LE RISQUE CARDIOVASCULAIRE des pilules n’a rien de nouveau puisqu’il est connu depuis les années 1960. En outre, ce risque a été divisé par vingt depuis cette époque ! Ce qui est donc curieux, c’est plutôt cette agitation médiatique qui surgit aujourd’hui, alors que les pilules actuelles sont nettement mieux tolérées que les pilules antérieures.
Un rapport bénéfice sur risque positif, incontestablement.
Sur le plan contraceptif, le rapport bénéfice/risque des pilules est positif, il n’y a aucun doute possible là-dessus. « Concernant le risque thromboembolique, il est naturellement de deux cas pour 10 000 femmes et passe à 4 cas pour 10 000 femmes lorsque ces dernières sont sous pilule. Ces accidents restent donc peu fréquents et surtout, le risque de mortalité inhérent à ces accidents, est très faible. Concernant le risque artériel, il est dix fois plus faible que le risque veineux, mais proportionnellement, la mortalité est plus élevée, surtout en présence d’autres facteurs de risque cardiovasculaire. À noter par ailleurs que la grossesse est également à l’origine du décès d’une femme pour 10 000 et que l’interruption volontaire de grossesse n’est pas non plus dénuée de risque. Il faut donc savoir raison garder : par exemple, chaque année, le tabac tue 15 000 femmes et n’apporte aucun bénéfice. La pilule tue 12 femmes par an, mais offre un moyen de maîtriser sa fertilité à des millions de couples et diminue très fortement les cancers de l’ovaire et aussi de l’endomètre et du côlon », insiste le Dr Christian Jamin.
Le surrisque des pilules de dernières générations remis en cause ?
Depuis 1995, des doutes existent sur un éventuel surrisque thromboembolique des pilules de dernières générations par rapport à celles de 2e génération. Samuel Shapiro, épidémiologiste de renommée mondiale a cependant encore ce mois-ci, remis ce surrisque en cause. En 2007, dans ses recommandations, la Haute Autorité de santé estimait pour sa part que le surrisque restait faible, ne remettant pas en cause le rapport bénéfice sur risque de ces pilules qui devaient être prescrites en seconde intention. Elles ont d’ailleurs obtenu d’être remboursées en 2009. Or, il n’y a rien eu de nouveau depuis.
«La décision récente de dérembourser ces pilules de 3e génération pour des raisons politico-économiques a eu des conséquences en chaîne : en effet, dans notre pays, seuls les médicaments dangereux ou inefficaces sont habituellement déremboursés. Comme l’efficacité des pilules ne peut être remise en cause, on a laissé entendre aux patientes qu’elles pouvaient être dangereuses, ce qui a généré les problèmes médico-légaux que l’on connaît. Il aurait été beaucoup plus utile de dire aux patientes de suivre les recommandations de la HAS : une pilule de 2e génération en première intention et seulement si elle n’est pas bien tolérée, une pilule de 3e ou de 4e génération en deuxième intention, l’essentiel étant de trouver une pilule avec laquelle elles se sentent bien, insiste le Dr Jamin. L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a par ailleurs établi une classification pour le moins fantaisiste des pilules, en mêlant dans la 4e génération, des pilules à l’estradiol (œstrogène naturel) comme Zoely et Qlaira et dont l’objectif est justement d’abaisser le risque thromboembolique, avec les autres pilules de 4e génération qui présentent effectivement un surrisque éventuel (cf. ANSM – Contraceptifs oraux commercialisés en France au 1er janvier 2013 www.ansm.sante.fr, version 11/02/2013). Il reste donc à souhaiter que l’Europe vienne remettre de l’ordre là-dedans et apporte enfin la sérénité nécessaire à ce dossier ».
Finalement, lorsque les femmes viennent au cabinet médical pour rediscuter de leur pilule, le problème est simple. « Il faut leur demander pourquoi elles ont eu une prescription de pilule de 3e ou de 4e génération. Si c’est par simple habitude du prescripteur, il vaut mieux revenir à une pilule de 2e génération. Mais si c’est parce qu’elles ne supportaient pas une pilule de 2e génération, alors, il n’y a pas lieu de changer cette contraception bien tolérée », conclut le Dr Jamin.
D’après un entretien avec le Dr Christian Jamin, Paris.
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