LA PERTE de la capacité à différer une défécation jusqu’à un moment socialement acceptable est l’un des nombreux symptômes de l’incontinence fécale ; les autres symptômes sont l’émission involontaire de gaz, la perte de petites quantités de selles liquides, la perte de selles solides, voire celle de tout le bol fécal.
La prévalence de l’incontinence fécale est la même chez l’homme et chez la femme, allant de 2,6 % chez les sujets de 20 à 30 ans à 15,3 % chez les plus de 70 ans.
La cause de l’incontinence fécale est multifactorielle et pas totalement comprise.
On distingue deux types d’incontinence clinique : l’incontinence passive et l’incontinence d’urgence. L’incontinence passive (par exemple, émissions sans s’en rendre compte) est liée à une faible pression anale de repos avec déficit sphinctérien interne. L’incontinence d’urgence (par exemple, incapacité à différer une urgence à déféquer) est souvent attribuée à une insuffisance du tonus et de l’activité du sphincter externe.
Le traitement dépend de la cause présumée et de la sévérité du problème. Chez les patients qui ont un sphincter intact, le traitement initial est en règle générale conservateur, avec modifications diététiques, médicaments provoquant une constipation et rééducation sphinctérienne. Quand ces traitements ne donnent pas de résultats satisfaisants, on envisage une solution chirurgicale, incluant la réparation sphinctérienne antérieure ou postérieure, la stimulation nerveuse sacrée ou le remplacement sphinctérien (sphincter artificiel, graciloplastie stimulée). Mais tous ces traitements ont leur revers : perte d’efficacité avec le temps, haute morbidité... En cas d’échec du traitement, la seule alternative est la colostomie.
L’exemple des procédures urologiques.
Une option, décrite pour la première fois en 1993, est l’injection d’un biomatériau destiné à « augmenter » le sphincter anal, améliorant ainsi la continence fécale. Cette augmentation consiste à accroître le volume tissulaire à la partie proximale interne du complexe sphinctérien cylindrique. Différentes substances ont été évaluées, avec des résultats différents. Depuis des années, le NASHA Dx (dextranomère dans de l’acide hyaluronique stabilisé) a été utilisé comme agent volumateur dans des procédures urologiques avec de bons résultats et peu d’effets secondaires. Lors d’une étude pilote dans l’incontinence fécale, le nombre d’épisodes d’incontinence par semaine a diminué de 22 à 10 au bout d’un an, sans effet secondaire sérieux.
Cela, dit, aucune étude randomisée n’a encore été effectuée. C’est dire l’intérêt d’une étude publiée dans le «Lancet», destinée à évaluer l’efficacité et la sécurité d’injections de NASHA Dx dans la sous-muqueuse du sphincter anal chez les patients présentant une incontinence fécale.
Ce nouveau travail, international, multicentrique, randomisé, en double aveugle contrôlé par une injection fantôme, a été conduit dans 8 centres américains et 5 centres européens.
Les patients, âgés de 18 à 75 ans, présentaient un score d’incontinence CCFIS de 10 ou davantage, avaient eu au moins 4 épisodes d’incontinence dans les deux semaines précédentes, présentaient des symptômes depuis au moins 12 mois, n’avaient pas répondu au traitement conservateur. Les patients qui ne présentaient qu’une incontinence pour les gaz étaient exclus. Les femmes en âge de procréer devaient suivre une contraception efficace.
Sous anuscopie dans chaque quadrant de la sous-muqueuse.
Les injections de NASHA Dx étaient réalisées en externe après un lavement : 1 ml de NASHA Dx était injecté sous anuscopie dans chaque quadrant de la sous-muqueuse, 5 m au-dessus de la ligne dentée. Au bout d’un mois, tous les patients présentant encore un score CCFIS à 10 ou plus se voyaient proposer une deuxième procédure.
Au total, 206 patients ont été inclus ; 136 ont reçu le NASHA Dx et 70 l’injection fantôme. Parmi les 136 patients du groupe NASHA Dx, 70 (52 %) ont présenté une réduction de 50 % ou plus du nombre d’épisodes d’incontinence, comparés à 22 des 70 patients (31 %) qui ont reçu l’injection fantôme. Ont été enregistrés 128 effets adverses, dont 2 graves (1 abcès rectal et 1 abcès prostatique).
« L’injection anale de NASHA Dx est un traitement efficace de l’incontinence fécale. Un affinement des critères de sélection des patients, une optimisation des doses, la définition du site idéal d’injection et les résultats à long terme pourraient accroître l’acceptation de ce traitement mini-invasif », concluent les auteurs.
Wilhelm Graf et coll. Lancet du 19 mars 2011, pp. 998-1003.
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