Avec un tiers de la population mondiale ayant déjà été en contact avec le virus de l’hépatite E (VHE) et 2 millions de cas annuels en Europe, cette maladie est désormais la première cause d’hépatite aiguë virale en France (2 302 cas répertoriés en 2016, voir figure 1) [1]. Elle possède un virus à ARN non enveloppé décrit pour la première fois en 1983 (genre hepevirus, famille des hepeviridae), son génome viral ayant été cloné en 1990.
En France, des cas autochtones et sporadiques
Quatre génotypes ont été décrits chez l’homme avec des répartitions géographiques et des hôtes différents. Dans les pays en développement, l’hépatite E est une infection causée par les génotypes 1 ou 2 par voie féco-orale après ingestion d’eau contaminée. La population touchée est souvent jeune (15-30 ans) dans un contexte de grandes épidémies et la mortalité est de l’ordre de 0,4 % à 3 %.
La grande majorité des hépatites E observées en France et dans les pays industrialisés sont autochtones, sporadiques et surtout liées aux génotypes 3, mais également au 4. Ces hépatites touchent plutôt l’homme d’âge moyen (50-60 ans), sont caractérisées par une mortalité plus élevée et par la survenue de formes chroniques chez certains immunodéprimés (patients transplantés, sous chimiothérapie, etc.). Si la transmission se fait par l’intermédiaire d’un réservoir animal (porc, gibier…), elle est également possible par voie parentérale mais très rare (1/2 200 donneur de sang virémique avéré). Actuellement, le dépistage du VHE n’est réalisé que sur des plasmas destinés à des patients à haut risque.
De nombreuses formes asymptomatiques
Absorbé par voie digestive, le VHE se réplique au niveau intestinal puis gagne le foie par la veine porte. Il se multiplie alors dans le cytoplasme des hépatocytes et des cellules épithéliales biliaires. Les virions sont ensuite rejetés dans les canalicules biliaires et éliminés dans les selles. Cette excrétion fécale débute 4 à 6 jours avant l’apparition de l’ictère, diminue rapidement puis disparaît en 2 à 3 semaines. La virémie est quant à elle mise en évidence dès le début des symptômes et persiste quelques jours à quelques semaines. La cytolyse hépatique correspond à une réaction immune de l’hôte contre le virus. La période d’incubation est de 15 à 60 jours. [2,3]
Les formes asymptomatiques sont très largement majoritaires, comme en témoigne la séroprévalence chez les donneurs de sang en France aux alentours de 22 % (pouvant atteindre 86 % en Ariège) [4,5]. Lorsqu’elle est symptomatique, on retrouve une asthénie dans 85 % des cas et un ictère dans 43 % des cas. La cytolyse est alors marquée (> 5N).
Si des signes neurologiques existent dans 23 % des cas, les atteintes sont variées [6]. Les plus fréquentes sont le syndrome de Parsonage Turner, le syndrome de Guillain Barré, les mono ou multinévrites, et les méningites ou méningo-encéphalites. Le VHE a donc un tropisme neurologique particulier que n’ont pas les autres virus hépatotropes. Le bilan hépatique est souvent dans ce cas peu perturbé voire normal.
Détecter les IgM anti-VHE
Le diagnostic de l’hépatite aiguë E repose sur la détection des anticorps anti-VHE de type IgM et/ou la mise en évidence directe du virus dans le sang ou dans les selles par PCR. Chez le patient immunocompétent, la sérologie suffit pour établir le diagnostic (présence d’IgM anti-VHE). Il n’y a jamais de forme chronique chez le patient immunocompétent.
Chez le patient immunodéprimé, l’infection par le VHE est pauci-symptomatique et la cytolyse est minime (< 5N). Il peut exister dans ce contexte particulier des formes chroniques. Le diagnostic repose sur une analyse moléculaire (PCR) avec recherche de l’ARN du VHE dans le sang ou dans les selles.
CHU de Toulouse
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