Après la publication d’un communiqué rédigé par l’Institut Jenner d’Oxford sur le vaccin conçu à Londres et commercialisé par la multinationale anglo-suédoise AstraZeneca, Piero di Lorenzo, le patron du laboratoire partenaire italien Advent-IRBM, fait le point sur les résultats d'efficacité affichés.
LE QUOTIDIEN : L'efficacité de votre candidat vaccin est comprise entre 62 et 90 %, avec une efficacité moyenne de 70 %. Pourquoi avez-vous affiché plusieurs schémas de dosage contrairement à Pfizer et Moderna ? Comment expliquez-vous les résultats à mi-dose ?
PIERO DI LORENZO : Normalement, plusieurs schémas sont toujours testés sur plusieurs groupes de volontaires et disons que trois, quatre et même cinq types d’essais sont lancés. D’abord, avec une seule dose pleine, puis une double injection, ensuite une demi-dose suivie d’un rappel un mois après avec une ampoule pleine et enfin, une dose pleine et un rappel d’une demi-dose.
En ce qui concerne notre candidat vaccin, la somme algébrique de tous ces essais est de 72 %. Le résultat le plus performant concerne le schéma à demi-dose avec un rappel à dose pleine un mois plus tard. Il a donc été adopté car il garantit une efficacité à 90 %. Pour des raisons de communication, nous avons voulu jouer cartes sur table et expliquer toute la procédure en dévoilant tous les résultats obtenus au niveau des différents schémas, même les moins efficaces.
Pourquoi le communiqué publié lundi matin par Oxford parle-t-il de résultats intermédiaires ?
Les résultats sont publiés et confiés aux agences de régulation au fil des essais cliniques. Nous avons une quantité impressionnante de données compte tenu du fait que 40 000 volontaires ont été enrôlés pour les différentes phases sur une période de 7 mois. Ces données doivent être interprétées et transcrites sous forme de statistiques. Ce sont des opérations complexes et longues.
Votre prophylaxie doit être conservée à 4 °C contre -80° pour le vaccin de Pfizer et -20° pour celui de Moderna. Par ailleurs, votre candidat vaccin coûtera moins cher, environ 2,80 € pour les deux doses contre 16 € à 20 € par dose pour les vaccins américains. Des arguments pour votre campagne de communication ?
Je ne crois pas et cette partie ne nous concerne pas. Parlons plutôt du plan de bataille. AstraZeneca a déjà mobilisé une vingtaine de laboratoires pour la production à l’échelle mondiale. L’idée est de produire entre 100 et 200 millions de doses par mois pour arriver à 3 milliards d’ici un an. En juin 2021, le contrat signé avec l’Union européenne sera rempli avec la livraison de 300 à 400 millions de doses :300 millions ont déjà été achetées et une option a été placée sur les100 autres millions d’unités. L’Union européenne répartira cette production entre les États membres en fonction de la population et des besoins de chaque pays. Fin janvier, les catégories à risque seront déjà vaccinées : les soignants, les forces de l’ordre et les personnes âgées placées en EHPAD.
Un premier lot de doses a déjà été produit et sera livré lorsque l’Agence européenne du médicament, l'EMA, aura délivré l’autorisation à la commercialisation. Laissons le temps aux autorités de régulation de travailler tranquillement et avec rigueur afin de vérifier la sécurité et l’efficacité des prophylaxies. Normalement, cette procédure prend environ un an mais compte tenu de la situation, j’espère que cet examen sera plus rapide et qu’elles délivreront l’autorisation aussi rapidement. Je leur fais entièrement confiance.
Pourquoi le vaccin appelé au départ ChAdOx1 a-t-il changé de nom dans le dernier communiqué qui parle d’AZD1222 ? S’agit-il bien de la même prophylaxie ? De plus, le communiqué d’Oxford ne mentionne pas Advent-IRBM comme partenaire, êtes-vous toujours associé ?
Il s’agit bien du même vaccin. Mais au départ, l’Institut Jenner d’Oxford a déposé le brevet en appelant cette prophylaxie ChAdOx1. Avec l’entrée d’AstraZeneca, le nom du vaccin qui a été inséré dans la gamme des produits de cette multinationale pharmaceutique, a été modifié. Pour le communiqué, cela n’a rien d’extraordinaire, c’est normal. Le vaccin a été conçu à Oxford, notre participation s’est jouée en termes d’expertise.
Les essais cliniques ne sont pas complètement terminés, notamment en ce qui concerne la durée de la couverture immunitaire et d’autres aspects fondamentaux de cette prophylaxie. Comment vont-ils se dérouler ?
En effet, les essais continueront pour vérifier la durée de l’immunité dans le temps. On sait en l’état actuel, que la durée de la couverture est de sept mois parce que les premiers volontaires ont été vaccinés il y a sept mois. Au fil des essais, la durée de la couverture se prolonge. Elle pourrait être d’un an ou deux, plutôt que dix ans. Les essais cliniques continueront tant que la question de la durée de l’efficacité n’aura pas été réellement approfondie.
Entre-temps, d’autres résultats tomberont. Dans l’immédiat, imaginons que la campagne de vaccination soit lancée en janvier prochain, les résultats indiqueront une durée différente par rapport à aujourd’hui. Nous arriverons à une immunité de dix mois. Si les résultats démontrent que l’intensité de la couverture diminue au terme de cette période, les personnes qui auront été vaccinées en janvier devront faire un rappel dix mois plus tard. Si en revanche, comme nous l’espérons, l’efficacité perdure pendant un an ou plus, elles pourront attendre.
Le compte-à-rebours est sur le point de s’achever et l’aventure du vaccin anti-Covid est quasiment terminée. Quelle est votre prochaine étape ?
Le mot de la fin n’est pas encore écrit. Nous avons encore au moins un an devant nous. Les populations vont devoir être vaccinées, les tests de contrôle sont en cours au niveau de la production des doses dans les différents établissements. L’horizon est proche certes, mais les choses ne sont pas finies. Nous avons plusieurs nouveaux projets en cours mais il s’agit d’un autre chapitre que nous devons encore commencer à écrire.
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