Dr Frédéric Blanc (CHRU de Strasbourg)

« Moins de la moitié des corps de Lewy sont diagnostiqués en France »

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Publié le 19/03/2018
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La confusion fréquente entre la maladie d'Alzheimer et la démence à corps de Lewy peut avoir des conséquences graves, comme nous l'explique le Dr Frédéric Blanc, neurologue au CHRU de Strasbourg.

LE QUOTIDIEN : Quelle est la part de sous-diagnostic de la maladie à corps de Lewy ?

Dr FRÉDÉRIC BLANC : Une série américaine a montré que 33 % seulement des patients sont diagnostiqués. En France aussi, moins de la moitié des corps de Lewy sont diagnostiqués. Les autres sont pris pour des maladies d’Alzheimer isolées ou des maladies psychiatriques d’apparition tardives.

Quels sont les signes diagnostiques caractéristiques ?

Il existe 4 signes cliniques caractéristiques : hallucinations visuelles, comme des sensations de passage ou de présence, fluctuations cognitives et/ou de vigilance, troubles du comportement en sommeil paradoxal et syndrome parkinsonien très particulier, sans tremblement mais avec une raideur et une lenteur.

Deux autres signes clairs sont à connaître : des endormissements de plus de 2 heures et des épisodes où le patient a le regard fixe. Ces critères ont été mis au point en 2017 sous la direction de l’équipe de Newcastle et de la Mayo Clinic.

Quelles sont les spécificités de la prise en charge ?

Attention aux médicaments. Les fréquents troubles du comportement ne doivent surtout pas être traités avec des antipsychotiques. Ces patients les supportent encore plus mal que ceux atteints de la maladie d’Alzheimer. Le patient peut devenir grabataire, et connaître une aggravation des troubles cognitifs. Le traitement à privilégier est la clozapine, 1/4 d'un comprimé de 25 mg pour commencer avant augmentation progressive des doses.

Les hallucinations et les fluctuations cognitives peuvent être traitées par un anticholinestérasique si elles ne sont pas trop envahissantes. Les troubles du comportement en sommeil paradoxal ne se traitent pas avec des benzodiazépines, mais avec la mélatonine de 2 à 9 mg. Enfin, le syndrome parkinsonien doit être traité par la lévodopa, et surtout pas par un agoniste dopaminergique qui augmente le risque d'hallucination et de délire !

Propos recueillis par D. C.

Source : Le Quotidien du médecin: 9649