LA FRANCE atteint aujourd’hui des « points de rupture inégalés » en matière d’accès à l’IRM. Tel est le constat de la nouvelle enquête, réalisée pour l’année 2012, par l’association Imagerie Santé Avenir (ISA) (1) sur les délais d’attente pour cet examen. Une enquête qui confirme l’aggravation d’inégalités régionales en France et une « rupture totale » avec l’Europe. « Comment notre pays qui a mis en œuvre des Plans de santé publique qui semblaient ambitieux, en cancérologie, en neurologie par exemple, peut-il s’éloigner autant des objectifs fixés lorsqu’il s’agit de l’accès aux techniques modernes d’imagerie ? Comment peut-il tolérer de telles inégalités régionales en termes d’accès aux soins ? », s’interroge ISA.
Conduite pour la neuvième année consécutive, l’enquête Cemka-Eval pour ISA repose sur une méthodologie bien rôdée : cette étude 2012 a été menée auprès de 551 structures différentes en France. Au final, l’étude porte sur les données de 535 structures. L’enquête a consisté, comme les années précédentes, à simuler une fausse prise de rendez-vous par téléphone. La situation clinique présentée était la même que celle utilisée, chaque année, depuis 2003 : le rendez-vous était réclamé par la fille d’un patient disposant d’une ordonnance pour une IRM lombaire à réaliser « en urgence » dans le cadre d’une recherche d’extension d’un cancer.
Cette enquête 2012 affiche, au final, une très légère diminution du temps moyen d’attente, soit 29,1 jours, un niveau identique à celui de 2005.
Aggravation des inégalités régionales.
Un des principaux enseignements de l’étude est l’aggravation des inégalités régionales qu’il s’agisse des délais d’attente auxquels doit faire face la population ou de la densité de machines IRM/million d’habitants. « Ces inégalités régionales s’aggravent d’autant plus que deux dynamiques s’opposent et creusent les écarts : celle des régions qui font des efforts d’équipement depuis plusieurs années, réguliers ou plus soudainement et récemment, et la dynamique d’autres régions attentistes qui voient leurs délais s’allonger ou stagner comme leur parc IRM », souligne Imagerie Santé Avenir.
Comme l’an passé, la corrélation entre le taux d’équipement par million d’habitants et les délais d’attente est clairement établie dans cette étude 2012. « En Aquitaine, par exemple, l’augmentation régulière du parc tous les ans se traduit par une chute des délais de 10 jours. La région Poitou-Charentes qui a augmenté son parc d’IRM de 40 % en 2 ans, a réduit ses délais d’attente de 19 jours. En revanche, des régions « attentistes » comme les Pays de la Loire, pourtant 4e région en termes de population, mais aussi la Bretagne, la Basse-Normandie, le Limousin et la Corse, atteignent un délai moyen d’attente supérieur à 50 jours », souligne ISA.
Pour l’association, l’étude confirme le « décalage permanent » entre les effets d’annonces et les réalités du terrain. Aujourd’hui, on recense 618 appareils disponibles sur le territoire, soit 26 de plus qu’en 2011. « Alors que les Plans de santé publique (cancer, AVC, Alzheimer), les autorités sanitaires et de protection comme l’Autorité de Sûreté Nucléaire, affichent régulièrement des objectifs de rattrapage du retard français en équipements IRM, la progression des nouvelles installations a chuté en 2011, à 4,4 % contre 9 % en 2010. Il s’agit du pourcentage le plus bas depuis 2003 », constate ISA, en rappelant que le Plan Cancer 2 (2009-2013) fixait l’objectif national à 10 IRM/million d’habitants en 2011. Or, aujourd’hui, 4 régions seulement comptent plus de 10 IRM/million d’habitants tandis que 3 régions restent en dessous de 7 IRM/million d’habitants. « La moyenne nationale reste en dessous de la barre des 10 avec cette année 9,8 IRM/million d’habitants (…). Le Plan Cancer 2 ajoutait que dans 10 régions jugées prioritaires, en raison de la mortalité par cancer plus élevée, le taux d’équipement devait atteindre 12 IRM/million d’habitants en 2013 ; 3 régions sur 10 seulement à risque élevé sur le plan oncologique, ont atteint l’objectif fixé », souligne ISA.
Autre constat : la France a atteint une « situation de rupture » jamais atteinte avec l’Europe. Si notre pays compte en moyenne 9,8 IRM/million d’habitants, l’Europe de l’ouest atteint cette année 19,5 IRM/million d’habitants, soit un parc d’IRM accessible deux fois plus important.
Pour ISA, au-delà de la question des délais d’attente, le problème, aujourd’hui, est celui de l’accès à des soins de qualité, de la permanence des soins sur tout le territoire, et de l’égalité d’accès à l’innovation et de respect des bonnes pratiques. « Pour atteindre ces objectifs, il faudrait un plan massif de rattrapage. C’est possible avec une vraie volonté politique comme l’a démontré dans le passé le plan exceptionnel d’installations nouvelles accordé entre 2002 et 2004. Au lieu de quoi, aujourd’hui, on gèle les installations pendant un an du fait d’un SROS 4 mis en place avec une année de retard », dénonce ISA. L’association estime, en conclusion, qu’il faudrait atteindre le chiffre de 1 260 IRM en France pour rejoindre la moyenne européenne du nombre d’IRM/million d’habitants. « Un programme urgent de 400 IRM supplémentaires permettrait de réduire considérablement les délais d’attente et de se rapprocher des objectifs du plan cancer », ajoute l’association.
(1) Imagerie Santé Avenir est une association Loi 1901 qui réunit des professionnels de l’imagerie médicale, responsables d’une industrie de santé et acteurs de l’offre de soins pour mener une réflexion conjointe sur l’imagerie médicale française.
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