DE NOTRE CORRESPONDANTE
LA DENGUE ou « grippe tropicale » est l’arbovirose la plus répandue dans le monde, affectant environ 100 millions de personnes chaque année. Due a un flavivirus transmis par la piqûre d’un moustique infecté, cette infection est le plus souvent bénigne - sans symptômes ou se manifestant par un état fébrile pseudo-grippal ; toutefois elle peut être à l’origine de formes sévères potentiellement fatales, à savoir la dengue hémorragique et la dengue avec choc.
Il n’existe aucun vaccin et traitement antiviral spécifique. Le traitement des formes sévères se limite à restaurer le volume de fluide circulatoire. D’où le besoin urgent de nouvelles options thérapeutiques.
Il existe 4 sérotypes du virus de la dengue (DENV 1 à DENV4) ; l’infection par l’un d’entre eux confère une immunité à vie envers ce sérotype mais n’offre qu’une brève protection contre les 3 autres sérotypes. L’immunité est médiée par des anticorps spécifiques du sérotype, mais leur mecanisme d’action reste incertain.
Pour développer des interventions préventives et thérapeutiques, l’identification des déterminants protecteurs est essentielle ; c’est ce que viennent d’accomplir Teoh et coll.
Ces chercheurs ont isolé un anticorps neutralisant chez un patient rétabli d’une dengue de sérotype 1 (DENV1) et l’ont caractérisé ; cet anticorps (HM14c10) se lie spécifiquement au DENV1.
Ils montrent que cet anticorps agit en bloquant la fixation du virus sur les cellules hôtes cibles ; à des concentrations plus élevées, l’anticorps peut aussi inhiber une étape postérieure à l’attachement du virus.
« Nous montrons que cet anticorps est extrêmement spécifique du sérotype et que son site de fixation sur le virus est une structure tridimensionnelle composée de 2 protéines d’enveloppe adjacentes à la surface du virus », explique au « Quotidien » le Dr Paul MacAry, qui a co-dirigé ces travaux avec le Dr Shee-Mei Lok, à l’Université Nationale de Singapour.
Efficacité remarquable.
« Nous montrons aussi que cet anticorps humain possède une remarquable efficacité in vivo (dans des modèles murins), réduisant de 50 000 fois la virémie dans les deux heures suivant l’administration. Pour placer ces résultats dans leur contexte, il faut savoir que les programmes de dépistage médicamenteux pour la dengue conduits par Novartis, Roche et le NIH, considèrent un bon candidat comme un composé qui réduit par 10 fois les taux du virus de la dengue après 2 à 3 jours, a des concentrations micromolaires. Cela signifie que notre anticorps est au moins 1 million de fois supérieur à la meilleure petite molécule candidate qui est actuellement en développement. »
« Enfin, étant donné que cet anticorps humain dérive d’un patient rétabli, ces résultats signifient que nous avons défini " l’essence " de l’immunité naturelle contre le virus de la dengue. Cela a des répercussions importantes pour le développement et l’évaluation de nouveaux vaccins contre la dengue. »
« La principale implication clinique est que cet anticorps a le potentiel d’éliminer, peu après son administration, le virus de la dengue chez les patients infectés. L’espoir est qu’en éliminant le virus, nous aurons un effet sur la progression de la maladie. Ce sera particulièrement important pour les 50 000 à 100 000 enfants qui meurent de la dengue chaque année. »
« Le développement clinique de cet anticorps devrait être relativement simple. Puisqu’il est déjà complètement humain, il ne requiert aucune manipulation ou modification. Il nous faudra produire l’anticorps conformément aux normes BPF (bonnes pratiques de fabrication) et conduire des tests de toxicité dans les 2 à 3 mois ; nous prévoyons de lui faire franchir l’étape des essais cliniques de phase I à IIB à Singapour dans les douze à dix-huit prochains mois. »
« Notre prochain objectif est d’achever le développement de nos anticorps supplémentaires qui ciblent les 3 autres sérotypes, de façon à ce que nous ayons une couverture complète de cette maladie. Cela devrait être terminé dans les 12 prochains mois. »
Teoh et coll., Science Translational Medicine, 20 juin 2012.
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024