Chaque année en France, selon les données du PMSI, on recense 1 200 à 1 500 cas d’encéphalites infectieuses. Or, au-delà des complications neurologiques types, ces encéphalites aiguës sont à l’origine de séquelles neuro-psycho-sociales largement mésestimées. C’est ce qu’a révélé une étude de suivi prospectif d’encéphalites aiguës menée sur une cohorte multicentrique française (1). «Dans cette cohorte de la Société de pathologie infectieuse de langue française [SPILF], 3 ans après l’épisode infectieux déclaré guéri, une majorité de patients présentent des symptômes persistants affectant leur vie quotidienne », résume le Pr Jean-Paul Stahl (CHU de Grenoble).
Fréquence des altérations persistantes
La cohorte prospective multicentrique initiée en 2007 rassemblait 253 cas dont la moitié d’étiologie identifiée (Herpes simplex, varicelle, BK et Listéria). Parmi eux, 26 sont décédés à l’hôpital. Trois ans après, on a pu réévaluer 167 survivants.
Près des deux tiers (n = 108) ont un bon pronostic neurologique (Glasgow Outcome Scale [GOS]› 5), quand 18 % ont un handicap modéré et 14 % un handicap majeur.
« Néanmoins, bien que la plupart aient un bon pronostic à 3 ans, des handicaps mineurs à graves persistent chez nombre d’entre eux », explique le Pr Stahl. Globalement, 61 % présentent des symptômes persistants altérant leur qualité de vie. Les plus fréquents sont les difficultés de concentration (42 %) les troubles comportementaux (27 %), les difficultés d’élocution (20 %) et les pertes de mémoire (19 %). Et 24 % des sujets qui travaillaient n’ont pas pu reprendre.
Les facteurs de risque de symptômes persistants sont multiples : comorbidités, âge, agent causal (Herpes simplex). Le délai de guérison n’a, semble-t-il, pas d’impact. Seul le niveau d’études est protecteur. « Globalement donc, tout le monde est à risque. Mais une plus grande complexité neuronale multiplie probablement les possibilités de by-pass/reconstruction autour d’une lésion », commente le Pr Stahl.
Suivi, prise en charge et prévention : un nouvel axe de recherche
« Jusqu’ici on évaluait la guérison sur la symptomatologie clinique à la sortie de l’hôpital, en se fondant sur des critères purement somatiques. La fatigue, l’irritabilité, les difficultés de concentration : autant de paramètres qui échappaient à l’évaluation. Or, au-delà des handicaps neurologiques majeurs précoces, l’encéphalite peut générer un handicap caché neuro-psycho-social. Il faut donc à l’avenir le dépister. Mais avec quel outil, sur quelle durée ? Il faudra aussi réfléchir à des standards de prise en charge et/ou de prévention de ces séquelles, en s’inspirant des procédures de rééducation utilisées chez les traumatisés et en post-AVC. Ce qui ouvre un vaste axe de recherche », explique le Pr Stahl.
Résultat, une nouvelle cohorte française sera lancée en 2014. Et plusieurs pays européens devraient mettre en place la leur. Tandis qu’au niveau international, un comité d’experts travaille aujourd’hui à la rédaction de recommandations pour le suivi et le traitement de ces séquelles. Des recommandations issues de ce groupe international, auquel participent des représentants de la SPILF, sont attendues fin 2014.
D’après un entretien avec le Pr Jean Paul Stahl (Grenoble)
(1) A Mailles et al. Long-term Outcome of Patients Presenting With Acute Infectious Encephalitis of Various Causes in France. Clinical Infectious Diseases 2012;54:1455–64.
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