LA MÉMOIRE est un ensemble de processus cognitifs, élaborés en relation avec toutes les autres fonctions cognitives, et « il est vain d’imaginer pouvoir les examiner en dix minutes » et d’imaginer pouvoir tester la mémoire rapidement et de manière pertinente en pratique médicale courante. Toutefois, un examen de la mémoire est indispensable face à une plainte mnésique, qui est la plus fréquente des plaintes cognitives. Les médecins en général et les neurologues en particulier, doivent être capables d’éliminer rapidement les difficultés mnésiques banales liées à l’anxiété ou au vieillissement naturel, et de repérer les plaintes suspectes qui justifieront une évaluation plus poussée.
En pratique, l’interrogatoire recherchera les plaintes alors que les tests objectiveront les troubles mnésiques avérés.
Règle d’or : « racontez » et « précisez »
L’entretien doit essentiellement être mené sous une forme semi-structurée, s’adressant au patient en présence d’un informant fiable. L’interrogatoire recherche les antécédents mais aussi les situations à risque (anxiété, dépression, exposition à des solvants, horaires postés, troubles du sommeil…). Il permet déjà d’évaluer certains secteurs épisodiques (souvenirs personnellement vécus) et sémantiques (savoirs partagés par l’ensemble du groupe socioculturel). La règle d’or de l’entretien semi-structuré, dont le but est de guider sans trop orienter, réside dans ces deux questions : « Racontez » et « Précisez ».
« Il n’est pas nécessaire d’envoyer à une neuropsychologue tous les patients ayant des plaintes mnésiques. » Les recommandations sur le diagnostic de la maladie d’Alzheimer indiquent qu’un « bedside mental status examination » peut aider au diagnostic, « mais ces tests ne sont pas assez sensibles pour repérer des troubles cognitifs subtils. » Les tests de mémoire font partie intégrante de l’examen neurologique clinique. Ils ne font pas le diagnostic d’une maladie, mais d’un dysfonctionnement cognitif.
Ils doivent être interprétés en tenant compte de l’âge et du niveau socio-éducatif et parfois du genre. Les tests qui renseignent sur le fonctionnement du moteur sont plus sensibles que l’imagerie (IRM ou scanner), qui donne une image du moteur. Il existe différentes échelles cognitives globales, comportant toutes un sub-test de mémoire : MMSE (incontournable), BEC 96, BAC 40, Batterie cognitive courte, CODEX, Montreal Cognitive Assessment.
Test des cinq mots.
Les plaintes mnésiques sont le plus souvent liées aux difficultés de mémoire épisodique (mémoire des événements personnels vécus, avec leur contexte de date, de lieu, d’état émotionnel). Après 65 ans, une plainte de ce type peut être prédictive d’un risque de démence. Le test des cinq mots (T5M) est l’un des rares tests rapides et fiables qui permet au clinicien en pratique médicale courante, d’évaluer une amnésie antérograde. Et il est pertinent pour le diagnostic de maladie d’Alzheimer. Sa réalisation en 4 étapes est standardisée. Les cinq mots concrets non prototypiques (musée, limonade, sauterelle, passoire, camion) doivent être appris en s’aidant de l’« indiçage » catégoriel, rappelés dans l’immédiat puis différé, après avoir occupé la mémoire de travail pour éviter que les mots ne soient maintenus dans la boucle phonologique. Chez le sujet aphasique, on peut utiliser le test des cinq dessins. Il importe de repérer les plaintes associées à un trouble psychiatrique de type anxiété généralisée ou phobie, sans oublier que la maladie d’Alzheimer peut coexister.
Si la plainte porte sur la mémoire sémantique, il faut s’attacher à retrouver la notion d’une anomie. Très souvent « la conversation prend un tour irréel caractéristique, dominé rapidement par un discours autocentré. » On fait réaliser des épreuves de fluence verbale (évaluation du stock lexico-sémantique et des processus de récupération des mots). On fait réaliser une tâche de fluence alphabétique (dire le plus grand nombre de mots commençant par « P »), une tâche de fluence sémantique (donner le plus grand nombre de noms d’animaux), une épreuve de dénomination de dessins d’objets et des tests portant sur la mémoire collective (batteries EVE 10 et TOP 10).
L’exploration de la mémoire à court terme et de la mémoire de travail peuvent donner des résultats sensibles, mais « peu spécifiques car jamais pathognomoniques, ni d’une pathologie particulière, ni d’une topographie précise, ni d’un dysfonctionnement cognitif unique ».
* B.Croisile (hôpital Neurologique, Lyon) in Pratique Neurologique, tome 3, février 2012, n° 1, p. 32-39.
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