Traitements hormonaux du cancer de la prostate

Les prescrire à bon escient

Publié le 07/05/2015
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Le Pr Nicolas Mottet rappelle les

« 3 indications standard indiscutables : métastases, maladies localement avancées à haut risque (associé à la radiothérapie (2)) et envahissement ganglionnaire avancé confirmé après prostatectomie radicale. La durée de l’hormonothérapie varie selon l’indication ».

Dans les autres indications, le Pr Nicolas Mottet souligne que « le traitement hormonal est surutilisé et ne repose sur aucune preuve. Dans la maladie non métastatique, il doit toujours s’associer à un traitement local et n’a pratiquement aucune place en monothérapie. Dans les récidives après un traitement local il n’existe pas de preuve de son intérêt sur la survie, malgré une utilisation fréquente. Ce n’est qu’en cas de maladie agressive (temps de doublement du PSA ‹ 6 mois), qu’il a probablement un intérêt. Ailleurs il ne fait qu’altérer la qualité de vie ».

Il invite « en cas de comorbidités (diabète…) et surtout d’antécédents cardiovasculaires à strictement respecter les indications en raison d’une surmortalité (3) chez ces patients à risque, liée à des effets toxiques du traitement hormonal (pseudosyndrome métabolique, troubles cardiovasculaires.) ».

Analogues et antagonistes de la LHRH se valent : « il est aujourd’hui impossible d’affirmer qu’une des classes thérapeutique est supérieure à l’autre ou génère moins de comorbidité cardiovasculaire, même si des éléments le suggèrent », précise le Pr Nicolas Mottet.

Les nouveaux traitements hormonaux : abiraterone et enzalutamide

Réservés aux patients métastatiques résistants à la castration, ils apportent (4,5) un bénéfice sur la survie globale, la qualité de vie et la survie sans progression radiologique. Seuls 20 à 25 % des cancers résistants à la castration y sont réfractaires. L’abiraterone doit être associée à la prednisone, pas l’enzalutamide. Les essais de phase III sur des populations comparables de plus de 1 000 patients donnent des résultats similaires (taux de réponse, hasard ratio, survie globale).

Le Pr Nicolas Mottet apporte des éléments de réponse à des questions concernant leur usage :

« Sauf contre-indication spécifique à l’un de ces produits (possible en raison de profils de toxicité et de tolérance différents) rien ne permet de choisir entre ces 2 molécules.

En cas d’échappement à l’un, l’autre n’a qu’un intérêt immédiat limité (résistance croisée).

Choisir entre une chimiothérapie et un traitement hormonal de rattrapage est compliqué. L’hormonothérapie est efficace chez de nombreux patients peu ou pas symptomatiques. Les malades qui y sont réfractaires ainsi que les patients très douloureux devraient avoir une chimiothérapie d’emblée. Le seul marqueur prédictif connu de réponse à l’hormonothérapie de rattrapage (ARV7, utilisé en recherche) n’est pas utilisable en clinique. Pour surveiller la réponse à l’hormonothérapie de rattrapage -et si besoin passer rapidement à la chimiothérapie-, la clinique prime, confortée par l’évolution radiologique (le PSA a peu de valeur : il existe une dissociation possible entre son évolution et l’efficacité clinique).

Les métastases viscérales constituent un facteur pronostic péjoratif mais pas un facteur prédictif de réponse : certaines répondent au traitement hormonal (pré- ou post-chimiothérapie) », indique le Pr Nicolas Mottet.

D’après un entretien avec le Pr Nicolas Mottet, urologue, CHU de Saint-Étienne

(1) Disponible sur www.uroweb.org

(2) Mason MD et al. J Clin Oncol. 2015 (in press)

(3) Tsai HK et al. J Nat Canc Inst. 2007;99:1516-24

(4) Ryan CJ et al. Lancet Oncol. 2015;16:152-60

(5) Beer N et al. N Engl J Med. 2014;371:424-33

Dr Sophie Parienté

Source : Bilan spécialiste