Le groupe pharmaceutique japonais Eisai et l'américain Biogen ont annoncé des résultats positifs pour le lécanemab, un nouveau médicament contre la maladie d'Alzheimer au stade précoce. Ce serait le premier à avoir apporté une preuve tangible d'efficacité sur le ralentissement de la progression de la maladie, selon les données communiquées par les entreprises l'ayant développé.
Le lécanemab a permis de réduire de 27 % le déclin cognitif aux premiers stades de la maladie dans une étude de phase 3 randomisée contre placebo menée chez près de 1 800 participants au cours d'une période de 18 mois. L'étude Clarity AD a ainsi atteint son critère principal de jugement mesuré par l'échelle globale fonctionnelle et cognitive CDR-SB, ainsi que « tous les critères secondaires », à savoir le changement en plaques amyloïdes au PET scan à 18 mois et les scores de trois échelles utilisées dans la maladie d'Alzheimer.
Les effets indésirables rapportés étaient à type d'anomalies d'imagerie liée à l'amyloïde (Aria) : œdème vasogénique (12,5 % dans le groupe lécanemab versus 0,7 % dans le groupe placebo) dont symptomatique (2,8 % versus 0,0 %), micro et macrohémorragies cérébrales ou sidérose superficielle (17,0 % versus 8,7 %), dont symptomatiques (0,7 % versus 0,2 %). L'incidence totale des Aria était de 21,3 % dans le groupe traité et de 9,3 % dans le groupe placebo.
Les critères d'éligibilité autorisaient les patients porteurs de comorbidités (hypertension, diabète, cardiopathie, obésité, maladie rénale, anticoagulation, etc.). Le traitement était administré à la dose de 10 mg/kg deux fois par semaine.
Eisai et Biogen prévoient de publier les résultats complets dans une revue scientifique, et de déposer des demandes d'autorisation pour la commercialisation du traitement aux États-Unis, au Japon et en Europe avant la fin mars 2023.
Des experts prudents mais intéressés
Les bénéfices du médicament pour les patients « sont modestes, mais réels » et ces résultats sont donc « vraiment encourageants », a réagi le professeur de neurosciences John Hardy de l'University College de Londres.
« Si les données résistent à un examen approfondi, il s'agit d'une nouvelle fantastique », a pour sa part commenté Tara Spires-Jones de l'Université d'Édimbourg. Le traitement n'entraîne pas « une guérison », mais « freiner le déclin cognitif et ainsi préserver la possibilité de mener des activités quotidiennes normales est déjà une victoire énorme », souligne-t-elle.
Le médicament devra toutefois être examiné « au regard des risques d'effets indésirables » détectés, « dont des inflammations et des saignements dans le cerveau », a tempéré le Dr Charles Marshall de la Queen Mary University of London.
Un second souffle à l'hypothèse amyloïde
Quoi qu’il en soit, ces résultats montrent que s'attaquer aux plaques amyloïdes dans le cerveau, comme le fait le lécanemab, « mérite de continuer à être exploré comme stratégie de traitement », a-t-il souligné.
Pourtant, le rôle précis des plaques amyloïdes dans la maladie (en sont-elles la cause, ou la conséquence d'autres phénomènes ?) reste sujet à débat dans la communauté scientifique.
Un autre traitement du laboratoire américain Biogen, nommé Aduhelm (aducanumab) et visant également les plaques amyloïdes, avait suscité beaucoup d'espoirs en 2021 en étant le premier médicament approuvé aux États-Unis contre la maladie depuis 2003.
Mais il a aussi suscité la controverse. L'agence américaine du médicament FDA était d'abord allée à l'encontre de l'avis d'un comité d'experts, qui avait jugé que le traitement n'avait pas suffisamment fait preuve de son efficacité lors des essais cliniques. La FDA avait par la suite réduit son usage aux personnes atteintes de cas modérés de la maladie uniquement. En avril 2022, le laboratoire a retiré sa demande d'autorisation auprès de l'Agence européenne des médicaments.
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