LA THROMBASTHÉNIE de Glanzmann est une affection héréditaire de la coagulation qui est très rare (1/1 million d’individus dans le monde), mais pour laquelle il n’existe aucun traitement satisfaisant, qu’il s’agisse des transfusions ou des agents hémostatiques, limités par le développement fréquent d’anticorps antiplaquettaires, ou bien de la greffe de moelle, qui reste controversée. L’intégrine αIIbß3 (ou complexe glycoprotéique GPIIb-IIIa) est un récepteur du fibrinogène (facteur I) essentiel à l’agrégation des plaquettes entre elles par l’intermédiaire du facteur I. Sa déficience induit des troubles de la coagulation à divers degrés, en particulier, un purpura et des saignements des muqueuses dont le plus sérieux est l’hémorragie gastro-intestinale.
L’étude actuelle des chercheurs du Medical College of Wisconsin fait suite à leurs travaux antérieurs qui avaient montré, dans un premier temps, la faisabilité de la synthèse du complexe αIIbß3 après transfection de cellules souches sanguines périphériques par un oncorétrovirus encodant l’intégrine, et ensuite la possibilité de corriger (en utilisant un lentivecteur) la fonction plaquettaire, dans un modèle murin de la GT. Les Américains, pour confirmer ces résultats encourageants sur un modèle animal plus proche de l’homme, ont utilisé des chiens Grande-Pyrénées atteints de GT.
Un lentivirus autoinactivé.
Le vecteur viral employé est un lentivirus VIH-1 auto-inactivé par élimination d’un promoteur U3 du LTR (long terminal repeat) viral, et ciblé pour la transcription dans les mégacaryocytes (soit les cellules de la moelle productrices des plaquettes sanguines). Préalablement à la transfection virale, deux animaux (B et C) ont été conditionnés par l’administration d’une dose faible (100 cGy) de rayonnements, un autre par une dose de 300 cGy (chien D) et le quatrième (A) par 4 mg/kg de busulfan.
La transduction du gène de l’intégrine αIIbß3 chez les animaux a nécessité une procédure d’enrichissement des PBC modifiées génétiquement, ce qui a permis l’obtention d’un taux d’expression de αIIbß3 par les plaquettes de 30 à 40 %, qui s’est stabilisé à environ 10 % de la population plaquettaire chez les chiens A, B et C à 2, 4 et 5 ans, respectivement, témoignant d’une prise de greffe à long terme.
L’équipe de David Wilcox met en évidence, chez les trois chiens, une capacité d’agrégation plaquettaire après activation des plaquettes par des agonistes. Ils montrent également une amélioration de l’adhésion des cellules sanguines au fibrinogène. Une des caractéristiques de la GT humaine est l’incapacité de rétraction du caillot de fibrine (fibrinolyse) par les plaquettes des patients. Les chercheurs observent, chez les chiens A, B et C, une optimisation de la fibrinolyse par rapport à des contrôles déficients en αIIbß3.
Sur le plan clinique, le taux de transduction de 10 % s’avère suffisant pour s’opposer aux saignements de la muqueuse buccale en raccourcissant les temps de coagulation, ramenés de 20 minutes (chez les animaux atteints de GT) à 9, 7 et 5 minutes, respectivement, chez les chiens A, B et C. En outre, on note une réduction significative et remarquable (d’environ 135 %) des volumes de sang perdu. Les ecchymoses sont elles aussi minorées chez les chiens traités. Ces résultats indiquent, en d’autres mots, que la thérapie génique a réussi à corriger le phénotype de la maladie, parallèlement aux améliorations biologiques de la fonction plaquettaire.
Un des chiens (B) a présenté une réponse anticorps anti-αIIbß3 inattendue. Les conséquences de cet incident ont, heureusement, pu être minimisées par les immuno-suppresseurs (prednisone, cyclosporine et immunoglobulines intra-veineuses), mais cette complication justifie une clarification. Il n’en reste pas moins que les résultats de cette thérapie génique sont extrêmement encourageants étant donné l’étendue des améliorations, biologiques et cliniques, observées, avec un recul qui va jusqu’à cinq ans, en dépit d’un taux relativement bas (10 %) de plaquettes génétiquement modifiées. Cette longue période de suivi a également permis aux chercheurs de vérifier la sécurité oncogénique du traitement.
J Fang, DA Wilcox et coll. Platelet gene therapy improves hemostatic function for integrin αIIbß3-deficient dogs. Proc Natl Acad Sci USA (2011) Publié en ligne.
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