en particulier liées au site classique de transplantation, dans le foie (volume transplanté restreint, saignement, immunosuppression élevée, réponse inflammatoire).
Une des clefs d'amélioration passe par le développement de sites d'implantation alternatifs et de nouveaux outils pour la détection in vivo des cellules transplantées. « L'épiploon est une surface vascularisée dense pour l'implantation d'îlots, rejoint le système porte et est facilement accessible », fait valoir l'équipe de l'institut de recherche sur le diabète de Miami sous la direction de David Baidal.
L'astuce d'une gélatine nutritive
Dans cette étude, les chercheurs ont mis au point une astuce pour rendre possible la greffe intra-abdominale : l'utilisation d'une sorte de gélatine à base de thrombine et de plasma autologue. « Cette gélatine, en créant un petit caillot, permet de fixer les îlots sur l'omentum, explique le Pr Pattou. Ce milieu favorable apporte de plus les éléments nutritifs nécessaires pour passer le cap des 10 jours avant vascularisation efficace ».
Pour Camillo Ricordi, directeur de l'institut de recherche sur le diabète (DRI) à Miami et co-auteur : « L'objectif (...) est ensuite d'introduire de nouvelles technologies en vue de notre but ultime qui est de remplacer la fonction endocrine pancréatique perdue dans le diabètre de type 1 sans avoir besoin de traitements anti-rejet , ce que nous appelons le DRIBioHub ».
Néanmoins, pour l'instant, le site hépatique reste la référence (le « gold standard ») pour la greffe d'îlots, estime le spécialiste lillois. « Les résultats à 12 mois chez cette patiente unique révèlent déjà une légère dégradation de l'équilibre glycémique, explique le Pr Pattou. Avec la greffe intrahépatique, nous disposons de résultats à plus de 10 ans. À Lille, dans notre série sur 50 patients greffés, 10 d'entre eux ont atteint le cap des 10 ans. Un quart, soit 5 patients, sont totalement insulino-indépendants. À 5 ans, 50% des patients insulino-indépendants et près de 80% des greffons sont fonctionnels. Si les patients ont de nouveau besoin d'un peu d'insuline, l'équilibre glycémique est amélioré dans la majorité des cas ».
Le défi (de taille) à relever est d'arriver à se passer de traitements anti-rejets. « Le traitement immunosuppresseur utilisé avec le site de l'épiploon est le même que dans le greffe intra-hépatique », relève le chirurgien. Deux voies possibles sont à l'étude : l'induction de la tolérance, le « Graal de la greffe », rappelle le Pr Pattou, et l'encapsulation.
Une étude clinique originale (ViaCyte) est en cours au Canada, testant l'encapsulation de cellules souches humaines. « Les résultats préliminaires ne sont pas extraordinaires, notamment en raison d'une réaction inflammatoire autour des capsules », explique le Pr Pattou. L'équipe strasbourgeoise du CEED défend un projet de macroencapsulation, pour l'instant moins avancé, le pancréas bio-artificiel Mailpan, au sein de son spin-off Defymed.
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