Une jeune femme présentant des manifestations grippales est hospitalisée, en mai dernier, dans un hôpital de Taïwan. C’est bien une grippe, mais d’un type jamais observé, jusqu’ici, dans l’espèce humaine : le virus isolé est en effet un virus Influenza A aviaire non sous-typé, le A H6N1. Des Chinois décrivent, dans le Lancet, ce premier cas humain d’infection à A H6N1 et détaillent le profil génétique de ce virus qui présente de nombreuses analogies avec le virus H6N1 du poulet.
Une bonne évolution clinique
La patiente, 20 ans, est hospitalisée le 5 mai 2013 parce que sa fièvre ne baisse pas et parce qu’elle développe une dyspnée. Les radios montrent un infiltrat pulmonaire bilatéral des bases. Les prélèvements de gorge, après inoculation sur cellules MDCK (Madin-Darby canine kidney), révèlent la présence d’un virus influenza A non sous-typé (ni H1, ni H3). L’administration à la patiente d’oseltamivir (75 mg X2 /j) et de lévofloxacine (100 mg/j) pendant quelques jours semble contribuer à sa guérison, avec disparition des infiltrats deux semaines après son admission.
Les auteurs font procéder, le 20 mai, à une analyse de l’isolat contenant ce virus A non sous-typé, qui sera faite au CDC (Centres for Disease Control) de Taïwan. On identifie un virus H6N1, désigné TW02/13. L’examen des séquences génétiques du virus révèlent une forte homologie (plus de 96 % de nucléotides en commun) avec les séquences correspondantes du virus A2837/13, qui a été découvert chez des poulets à Taïwan cette année. Les analyses phylogénétiques indiquent que TW02/13 appartient à une lignée de H6N1 observée chez les poulets d’élevage à Taïwan depuis 1997, et n’ayant rien à voir avec les virus observés à Honk-Kong ou dans d’autres régions en Chine. Les chercheurs parviennent à montrer que le virus TW02/13 semble dériver d’un réassortiment génétique complexe entre plusieurs clades de virus H6N1 de poulet.
Une certaine endémicité
Leur étude permet par ailleurs de reconnaître au TW02/13 plusieurs caractéristiques : une pathogénicité faible chez la volaille, mais aussi et surtout la présence d’une substitution G228S au niveau du récepteur de la protéine de l’hémagglutinine*. Or cette substitution était déjà observée chez des poulets à Taïwan après 2005, ce qui suggère que les clades « 228S » sont devenus endémiques et prédominants dans l’île chinoise. Un autre caractère du TW02/13 est sa susceptibilité à l’oseltamivir et une résistance à l’adamantane. Toutes ces déductions proviennent d’études animales, faut-il toutefois préciser. La pathogénie du virus TW02/13 reste à étudier chez l’homme.
Dans cette enquête, déclenchée à partir du premier cas humain d’infection par un virus aviaire A H6N1, la source de l’infection de la jeune femme n’a pu être déterminée. En revanche, les analyses génétiques sont éloquentes. Outre les preuves de la parenté de ce virus, isolé chez l’homme, avec les virus aviaires H6N1 isolés à Taïwan, la découverte de la substitution G228S au niveau du récepteur de l’hémagglutinine est particulièrement intéressante. Il semble en effet que cette modification joue un rôle décisif dans l’affinité du virus aviaire TW02/13 pour le site de fixation à l’acide sialique α2-6 de type humain. Chez le poulet, l’hémagglutinine virale se lie à d’autres types de récepteurs sialiques (α2-3).
Les auteurs en arrivent à la conclusion qu’une lignée unique de virus H6N1 ayant acquis la substitution G228S d’adaptation à l’homme est aujourd’hui parvenue au stade d’endémicité et prédomine chez les poulets d’élevage sur l’île de Taïwan.
Feng-Yee Chang et coll. Human infection with avian influenza A H6N1 virus : an epidemiological analysis. The Lancet (2013) en ligne
* Les virus Influenza A ont deux protéines de surface de rôle essentiel : l’hémagglutinine et la neuraminidase
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