Les fistules anastomotiques sont parmi les plus graves complications susceptibles d’apparaître au décours d’une résection et d’une anastomose du colon. Elles résultent généralement d’une mauvaise cicatrisation de la suture entre les deux parties du colon, et surviennent en général une semaine après l’opération. Selon les auteurs d’un article paru mercredi dans « Science Translational Medicine », les causes de ce type de complication sont encore mal connues. Le Dr Benjamin Shogan et ses collègues, de l’école de médecine Pritzker, de l’université de Chicago, ont élucidé une partie du mystère, en montrant que, chez le rat opéré, le risque de fistule était corrélé à la présence d’Enterococcus faecalis au niveau des cicatrices.
Au cours d’une série d’expériences, l’utilisation d’antibiotiques à usage topique, appliqués sur les tissus intestinaux des animaux, a permis de prévenir l’apparition de fistules anastomotiques. Ces dernières observations ne sont pas totalement nouvelles, puisqu’en 1955 deux chercheurs de la Nouvelle Orléans, Isidore Cohn et James Rides, étaient déjà parvenus au même résultat chez le chien. Ce qui est nouveau, par contre, c’est que les auteurs ont pu mettre le doigt sur le mécanisme incriminé.
Le rôle central des MMP9
Les auteurs notent une forte dégradation du collagène au niveau des cicatrices des rats souffrant de fistules anastomotiques et dont le colon était colonisé par des entérocoques. L’activité de dégradation du collagène était jusqu’à trois fois supérieure à celle observée chez les rats non infectés, ou chez qui l’on pratiquait une opération chirurgicale fictive. Par ailleurs, les métalloprotéases matricielles, MMP9, naturellement présentes dans l’intestin des animaux, étaient davantage activées chez les rats présentant des fistules anastomotiques.
Les MMP9 dégradent les composants de la matrice extra-cellulaire, ce qui gène la cicatrisation au même titre que la dégradation du collagène.
Dans leurs expériences, la suppression du MMP9 de l’animal a produit le même résultat que l’application topique d’antibiotiques : une prévention des fistules anastomotiques. En revanche, l’utilisation intraveineuse d’antibiotiques ne parvenait pas à éliminer la présence d’entérocoques et ne prévenait pas l’apparition de fistules anastomotiques.
Parmi les différentes souches d’Enterococcus faecalis retrouvées chez les rats, les auteurs montrent que seules celles porteuses des gènes gelE et sprE sont réellement capables de perturber la cicatrisation. L’association du produit de ces deux gènes active en effet le MMP9 en la clivant.
Premiers éléments de preuve chez l’homme
Afin de vérifier leur hypothèse chez l’homme, les auteurs ont effectué des prélèvements chez 11 patients traités par antibiothérapie injectable après une résection du colon suivi d’une anastomose. Les 11 patients avaient bénéficié d’une antibiothérapie en intraveineuse, conformément aux recommandations. Sur les 64 espèces de bactéries prélevées, seules deux, Pseudomonas aeruginosa et Enterococcus faecalis, dégradaient le collagène et activaient le MMP9. Une proportion importante des bactéries présentes chez l’ensemble des patients appartenaient à ces deux catégories. Chez un patient, elles constituaient un tiers des bactéries prélevées. Ce patient a par la suite été réadmis à l’hôpital suite à une occlusion intestinale, sans toutefois développer une fistule anastomotique. Les auteurs ont également constaté qu’une antibiothérapie par intraveineuse ne parvenait pas à débarrasser les patients des souches d’Enterococcus faecalis.
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