Face aux flambées de dengue dans les Outre-mer, la Haute Autorité de santé (HAS) recommande de vacciner dans ces territoires (Antilles, Guyane, Mayotte et La Réunion) les enfants âgés de 6 à 16 ans présentant un antécédent d’infection par la dengue ainsi que les adultes de 17 à 60 ans présentant des comorbidités, avec ou sans antécédent. Ceci, avec le nouveau vaccin Qdenga commercialisé par le laboratoire Takeda.
Transmise par les moustiques du genre Aedes, la dengue est asymptomatique dans 50 à 90 % des cas. Quand elle est symptomatique, elle se manifeste par une forte fièvre, des maux de tête, des nausées ou encore des douleurs articulaires et musculaires et une éruption cutanée. Dans moins de 5 % des cas, la maladie évolue vers une forme sévère et peut conduire à mettre en jeu le pronostic vital. La grossesse peut augmenter le risque de forme grave, mais aussi certaines pathologies telles que l’immunodépression ou des maladies chroniques (drépanocytose, diabète, hypertension artérielle compliquée, insuffisance rénale, affections cardio-pulmonaires chroniques…), rappelle la HAS dans son avis publié ce 17 décembre.
Il existe quatre sérotypes différents du virus de la dengue : DENV-1, 2, 3 et 4. Lorsqu’un individu est infecté par l’un d’entre eux pour la première fois, il est généralement immunisé à vie contre ce sérotype, mais pas contre les autres. Pire, une infection ultérieure par un autre sérotype viral augmente le risque de complications ; les anticorps (dits facilitants) ne neutralisent pas le virus, mais facilitent au contraire son entrée et sa réplication dans les cellules immunitaires.
Deux doses de vaccin espacées de 3 mois
Le vaccin Qdenga, commercialisé par le laboratoire Takeda, a obtenu une autorisation de mise sur le marché européenne en décembre 2022, pour la prévention de la dengue chez les personnes âgées de 4 ans et plus. Le ministère chargé de la Santé a saisi la HAS afin qu’elle se prononce sur l’utilisation de ce vaccin vivant atténué, recombinant, et quadrivalent.
Alors que les départements et régions d’Outre-mer font face à des vagues épidémiques successives, la HAS recommande donc de vacciner les enfants âgés de 6 à 16 ans ayant un antécédent d’infection par la dengue*, ainsi que les adultes de 17 à 60 ans présentant des comorbidités, avec ou sans antécédent d’infection, devant le risque d’aggravation par la dengue de ces comorbidités. S’agissant des enfants drépanocytaires, âgés de 6 à 16 ans, sans antécédent de dengue, la vaccination peut être envisagée au cas par cas. Qdenga est en revanche contre-indiqué chez les sujets immunodéprimés, la femme enceinte et la femme allaitante.
Le schéma vaccinal consiste en deux doses de vaccin espacées de 3 mois, à réaliser entre deux épidémies. La nécessité d’une dose de rappel n’a pas encore été établie. Après une infection par la dengue, la HAS préconise d’attendre 6 mois avant d’être vacciné.

Surveilllance post-vaccination
Des réactions allergiques n’étant pas à exclure après administration du vaccin, la HAS souligne la nécessité de surveiller étroitement les patients vaccinés au moins pendant 15 minutes après l’injection. Les personnes drépanocytaires doivent aussi faire l’objet d’une surveillance clinique étroite, notamment pour recueillir des données de sécurité du vaccin dans cette population. Et plus largement, les personnes vaccinées doivent continuer à appliquer des mesures de protection individuelle à l’égard des piqûres de moustiques (répulsifs, vêtements longs, moustiquaires…) pour lutter efficacement contre le virus.
Chez les enfants déjà infectés âgés de plus de 6 ans, le vaccin Qdenga serait efficace dans la prévention de la dengue symptomatique pour les 4 sérotypes (de 51,8 % contre DENV-3 à 80,2 % contre DENV-2), ainsi que dans la prévention des hospitalisations (avec une efficacité de 98 % contre DENV-2 et 72 % contre DENV-1 et DENV-3).
En revanche, chez les séronégatifs (tous âges confondus), le vaccin montre une absence d’efficacité contre les sérotypes DENV-3 et 4 dans la prévention de la dengue symptomatique, ainsi que contre le sérotype DENV-3 dans la prévention des hospitalisations. Et le risque de forme sévère chez les séronégatifs vaccinés ultérieurement exposés à DENV-3 et DENV-4 n’est pas à exclure.
Les données disponibles montrent enfin une bonne tolérance du vaccin quel que soit le statut sérologique des sujets étudiés.
Jusqu’à présent, seule la vaccination par le vaccin Dengvaxia de Sanofi pouvait être proposée aux personnes de Guadeloupe, Martinique et Guyane ayant déjà été infectées, selon les recommandations de la HAS de 2019. Mais sa commercialisation est arrêtée depuis le 31 mars 2024, du fait d’une faible utilisation. Un autre vaccin tétravalent vivant atténué, développé par l’Institut Butantan de l'État de São Paulo au Brésil, est actuellement en développement clinique (phase 3).
*Les parents ou tuteurs doivent apporter la preuve d’une infection antérieure à la dengue, c’est-à-dire biologiquement confirmée en laboratoire (RT-PCR, antigénémie NS1, sérologie IgM/IgG) OU cliniquement diagnostiquée en contexte épidémique de dengue et inscrite dans le carnet de santé. À défaut, un test sérologique Elisa ou EIA réalisé en laboratoire pourra être effectué au préalable pour connaître le statut sérologique du mineur.
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