On a tendance à penser que seule la médecine est capable de prendre en charge l'Aide à la procréation médicale assistée. C'est faire fi de la diminution du désir dans le couple, du sentiment de perte de virilité pour les hommes et d'une certaine impatience des femmes. D'où l'intérêt d'un espace d'écoute pour les couples infertiles.
L'infertilité chez l'homme inquiète de plus en plus la communauté scientifique qui l'aborde sans tabou. Au contraire des patients qui en parlent difficilement et l'assimilent à une perte de puissance, une perte de virilité. Certes l'Aide à la procréation assistée représente une des révolutions des dernières décennies, mais les hommes sont généralement plus réticents que les femmes à entrer dans ce programme. Il peut se passer 2 à 3 ans avant que certains couples entament un processus de traitement.
Ne pas pouvoir s'inscrire dans le trans-générationnel, dans un relais de filiation, est souvent très mal vécu par les hommes. Pascale Poulain* rapporte l'exemple d'un jeune homme dont la mère mise au courant de son infertilité lui avait déclaré : « Tu n'es pas digne de porter le nom de la famille. » La honte d'ébranler le maintien de la lignée est source de non-communication et de surcroît de souffrance.
Quant à l'attitude des femmes vis à vis de l'infertilité du partenaire, elles sont d'abord dans la surprotection puis, quand le parcours s'alourdit, elles peuvent manifester une forme d'impatience, voire de colère dépendante de la motivation du désir d'enfant.
Afin d'évaluer l'intérêt d'un espace d'écoute sexologique pour les couples infertiles, des questionnaires, élaborés par les équipes du Havre et de Bicêtre ont été distribués au centre d'AMP et en consultation d'urologie andrologie de l'hôpital du Havre. Dix couples infertiles entre 24 et 38 ans y ont participé. Était relevée la prépondérance de l'infertilité masculine, certaines infertilités étant mixtes.
Des relations « chosifiées »
Les premiers entretiens se sont tenus avec les deux partenaires du couple et étaient non directifs. Puis, une autre série d'entretiens s'est déroulée en séparant les hommes des femmes. Les questions posées étaient identiques. Et la parole s'est libérée !
Le trouble sexuel prédominant lors de ces entretiens fut la baisse du désir avec la sensation d'avoir une relation sexuelle « chosifiée » par le parcours médical avec perte de l'hédonisme. Certains éprouvaient une baisse de l'élan pour le(la) partenaire, les relations sexuelles étant sous-tendues par le désir parfois obsessionnel d'enfant. Les relations extraconjugales, quand elles existaient, avaient une vertu de réassurance car hors prise en charge médicale et représentaient une tentative de rester en vie dans ce parcours qui peut parfois devenir mortifère.
Les plus grandes difficultés furent retrouvées au moment de l'annonce, à la pratique de certains examens (prélèvement de sperme par masturbation) et lorsque le parcours fut long et parsemé d'échecs.
Les patients ont apprécié cet espace « d'écoute sexologique » en regrettant que cela ne soit pas proposé de façon systématique. Il semble essentiel dans ce domaine qui concerne la sexualité, de ne pas séparer l'organique du psychologique. Dans le centre d'AMP du Havre, les couples ont désormais la possibilité de rencontrer une psychologue et la sexologue de l'hôpital. Mais le plus souvent, ce sont les femmes qui consultent. Beaucoup de travail et d'énergie sont encore nécessaires pour combattre les tabous et faire évoluer les mentalités.
* Entretien avec Pascale Poulain, sexologue-clinicienne. DIU sexualité humaine.
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