Deux équipes de l’Institut Imagine (Inserm/AP-HP/Université de Paris), en collaboration avec le service de pédiatrie générale de l’hôpital Necker Enfants-Malades (AP-HP) et l’Institut Pasteur, ont mis en évidence une signature moléculaire observée de manière spécifique chez les enfants ayant développé une myocardite dans le cadre d’un syndrome inflammatoire multisystémique (abrégé PIMS ou MIS-C) lié au Covid. À partir de cette découverte, décrite dans la revue « Med »*, les chercheurs travaillent sur un test qui serait prédictif de la survenue de myocardite post-infectieuse ou post-vaccinale.
Le PIMS est un syndrome pédiatrique rare sévère qui survient dans les quatre à six semaines après une infection par le SARS-CoV-2. Il a été observé fin avril 2020 en France et ailleurs dans le monde. En France, environ 600 cas ont été rapportés à ce jour. Aujourd’hui bien identifié et de bon pronostic, il se caractérise par des symptômes variés (fièvre, douleurs gastriques, éruptions cutanées…), et dans environ 70 % des cas, ce syndrome atteint le cœur, entraînant une myocardite.
Dérégulations des cellules myéloïdes
« Notre étude est la première à avoir étudié les caractéristiques moléculaires transcriptomiques du PIMS », indiquent au « Quotidien » Frédéric Rieux-Laucat et Mickaël Ménager (Institut Imagine), qui ont mené ces travaux.
Au total, 56 enfants hospitalisés à l’hôpital Necker Enfants-Malades (AP-HP) entre le 6 avril et le 30 mai 2020 ont été inclus dans l’étude. Parmi eux, 30 ont développé un PIMS, dont 21 avec une myocardite associée. À partir de prélèvements sanguins, les chercheurs ont étudié les différences entre les jeunes patients qui ont développé une myocardite et ceux qui n’en ont pas développé. Grâce à différentes techniques d’analyse, ils ont réalisé un dosage des cytokines, caractérisé la composition des cellules du sang et analysé l’expression des gènes cellule par cellule.
Ces analyses leur ont permis de mettre en évidence l’expression anormale d’une centaine de gènes associés à la survenue de myocardite. En particulier, une hyperactivation de la voie NF-kB (liée à une surproduction de TNF-α) et une activation importante des interférons de type I et II associée à un défaut de réponse des voies correspondantes ont été observés. « Cette dérégulation semble assez spécifique des cellules myéloïdes, c’est-à-dire des monocytes et des cellules dendritiques. Nous n’avons pas retrouvé ces dérégulations au niveau des lymphocytes B et T », rapportent Frédéric Rieux-Laucat et Mickaël Ménager.
Évaluer le risque post-vaccinal
Les chercheurs veulent désormais savoir si cette signature est strictement spécifique aux formes pédiatriques de myocardite ou bien si elle est aussi retrouvée chez les adultes. Pour cela, ils étudient de manière rétrospective des formes sévères de Covid chez des adultes. Si cette signature est effectivement pertinente dans cette population également, « elle pourrait être utilisée de manière précoce pour anticiper les formes sévères, détaillent les chercheurs. L’idée serait aussi de l’utiliser de manière prédictive chez des patients Covid qui ont eu des antécédents cardiaques ou de maladies inflammatoires par exemple pour évaluer le risque de myocardite et être en mesure de le prévenir ».
Cette signature pourrait aussi être utile pour évaluer le risque de myocardite après la vaccination Covid. Et ce alors que l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a identifié une trentaine de cas post-vaccinaux entre le 20 août et le 2 septembre. « Il s’agit de formes moins sévères que celles causées par le virus », précisent Frédéric Rieux-Laucat et Mickaël Ménager.
La signature moléculaire peut être obtenue à l’aide d’une prise de sang, à partir de laquelle l’ARN des globules blancs est extrait. « Nous sommes en train de développer une puce qui va permettre de séquencer la centaine de gènes dérégulés que nous avons identifiés, afin de regarder s’il y a des variations dans la séquence et établir la signature prédictive de myocardite », expliquent les chercheurs.
S’il s’avère qu’il s’agit bien des mêmes mécanismes moléculaires en jeu chez l’enfant et l’adulte, aussi bien en post-infectieux et en post-vaccinal, le test pourrait être déployé à grande échelle.
D’ores et déjà, « nous sommes en discussion avec des industriels, car des laboratoires pourraient être intéressés par le fait de disposer d’un test compagnon du vaccin chez les individus qui pourraient être à risque de myocardite », avancent Frédéric Rieux-Laucat et Mickaël Ménager.
C. de Cevins et al., Med, 2021. DOI: 10.1016/j.medj.2021.08.002
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