L’hépatite aiguë recouvre des tableaux cliniques et biologiques d’étiologies et de sévérités très différentes. Définie par une inflammation hépatique durant moins de 6 mois sur un foie antérieurement normal, elle peut être difficile à affirmer en l’absence d’antériorité. Pour pallier cette insuffisance, le niveau des transaminases est aussi pris en compte (cytolyse à plus de 10 fois la normale évocatrice). D’autre part, le tableau d’hépatite aiguë sur hépatite chronique a récemment été reconnu (1).
De multiples origines
Les causes d’hépatite aiguë sont nombreuses mais le plus souvent médicamenteuses et virales [2,3]. Le médicament le plus incriminé est le paracétamol, toxique en cas de surdosage mais aussi à des doses thérapeutiques chez des patients présentant certains facteurs de risque (jeûne, alimentation restreinte, vomissements …) [4]. Concernant les causes infectieuses, les hépatites virales A, B et E sont actuellement les plus fréquentes en France. Dans une moindre proportion, se rencontrent également les hépatites C, D, à herpès virus (cytomégalovirus, virus Epstein-Barr, herpès et varicelle-zona) et la toxoplasmose.
L’origine peut également être biliaire ou vasculaire (thrombose des veines sus-hépatiques dans le syndrome de Budd-Chiari, insuffisance cardiaque, foie hypoxémique dans un contexte d’hypovolémie). Les autres causes sont les hépatites auto-immunes, les rares maladies de Wilson, les infiltrations tumorales (majoritairement secondaires à un cancer du sein ou un lymphome), les intoxications (drogues, phytothérapie de plus en plus fréquemment, amanites phalloïdes) et les pathologies spécifiques de la grossesse (vomissements gravidiques au premier trimestre, stéatose aiguë gravidique, cholestase gravidique, prééclampsie et HELLP syndrome au troisième trimestre). Enfin, environ 10 % des hépatites aiguës restent inexpliquées.
Un diagnostic crucial
Les tableaux d’hépatite aiguë varient de l’hépatite biologique (complètement asymptomatique et rapidement régressive de façon spontanée) aux formes sévères. Il est indispensable de reconnaître les deux stades de gravité de cette pathologie (5-6). L’hépatite aiguë sévère, définie par un taux de prothrombine inférieur à 50 %, nécessite une hospitalisation en milieu spécialisé et une prise de contact avec un service de transplantation hépatique (à prévenir en cas d’aggravation du patient) et le début d’un traitement par N-acétylcystéine (7). Au moindre doute sur une infection à herpès ou varicelle-zona, il doit être débuté un traitement par aciclovir, qui pourra être arrêté si les dosages des virémies en PCR s’avèrent négatifs (6). L’hépatite aiguë grave ou fulminante, définie par la diminution du taux de prothrombine associé à l’apparition d’une encéphalopathie hépatique, est responsable d’une mortalité élevée en l’absence de transplantation hépatique rapide. Elle nécessite donc un transfert en urgence dans un service de transplantation hépatique (5-6).
Mener l’enquête
En première intention, le bilan étiologique doit comprendre une enquête minutieuse sur les prises de médicaments, de drogues et de phytothérapie. Il doit également prendre en compte les facteurs de risque viraux, l’existence d’un syndrome dépressif, une éventuelle grossesse, les comorbidités, les résultats de l’échographie couplée au doppler hépatique et des sérologies virales. En l’absence de sévérité, il peut être fait en deux étapes. Par contre, en cas d’hépatite grave, un bilan complet sera réalisé d’emblée en urgence.
Le traitement de l’hépatite aiguë dépend plus précisément de la cause et repose sur des mesures préventives aspécifiques dont l’objectif est d’éviter une aggravation. Il faut arrêter les médicaments hépatotoxiques, neurotropes (dont les antiémétiques), néphrotoxiques, tous ceux qui ne sont pas indispensables, toute prise d’alcool et de médecine alternative. Il convient aussi de maintenir l’équilibre hémodynamique et d’éviter les hypoglycémies (5-6).
En somme, devant une hépatite aiguë, il faut savoir reconnaître les stades de gravité et adapter la conduite à tenir, orienter rapidement le diagnostic en fonction du contexte et du bilan étiologique et éviter les facteurs aggravants la fonction hépatique. Cependant, le meilleur traitement reste la prévention : vaccination contre l’hépatite A et B, prescription de paracétamol et automédication prudentes, application des moyens préventifs utiles pour éviter la contamination sanguine et sexuelle des hépatites virales A, B et C.
(1) Moreau R et al. Gastroenterology. 2013 Jun;144(7):1426-37, 1437.
(2) EASL 2017 Clinical Practice Guidelines on the management of hepatitis B virus infection. J Hepatol. 2017 Aug;67(2):370-398
(3) Izopet J et al. Presse Med. 2015 Mar;44(3):328-32.
(4) EASL Clinical Practice Guidelines: Drug-induced liver injury. J Hepatol. 2019 Jun;70(6):1222-1261
(5) EASL Clinical Practical Guidelines on the management of acute (fulminant) liver failure. J Hepatol. 2017 May;66(5):1047-1081.
(6) Recommandations formalisées d’experts-Insuffisance hépatique en soins critiques-RFE commune SFAR – AFEF 2019.
(7) Hu J et al. Clin Res Hepatol Gastroenterol. 2015 Oct;39(5):594-9. 2.
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