Covid-19

Kawasaki-like : les enfants récupèrent mieux avec l'association de corticoïdes et d'immunoglobulines

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Publié le 12/02/2021
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Un consortium français montre dans le « JAMA » les bénéfices à associer des corticoïdes aux immunoglobulines dans le syndrome inflammatoire multisystémique pédiatrique lié au SARS-CoV-2, confirmant les recommandations émises.
Ce syndrome rare mais sévère est aujourd’hui bien diagnostiqué et sa prise en charge optimisée

Ce syndrome rare mais sévère est aujourd’hui bien diagnostiqué et sa prise en charge optimisée
Crédit photo : PHANIE

Le syndrome inflammatoire multisystémique pédiatrique (Multi-Inflammatory Syndrome in Children, MIS-C) lié au Covid a été identifié fin avril en France et ailleurs dans le monde. Une équipe française confirme dans le « JAMA » qu’associer d’emblée des corticoïdes aux immunoglobulines améliore significativement la récupération des jeunes patients, qui font ainsi moins de formes sévères.

« Le MIS-C est un syndrome hyperinflammatoire qui associe une fièvre, souvent prolongée, des niveaux élevés de marqueurs de l’inflammation et divers symptômes tels qu’une éruption cutanée, une conjonctivite, des troubles digestifs ainsi que des signes hémodynamiques, voire une dysfonction myocardique, décrit pour le « Quotidien » le Pr François Angoulvant, pédiatre à l’AP-HP et coordinateur du consortium français pédiatrique qui a mené l’étude. Ce syndrome survient généralement quatre à cinq semaines après une infection Covid bénigne ».

Tous les critères ont été améliorés

Ce syndrome rare mais sévère est aujourd’hui bien diagnostiqué et sa prise en charge optimisée. Dans un premier temps, les jeunes patients ont été traités par immunoglobulines, comme pour la maladie de Kawasaki, du fait de certaines similitudes entre les deux entités. « Des antibiotiques sont également mis en place initialement, le temps d’écarter la piste de l’infection bactérienne », précise le Pr Angoulvant.

Pour les formes les plus sévères, associées à une dysfonction cardiaque, les patients ont également reçu des corticoïdes en cas d’échec des immunoglobulines seules. « Les médecins se sont aperçus que l’état des enfants qui recevaient des corticoïdes s’améliorait plus rapidement que celui des patients traités par immunoglobulines seules », rapporte le pédiatre.

L’étude du « JAMA » visait donc à évaluer si les corticoïdes pouvaient bénéficier à un plus grand nombre de patients. « C’est la première étude dans la littérature qui compare des traitements dans cette maladie », note le Pr Angoulvant. Au total, 106 enfants, d’âge médian 8,6 ans, ont été inclus dans cette étude rétrospective multicentrique : 34 ont reçu de la méthylprednisolone en complément des immunoglobulines (voie intraveineuse) et 72 ont reçu des immunoglobulines seules.

Dans le premier groupe, seuls 9 % des patients n’ont pas répondu au traitement contre 51 % dans le second groupe, l’échec thérapeutique étant défini par la persistance de la fièvre deux jours après le début du traitement de première intention ou sa recrudescence dans les sept jours (critère principal). « La fièvre est un critère relié au pronostic des patients dans un certain nombre de maladies inflammatoires », justifie le
Pr Angoulvant.

Les critères secondaires ont également été améliorés, que ce soit la durée de séjour en réanimation, la survenue secondaire d’une dysfonction cardiaque et le besoin de recourir à un support hémodynamique. « L’ensemble des paramètres étudiés vont dans le bon sens, ce qui nous rend confiant dans nos résultats », commente le pédiatre.
Une plus petite étude, parue fin octobre dans « Circulation » et menée à l’hôpital Necker-Enfants malades (AP-HP) auprès de 40 enfants, avait montré une meilleure récupération cardiaque chez les patients sous corticoïdes.

Un travail collaboratif

En pratique, les corticoïdes ont déjà été intégrés à la prise en charge des jeunes patients MIS-C. Dès fin 2020, le consortium préconisait leur utilisation. L’étude du « JAMA » est en effet le fruit d’une collaboration entre différentes sociétés savantes pédiatriques réunies, avec Santé publique France (SPF), au sein d’un comité de pilotage en vue de mieux comprendre cette nouvelle entité pathologique. Le fait que le MIS-C soit à déclaration obligatoire auprès de l’agence sanitaire a permis d’identifier les patients pour cette étude et de recueillir leurs données. Près de 350 cas ont ainsi été signalés.

« Nous avons également été aidés d’Activ*, une association de médecins qui font de la recherche clinique, avec lesquels nous avions créé un premier registre des patients hospitalisés pour une infection Covid », précise le Pr Angoulvant, soulignant l’effort collectif qui a permis ce travail. D’autres approches sont étudiées, comme la piste des biothérapies avec les anti-interleukines IL-1 ou IL-6. « Toutefois, le fait que ce syndrome concerne peu de patients, de l’ordre d’un enfant sur 10 000 infectés par le Covid, rend complexe la réalisation d’essais cliniques », tempère le pédiatre.

 

*Activ : Association clinique et thérapeutique infantile du Val-de-Marne

Charlène Catalifaud

Source : Le Quotidien du médecin