Alors que l’incidence des bactéries multirésistantes en ville et à l’hôpital continue d’augmenter, très peu de nouveaux antibiotiques sont commercialisés. Dans les quinze dernières années, moins de dix nouvelles molécules ont été mises sur le marché en France, dont seulement deux avec un nouveau mode d’action – linézolide et daptomycine – ciblant les bactéries à Gram positif.
Il est inquiétant de voir que les fluoroquinolones étaient la dernière classe antibiotique avec un mécanisme nouveau, actif sur les bactéries à Gram négatif, alors que les difficultés thérapeutiques actuelles concernent surtout ces bactéries (en particulier celles productrices de bêtalactamases à spectre étendu [BLSE] et de carbapénèmases).
Il existe tout de même quelques antibiotiques en développement, notamment de nouvelles associations bêtalactamines + inhibiteurs de bêtalactamases. Des approches anti-infectieuses, ne faisant pas appel aux antibiotiques, sont aussi à l’étude (phages, cibles antivirulences, vaccins…). Mais ne vont pas être disponibles avant plusieurs années (1).
Plusieurs raisons expliquent ce manque d’intérêt de l’industrie pharmaceutique pour les antibiotiques : le fait que les antibiotiques faciles à découvrir ont déjà été commercialisés ; le manque de retour sur investissement pour l’industrie (les antibiotiques sont beaucoup moins rentables qu’un médicament contre le cancer ou l’obésité par exemple) ; et les complexités du dossier demandé par les autorités sanitaires (1).
Relancer l’intérêt des industriels
Des pistes de réflexion sont en cours au niveau international pour envisager des solutions et relancer l’intérêt des industriels pour le secteur des antibiotiques (lire ci-dessus) (1). Il est également nécessaire de continuer à commercialiser de vieux antibiotiques, toujours précieux, tels le pivmécillinam, la fosfomycine ou la nitrofurantoïne.
Dans tous les cas, le juste usage des antibiotiques et les mesures d’hygiène sont indispensables pour lutter contre l’émergence de résistances bactériennes, car les bactéries ont une capacité d’adaptation incroyable ; elles trouveront probablement une parade à toute nouvelle molécule. Les antibiotiques sont des médicaments à part, ayant un impact à la fois sur l’individu et la collectivité, et ils doivent être protégés en conséquence (2). Chacun a un rôle à jouer, si nous ne voulons pas rencontrer bientôt de plus en plus fréquemment des situations d’impasse thérapeutique.
Nice.
(1) Laxminarayan R et al. Antibiotic resistance - the need for global solutions. Lancet Infect Dis 2013 ;13:1057-98.
(2) http://www.infectiologie.com/site/ACdeBMR.php
exergue
Des médicaments à part, ayant un impact à la fois sur l’individu et la collectivité
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