C’est un motif de consultation, en forme d’appel au secours, que connaissent par cœur tous les pédiatres. « Docteur, je n’en peux plus. Mon bébé ne fait que pleurer et je ne sais plus quoi faire… », disent les parents désemparés et souvent épuisés. Avant d’être un peu surpris quand le pédiatre leur explique que ces pleurs, si difficiles à gérer, sont en fait plutôt… rassurants. « De manière générale, les pleurs d’un bébé sont associés à quelque chose de négatif. Les parents pensent que leur enfant a mal quelque part, ce qui peut générer de l’incompréhension et de l’anxiété, constate la Dr Sophie Le Doaré Denizot, pédiatre libérale à Nantes. Un bébé qui pleure, c’est un bébé qui va bien dans l’immense majorité des cas. En effet, ces pleurs sont seulement la réaction normale de l’enfant qui manifeste son besoin d’attachement aux personnes qui s’occupent de lui. Un besoin d’entrer en symbiose avec son entourage proche, que le tout-petit manifeste par le seul moyen de communication qu’il a sa disposition : des pleurs. »
Les pleurs participent au processus de développement du nourrisson. Les neurosciences ont permis de définir cinq comportements d’attachement présents dès la naissance : téter, attraper, suivre des yeux, pleurer, sourire. Certes, dans un nombre limité de cas, « entre 4 et 5 % selon mon expérience », indique la Dr Le Doaré Denizot, ces pleurs prolongés peuvent être provoqués par une cause médicale : une infection, une douleur dont il faut rechercher la cause, ou de la fièvre. « Mais, encore une fois, cela reste rare. Il faut donc dire aux parents que tous les bébés pleurent de cette manière. On peut leur donner d’autres éléments qui vont les rassurer : une belle courbe de poids, le fait que l’examen médical soit normal, que leur bébé se calme dans les bras ou que les pleurs vont se calmer avec le temps », indique la pédiatre, en précisant, que sous réserve d’un examen clinique normal et d’une courbe pondérale satisfaisante, que les pleurs, même prolongés, peuvent donc être considérés comme normaux.
Un comportement universel
« Ce qui doit plutôt interpeller, c’est le bébé qui ne pleure jamais, qui ne réclame jamais rien. Entre l’âge de 15 jours et de deux mois, tous les bébés pleurent. Cela a été mis en évidence chez des nourrissons de tous les continents, quelque que soit la période de l’année. Et les garçons pleurent autant que les filles. Il n’y a pas de différences à ce niveau-là », indique la Dr Le Doaré Denizot, en précisant que ces pleurs sont en général majorés en fin d’après-midi, quand tombe la lumière du jour. « Le besoin de symbiose et d’attachement est alors logiquement plus important », précise-t-elle.
Mais il ne suffit pas de rassurer les parents pour que s’estompe d’un seul coup toute la difficulté à gérer ces pleurs au quotidien. « C’est quand même nécessaire. Car ensuite, le parent ne va plus se poser la question d’un éventuel problème de santé de l’enfant. Même s’il doit dix fois de suite le prendre dans les bras pour faire cesser les pleurs, il le fera en étant un peu plus serein. Ce que va ressentir le bébé », souligne la Dr Le Doaré Denizot.
Gérer l’anxiété
Rester serein n’est pas toujours facile pour des parents fatigués ou isolés. « Un proverbe africain dit qu’il faut tout un village pour élever un bébé. Cela signifie qu’il faut faire attention aux besoins d’attachement de l’enfant mais aussi prendre en compte les besoins de soutien des parents. Ce qui n’est toujours simple avec les modes de vie actuels, avec des parents qui vivent parfois loin de leur famille. Alors que, parfois, il faut juste parfois parler à une personne extérieure pour faire baisser l’inquiétude suscitée par ces pleurs », indique la pédiatre.
Selon elle, il faut donc rassurer et déculpabiliser des parents qui, parfois, ont l’impression que leur bébé pleure parce qu’ils ne savent pas bien s’occuper de lui. « Il faut aussi leur dire que, même si l’anxiété est forte, la solution n’est pas de se précipiter aux urgences en pleine nuit. Surtout que, dans la grande majorité des cas, le bébé aura été bercé par le trajet en voiture et aura cessé de pleurer en y arrivant », souligne la Dr Le Doaré Denizot.
Exergue : Entre 15 jours et deux mois, tous les bébés pleurent, c’est la situation inverse qui doit interpeller
Entretien avec la Dr Sophie Le Doaré Denizot, pédiatre libérale à Nantes
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