Le risque d'AVC ischémique pourrait être augmenté par la prise d'antiémétiques utilisés dans le traitement symptomatique des nausées et vomissements, suggère une étude française (Inserm, Centre de recherche Bordeaux Population Health, CHU de Bordeaux), publiée dans le « British Medical Journal » ce 24 mars. Pour rappel, 80 % des 140 000 accidents vasculaires cérébraux (AVC) qui surviennent chaque année en France sont ischémiques.
De précédentes études ont démontré une association entre le risque d'AVC ischémique et la prise d'antipsychotiques aux propriétés antidopaminergiques (risque qui se renforce avec l'âge et l'existence d'une démence). Si les mécanismes sous-jacents ne sont pas pleinement élucidés, l'action antidopaminergique est l'une des hypothèses plausibles.
C'est pourquoi les chercheurs ont cherché à évaluer une association similaire avec des médicaments qui partagent ces propriétés : les antiémétiques antidopaminergiques. Ces derniers, dompéridone, métoclopramide et métopimazine, sont utilisés très couramment (4 millions de personnes ont eu au moins un remboursement de métopimazine en 2017) dans le traitement symptomatique des nausées et vomissements d’origines diverses (gastro-entérite aiguë, migraine, contexte post-opératoire ou dans le cadre d’une chimio ou radiothérapie).
Données de l'Assurance-maladie
À partir des données nationales de remboursement de soins de l’Assurance-maladie et celles des hospitalisations, les chercheurs ont réalisé une étude dite « cas propre-témoin ». L’utilisation du médicament dans la période précédant immédiatement l’accident (ici 14 jours) est comparée à la même utilisation au cours d’une période plus ancienne (ici plus d’un mois) où elle ne peut avoir provoqué l’événement. Une utilisation plus forte dans la période précédant immédiatement l’accident est en faveur d’un rôle joué par le médicament dans l’attaque. Cette méthode, où le sujet constitue sa propre référence, permet de prendre en compte les facteurs de risque personnels d’AVC ischémique, tels que le tabagisme, l’indice de masse corporelle, l’activité physique ou les habitudes alimentaires.
L’étude a ainsi dans un premier temps analysé les données de 2 612 adultes hospitalisés pour un premier AVC ischémique entre 2012 et 2016 et ayant débuté un traitement par antiémétiques dans les 70 jours précédant l'AVC ischémique. Chez ces sujets, les analyses ont retrouvé une plus forte consommation d’antiémétiques dans les jours précédant l’AVC marquée par un pic de d’initiation de traitement sur cette période. Ainsi, l'on observe une courbe ascendante rapide au cours des 14 jours avant l'AVC de la proportion des patients sous antiémétiques, de 1 à 10 %.
Dans les premiers jours de traitement
Pour éliminer un biais potentiel, au cas où l'utilisation du médicament aurait été influencée par des épidémies de gastro-entérite aiguë, l’étude a dans un second temps considéré, sur la même période, un groupe constitué de 21 859 personnes n’ayant pas présenté d’AVC. Chez ces personnes, aucun pic ou excès d’utilisation d’antiémétiques comparable à celui mis en évidence chez les patients avec AVC n’a été retrouvé.
Les résultats de cette étude suggèrent donc une augmentation du risque d’AVC ischémique dans les premiers jours d’utilisation des médicaments antiémétiques antidopaminergiques (avec un risque relatif évalué à 3,12), ceci pour les trois antiémétiques étudiés, dompéridone, métoclopramide et métopimazine (avec des risques respectifs de 2,51, 3,53 et 3,62).
« Cette première étude apporte un signal fort, portant sur des médicaments largement utilisés dans la population générale, commente Anne Bénard-Laribière, l’une des auteurs. Dans l’immédiat, il paraît très important que ces résultats puissent être répliqués dans d’autres études, qui pourraient apporter des indications sur la fréquence de cet effet indésirable (...). Disposer d’informations précises sur les sous-types d’AVC ischémiques et leur localisation permettrait également d’explorer les mécanismes en cause. »
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