Traitement du cancer du poumon non à petite cellule ALK+

L’autorisation temporaire d’utilisation du céritinib livre des premières données en vie réelle

Publié le 05/11/2015
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Crédit photo : PHANIE

Commercialisé par Novartis, le céritinib (Zykadia) est arrivé sur le marché français début septembre. Cette molécule est indiquée chez les patients atteints d’un cancer du poumon non à petite cellule non opérable, dont la tumeur présente une mutation du gène ALK+ (environ, 3,5 % des patients). « Le céritinib doit répondre à un besoin simple : que faire des patients atteints d’un cancer bronchique ALK+ chez qui le crizotinib – la première thérapie ciblant ce groupe de patient – ne fonctionne plus », explique le Dr Tony Mok, lors d’un symposium organisé lors du dernier congrès européen de cancérologie, ECC 2015, qui s’est tenu à Vienne du 25 au 29 septembre.

Le céritinib dispose en effet d’une meilleure configuration que le crizotinib, capable de se fixer plus efficacement sur les récepteurs ALK des cellules tumorales, y compris celles chez qui une nouvelle mutation empêche l’accroche du crizotinib. « Ce genre de mutation intervient chez environ un tiers des patients sous crizotinib », explique le Pr Alexis Cortot, du service de pneumologie et d’oncologie thoracique du CHRU de Lille, également présent à l’ECC 2015 pour présenter les données de l’autorisation temporaire d’utilisation (ATU) du céritinib en France.

Un taux de contrôle de la maladie de 73 %

En tout, 213 patients ont été inclus dans l’ATU avec des durées de traitement de l’ordre de 7 mois. « Les durées de survie sans progression ne sont pas encore disponibles, car la pathologie n’avait pas recommencé à progresser chez un grand nombre de patients, explique le Pr Cortot, nous ne pouvons donner que les durées de traitement. » En théorie, la durée de traitement et la durée de survie sans progression doivent coïncider, mais dans la pratique, certains patients ont vu leur traitement se poursuivre malgré une reprise de la progression radiologique, en raison de bénéfices cliniques.

Le taux de réponse au traitement etait de 53 % et le taux de contrôle de la maladie de 73 %. « Il faudra réanalyser les données, la durée de traitement médiane sera sans doute plus longue », pronostique le Pr Cortot.

Enfin, la moitié des patients avaient des métastases cérébrales lors du début du traitement. Ces patients avaient la même durée de traitement que les autres. À l’avenir, les chercheurs aimeraient d’ailleurs connaître l’impact du traitement sur le risque de développement des métastases, car le céritinib est supposé franchir plus facilement la barrière hémato-encéphalique.

Évaluation en premier intention

Côté effets secondaires, au cours des études précédentes, environ 10 % des patients avaient dû arrêter le traitement à cause des effets indésirables. Ce ne fut le cas que de 7 % de ceux inclus dans l’ATU. « Il y a une toxicité digestive à laquelle il faut être très vigilant », prévient le Pr Cortot.

Des essais sont d’ores et déjà en cours pour évaluer l’intérêt du céritinib en première intention pour les patients ALK+. « Le crizotinib a une efficacité de 11 mois, et le céritinib a une efficacité qui se situera vraisemblablement entre 7 et 10 mois après un premier traitement au crizotinib, détaille le Pr Cortot, il faudrait que le céritinib ait d’emblée une efficacité d’une vingtaine de mois pour être une alternative crédible à la séquence crizotinib puis céritinib. »

Quant à savoir comment ces thérapies ciblées se positionnent par rapport à l’immunothérapie, le Pr Cortot estime que « notre expérience de l’immunothérapie nous vient surtout du nivolumab. Dans les résultats de sous-groupe de l’étude qui a montré sa supériorité sur la chimiothérapie, le sous-groupe qui semblait le moins bénéficier du nivolumab était le groupe des non-fumeurs chez qui il y a beaucoup de mutations FGFR et quelques patients ALK+. Il est difficile de conclure pour l’instant. »

Damien Coulomb

Source : Le Quotidien du Médecin: 9447