Les recommandations de 2023 sur le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) sont les premières à être élaborées par quatre sociétés savantes, les Sociétés européennes de reproduction humaine et d’embryologie (ESHRE) et d’endocrinologie (ESE) et les Sociétés américaines de médecine reproductive (ASRM) et d’endocrinologie. Elles étaient devenues nécessaires par rapport à celles de 2018, endossées uniquement par l’ESHRE, pour tenir compte des progrès dans la démarche diagnostique et de l’attention portée au dépistage et à la prise en charge des comorbidités.
Un algorithme diagnostique précis
Les critères diagnostiques cliniques n’ont pas changé par rapport à ceux de 2018, ni même par rapport à ceux de Rotterdam 2003, mais leur définition a été affinée. Le diagnostic repose toujours sur la présence de deux de ces trois éléments : dysovulation, hyperandrogénie clinique et/ou biologique, présence d’ovaires polykystiques.
Les troubles du cycle se définissent par un espacement de moins de 21 jours ou plus de 35 jours, ou la présence de moins de huit cycles par an, ou une aménorrhée primaire à l’âge de 15 ans.
L’hyperandrogénie clinique se caractérise par la présence d’un hirsutisme clinique, quantifié par le score de Ferriman et Gallwey ; l’existence d’une alopécie ou d’une acné peuvent être prises en compte, mais on connaît mal leur valeur prédictive positive diagnostique. L’hyperandrogénie biologique s’évalue par le calcul de la testostérone libre, fondé sur le dosage de la testostérone totale et de la sex hormone-binding globulin (SHBG). Ces dosages doivent être réalisés si possible par spectrométrie de masse, ou par immunodosages avec extraction et chromatographie. Le dosage de la delta-4-androstène-dione et du sulfate de déhydro-épiandrostérone (SDHEA) ont peu d’utilité en deuxième intention, si la testostérone est normale.
L’échographie pour le diagnostic des ovaires polykystiques se fait par voie endovaginale. Le diagnostic se fait sur la présence d’au moins 20 follicules de diamètre inférieur à 9 mm et/ou d’un volume ovarien important (supérieur à 10 ml), sans présence de kyste, ni de follicule dominant. Désormais, le dosage de l’AMH peut être une alternative à l’échographie et les recommandations laissent le choix entre les deux examens pour le diagnostic.
Limiter les examens
Devant des cycles irréguliers et une hyperandrogénie clinique, il faut éliminer les diagnostics différentiels, comme un bloc en 21-hydroxylase mais aussi l’adénome à prolactine, le syndrome de Cushing, les tumeurs surrénaliennes ou ovariennes.
En l’absence d’hyperandrogénie clinique, on recherche une hyperandrogénie biologique, qui, associée aux troubles du cycle, permet de faire le diagnostic sans autre examen en l’absence d’autres causes.
Ce n’est qu’en l’absence d’un de ces deux critères – hyperandrogénie ou troubles du cycle – ou en présence d’autres symptômes gynécologiques que l’échographie est indiquée.
« Ces nouveaux critères permettent de diminuer le nombre d’échographies endovaginales inutiles, en particulier chez l’adolescente, où l’échographie ne doit pas être réalisée dans les huit ans suivant l’instauration de la ménarche, du fait de la fréquence des kystes folliculaires, rappelle la Pr Anne Bachelot (La Pitie Salpêtrière, AP-HP). Comme on ne peut pas non plus chez l’adolescente se baser sur l’AMH, il faut rester sur les critères cliniques comme les troubles du cycle et l’hirsutisme, pour éviter à la fois les surdiagnostics sans toutefois négliger un SOPK. »
Repérer les complications
Les femmes atteintes de SOPK sont à risque de développer un diabète gestationnel ou un diabète de type 2, aussi un dépistage doit-il être systématiquement réalisé au moment du diagnostic, quel que soit l’indice de masse corporelle, par une hyperglycémie orale provoquée à 75 mg. Il sera répété tous les un à trois ans, en fonction des facteurs de risque. Même recommandation pour le bilan lipidique : à faire au diagnostic puis tous les un à trois ans.
La mesure de la pression artérielle doit être annuelle, et le SAOS doit être repéré systématiquement, par exemple à l’aide du questionnaire de Berlin. Enfin, les traits dépressifs et anxieux sont fréquents mais sous-diagnostiqués et insuffisamment pris en charge.
« Les recommandations insistent en premier lieu sur la modification du style de vie, en particulier sur le plan de la diététique et de l’activité physique », souligne la Pr Bachelot.
Une approche globale
Sur le plan pharmacologique, la spironolactone a reçu depuis peu une indication dans l’hirsutisme. La prescription de l’acétate de cyprotérone est strictement encadrée et réservée aux hirsutismes sévères, à la plus petite dose possible, après information de la patiente et une IRM s’assurant de l’absence de méningiome, et pour une durée maximale de cinq ans, avec, au-delà, une surveillance IRM tous les deux ans.
La metformine, quelque peu oubliée, est à nouveau mise en avant pour l’amélioration des paramètres métaboliques de ces patientes en surpoids ou obèses, qu’elles soient ou non diabétiques, mais elle est toujours hors AMM en France. Elle améliore un peu les autres symptômes endocrinologiques, mais moins bien que les traitements hormonaux.
Les inositols, médiateurs intra-cellulaires de l’action de l’insuline et susceptibles de modifier la réactivité hormonale, sont très à la mode, mais les preuves de leur efficacité sont limitées et non concluantes. Ces compléments alimentaires sont bien tolérés, mais très onéreux et ne répondent pas au même statut règlementaire en termes de dose et de qualité que les médicaments.
La chirurgie bariatrique a montré son efficacité, non seulement sur le plan métabolique mais aussi sur la restauration de la fonction ovulatoire, et le SOPK est reconnu comme une comorbidité permettant son indication.
L’aménorrhée expose au risque de cancer de l’endomètre du fait de l’hyperplasie endométriale ; aussi est-il nécessaire d’assurer au moins trois à quatre cycles par an, par la prescription de progestatifs séquentiels.
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