LE QUOTIDIEN : Comment la ribavirine est-elle devenue un candidat dans l’indication de l’hépatite E chez les patients greffés ?
C’était assez intuitif. En 2008, nous avions montré que les cas d’hépatites E chez les patients transplantés évoluaient très rapidement vers la fibrose, avec 10 % de cirrhoses chez les patients non traités. Il a donc fallu tenter des choses : dans 40 % des cas, l’hépatite disparaît d’elle-même. Sur les 60 % qui restent, et qui sont donc des hépatites chroniques, on parvient à éradiquer le virus en réduisant l’immunosuppression dans un tiers des cas. Nous avons testé les interférons avec succès sur les deux autres tiers, mais ces derniers sont contre-indiqués chez les greffés du cœur, du poumon et du rein. Il fallait trouver encore autre chose, donc pourquoi pas la ribavirine qui avait fonctionné en monothérapie chez quelques patients greffés du rein et immunodéprimés.
Que va-t-il se passer maintenant ? Peut-on espérer une extension d’AMM ?
Nous ne pourrons pas faire d’étude comparative entre la ribavirine et l’absence de traitement qui comporte trop de risque pour les patients. Nous allons cependant faire des essais pour trouver quelle pourrait être la dose optimale et la durée de traitement la plus appropriée. Nous voudrions notamment savoir si l’on obtient aussi des bons résultats avec un traitement de moins de 3 mois. Les laboratoires risquent de ne pas mettre beaucoup d’argent dans une demande d’extension d’AMM pour deux raisons. La première est qu’il s’agit d’une vieille molécule. La seconde est que l’hépatite E est sous-diagnostiquée chez ces patients. Il n’y a, par exemple, pas de test standardisé aux États-Unis. On espère que nos résultats vont pousser à considérer une extension de l’AMM.
L’hépatite E a bénéficié de moins d’intérêt que les autres formes d’hépatite, pensez-vous qu’il y ait des efforts à faire ?
On sait que la transmission de l’hépatite E par la transfusion sanguine est importante et que le virus n’y est pas recherché. Il y a aussi quelques rares cas de transmissions par l’organe greffé. Ce serait sans doute une bonne chose que l’on teste systématiquement la présence du virus dans ces deux cas de figure. L’autre domaine qui mérite que l’on s’y intéresse concerne les atteintes neurologiques des infections par le virus de l’hépatite E. Une étude néerlandaise sortie en janvier 2014 dans Neurology montrait que 5 % des syndromes de Guillain-Barre seraient associés à une infection aiguë par le HEV. Dans ce cadre-là, un test pourrait être proposé à chaque fois qu’un diagnostic de ce syndrome est posé et, en cas d’infection, la ribavirine pourrait être utilisée pour traiter la phase aiguë et réduire ses conséquences neurologiques.
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