LA NEUROPATHIE AMYLOÏDE héréditaire à transthyrétine touche approximativement 500 familles en France, notamment au sein de la communauté portugaise. De transmission autosomique dominante, c’est la plus grave des neuropathies familiales de l’adulte. Elle est caractérisée par des dépôts de substance amyloïde formée de transthyrétine (TTR) dans différents tissus et particulièrement au niveau du système nerveux périphériphérique. « Dans la communauté d’origine portugaise, la maladie débute assez tôt, aux alentours de 33 ans en moyenne, dans un contexte familial très marqué. La mutation du gène est alors toujours la même (il s’agit de la substitution Val30Met). Dans des familles de souche française, la maladie a en général un début plus tardif (autour de 58 ans), sans notion familiale connue, ce qui rend le diagnostic difficile, avec des délais moyens de 4 ans après les premiers symptômes, et avec différentes mutations du gène TTR », rappelle le Pr Violaine Plante-Bordeneuve.
La neuropathie est évolutive et devient très sévère. Au début, les troubles sensitifs périphériques sont au premier plan, mais en deux ou trois ans, l’atteinte devient motrice. Une atteinte cardiaque ou plus rarement rénale peut être associée en fonction de la localisation des dépôts d’amylose. La maladie provoque le confinement au lit, voire le décès en moins de 10 ans.
Enfin, une alternative à la transplantation hépatique.
Physiologiquement, le foie fabrique de la transthyrétine, qui circule dans le sang sous formes de tétramères solubles. Mais en cas d’anomalies génétiques, comme la mutation Val30Met, le foie produit une transthyrétine anormale qui se dissocie et se dépose pour former la substance amyloïde dans les tissus cibles. Jusqu’à présent, le seul moyen de stabiliser la neuropathie était la transplantation hépatique, puisque le foie est le principal organe de synthèse de la TTR. Encore faut-il agir le plus tôt possible, car les lésions et dépôts déjà créés sont irréversibles. Les patients ayant la mutation Val30Met sont les meilleurs candidats à cette approche thérapeutique qui reste très lourde.
« D’où l’intérêt du tafamidis, qui est le premier traitement pharmacologique proposé dans cette indication. Il agit en se liant à la transthyrétine et en empêchant qu’elle ne se dissocie. Il prévient donc la survenue de nouveaux dépôts amyloïdes, mais ne permet pas d’éliminer ceux déjà existants, d’où l’intérêt de le donner, là aussi, le plus tôt possible », explique le Pr Plante-Bordeneuve. C’est la première approche pharmacologique de cette maladie et elle se révèle particulièrement intéressante du fait de sa bonne tolérance et de sa facilité d’utilisation (un seul comprimé à 20 mg par jour).
Des résultats d’études encourageants.
Un essai randomisé en double aveugle contre placebo, d’une durée de 18 mois, a été réalisé chez 128 patients ayant la mutation Val30Met ayant une maladie à un stade débutant (neuropathie sensitive limitée, peu ou pas d’atteinte motrice). Il a montré une stabilisation de la neuropathie dans 60 % des cas sous tafamidis (contre 38 % dans le groupe placebo). Aucun événement indésirable majeur n’a été constaté. « Cette étude a été poursuivie en ouvert pendant 30 mois (avec 86 patients inclus dans cette extension) : les patients qui ont reçu le tafamidis depuis le départ étaient moins sévèrement atteints que ceux qui ont reçu d’abord le placebo. Un ralentissement de l’évolution de la neuropathie a été observé lorsque le placebo a été remplacé par le tafamidis. Tous les critères (échelle neurologique, indice de masse corporelle, explorations électrophysiologiques et échelle de qualité de vie) étant en faveur du tafamidis, il est désormais possible de prescrire ce traitement en demandant une autorisation nominative temporaire d’utilisation (ATU) », indique le Pr Plante-Bordeneuve.
Une autre étude multicentrique, réalisée en ouvert sur 21 patients plus âgés (61 ans en moyenne), plus sévèrement atteints et ayant d’autres mutations de la TTR, semble également en faveur d’une stabilisation de la neuropathie sous tafamidis. Cependant, sans groupe témoin et compte tenu du nombre restreint de patients, il est plus difficile de conclure, même si sur le plan biologique, il a été montré que le tafamidis empêche bien la dissociation de la transthyrétine. « Il est important de poursuivre les études dans ce sous-groupe car il s’agit de patients pour lesquels la transplantation hépatique n’a pas fait la preuve de son efficacité pour stabiliser la maladie amyloïde », souligne le Pr Plante-Bordeneuve. Une autre étude est en cours aux Etats-Unis sur de tels patients pour savoir s’il y a également un ralentissement des dépôts amyloïdes, mais au niveau cardiaque cette fois. Elle porte sur un petit groupe d’une trentaine de malades ayant la mutation Ille122Val, dont l’expression est essentiellement cardiaque. Les résultats seront connus prochainement.
D’après un entretien avec le Pr Violaine Plante-Bordeneuve, CHU Henri-Mondor, Créteil.
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024