D'ici fin juin, un arrêté et un avis de la Haute Autorité de Santé doivent encadrer la prescription par tous les médecins des antiviraux à action directe contre l'hépatite C. Concrètement, comment les médecins généralistes vont-ils s'emparer de la question ? Pour répondre à cette question, plusieurs intervenants se sont exprimés sur le dépistage, le diagnostic et la prise en charge thérapeutique, lors du focus « Hépatite C : Objectif 2025 » organisé par le Groupe Profession Santé*.
TROD et sérologie
Le TROD (test rapide d'orientation diagnostic) est souvent évoqué pour faciliter le dépistage en cabinet médical, mais pour le Pr Victor De Ledinghen du service de gastro-hépato-entérologie du CHU de Bordeaux, il existe un « embouteillage » au niveau de la formation à la réalisation de TROD. Il estime toutefois qu'un diagnostic directement réalisé par sérologie est tout à fait indiqué.
Au cours d'un débat sur la prise en charge thérapeutique, le président de l'union des pharmaciens, René Maarek, a plaidé pour la mise à disposition d'autotests de l'infection par le VHC. Une idée fraîchement accueillie par plusieurs intervenants dont le Dr Pascal Melin, président de SOS Hépatite : « Dans 30 à 40 % des tests de dépistage positifs, il y a des anticorps mais pas de virus. On ne peut pas courir le risque de laisser des gens seuls face à un faux positif. Il faut un TROD et un contact avec un professionnel de santé ! »
Schéma simplifié et collaboration ville hôpital
L'évaluation initiale et l'initiation du traitement pourraient suivre un schéma assez similaire au parcours simplifié promu dans les recommandations de l'AFEF. Ces dernières impliquent une évaluation des comorbidités : consommation d’alcool, surpoids ou obésité, diabète, coïnfection VHB et/ou VIH et insuffisance rénale sévère. Une recherche de cirrhose (Fibroscan ou Fibrotest/Fibromètre) doit également être faite.
Outre le bilan sanguin, le génotypage du VHC n’est pas nécessaire car les traitements à disposition dans l'hépatite C sont pangénotypiques : Maviret (Glécaprévir et Pibrentasvir, AbbVie) ou Epclusa (Sofosbuvir et Velpatasvir, Gilead). « Le choix du médicament dépend du patient, commente le Dr Xavier Aknine, président de l’Association nationale des généralistes pour la recherche et l’étude sur les hé́patopathies chroniques (ANGREHC), certains seront plus observants avec 3 comprimés par jour pendant 8 semaines, d'autres préfèrent un comprimé par jour pendant 12 semaines ».
En cas de coïnfection, d’insuffisance rénale sévère ou de comorbidité mal contrôlée, le médecin généraliste pourrait passer le relais à un hépatologue, avec possible intervention des réunions de concertation pluridisciplinaire pour les cas les plus complexes comme les patients en échec d'un premier traitement ou en attente de transplantation.
Le suivi post traitement, essentiel !
La prise en charge ne s'arrête pas avec la guérison, définie par un test ARN négatif 12 semaines après la fin du traitement. Un consensus a émergé des débats, autour de la prévention des recontaminations (un contrôle ARN par an chez les usagers actifs de drogue) et d'aggravation de la fibrose. Pour y parvenir, des expériences de collaboration ville-hôpital comme le Réseau Ville Hôpital Hépatite C Côte d’Azur, le service expert de lutte contre les hé́patites virales d’Alsace, le Réseau Hépatite C Occitanie ou le REVHEPAT de Clichy, militent en faveur d'une implication forte des médecins généralistes dans un ensemble comprenant des hépatologues, des assistants sociaux, des Csapa, des diététiciens…
Une question s'est également posée pendant les débats : avec des traitements courts guérissant plus de 95 % des malades sans effet secondaire, est-il toujours nécessaire d'inscrire les patients dans un régime d'affection longue durée (ALD) ? « Oui », répond le Dr Aknine, « c'est confortable pour les médecins traitants, et cela permet la prise en charge d'examens spécialisés pour les patients qui présentent un état de fibrose avancée»
* Évènement organisé avec le soutien institutionnel de l'association française pour l'étude du foie (AFEF), et des laboratoires Abbvie et Gilead.
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