« LA PÉDIATRIE GÉNÉRALE hospitalière occupe une place centrale dans le dispositif de soins aux enfants. Elle maille le territoire national par son implantation dans les centres hospitaliers (anciens "hôpitaux généraux") », souligne d’emblée le Dr Pierre Foucaud, en précisant qu’on recense 267 services de pédiatrie générale ou de pédiatrie néonatologie non universitaires, contre une trentaine de services en CHU. Parmi les services de pédiatrie générale universitaires, il faut distinguer ceux qui sont implantés dans des hôpitaux essentiellement pour adultes, très proches dans leur organisation et leur recrutement des services non universitaires et ceux qui sont adossés à des services de surspécialités pédiatriques, au sein d’hôpitaux d’enfants. « Ces derniers relèvent plus de la médecine interne de l’enfant que de la pédiatrie générale stricto sensu », souligne le Dr Foucaud.
Pour le président du COPHI, les services de pédiatrie non universitaires jouent un rôle d’interface naturelle entre la médecine de premier recours et la pédiatrie de spécialité. « Nos services sont fortement ancrés, par les activités de proximité, dans leur territoire de santé. Nos équipes tissent naturellement des liens étroits avec les pédiatres et médecins généralistes de ville, avec la PMI, avec la médecine scolaire, avec les autorités judiciaires (substitut des mineurs, juge pour enfants). Ces articulations facilitent à la fois l’accès à l’avis des médecins hospitaliers et constituent un gage de meilleure coordination des soins », explique-t-il, en relevant toutefois un écueil, hors heures ouvrables : un hospitalocentrisme excessif concernant la permanence des soins. « La création de maisons de santé pluridisciplinaires, lorsqu’elle est possible, ne répond que partiellement à ce défaut d’organisation », indique le Dr Foucaud.
À l’inverse, les services des centres hospitaliers « sont tributaires » de services spécialisés, universitaires dans la grande majorité des cas, requérant des compétences et des ressources particulières dans le domaine des spécialités pédiatriques, avec souvent des plateaux techniques lourds ou très spécifiques. « Là encore, les parcours de soins des enfants varient en fonction des pathologies rencontrées et de l’offre régionale, constate le Dr Foucaud. Certains enfants seront strictement pris en charge par des pédiatres spécialistes universitaires, comme par exemple des enfants ayant bénéficié d’une transplantation d’organe ou atteints de maladies métaboliques rares. D’autres seront pris en charge aux différents temps de leur parcours, tantôt dans le CHU, tantôt dans le centre hospitalier. Par exemple, un enfant relevant d’une maladie oncohématologique sera suivi dans un centre spécialisé, orchestrant sa prise en charge, mais bénéficiera de chimiothérapies ambulatoires réalisées dans le service de pédiatrie le plus proche de son domicile ».
Pour le Dr Foucaud, l’organisation des services des centres hospitaliers est à la fois simple et complexe. « Les lits d’hospitalisation sont répartis par secteur : hôpital de jour, unité de néonatologie de niveau IIa ou IIb, secteur nourrissons, secteur enfants et secteur adolescents. Les secteurs adolescents, par nécessité, ont dû se structurer pour faire face à des besoins émergents, plus par leur volume que par leur nature. Les pathologies médico-psycho-sociales y sont fortement représentées : tentatives de suicide, dépressions, comportements à risque, troubles du comportement alimentaire… Ces unités nécessitent une collaboration quotidienne entre pédiatres, pédopsychiatres et psychologues. La présence de lits de pédopsychiatrie en aval est une absolue nécessité », estime le Dr Foucaud, en déplorant une offre insuffisante dans de nombreuses régions. « Dans de trop rares établissements, les services de pédiatrie et de chirurgie infantile sont contigus, poursuit-il. D’autres solutions sont possibles, en créant notamment des secteurs médico-chirurgicaux où sont hospitalisés, sous la responsabilité des chirurgiens, des enfants de plus de 3 ans relevant de pathologies chirurgicales simples telles que la traumatologie ou la chirurgie viscérale (pathologie appendiculaire par exemple). Le recrutement de nos services est fortement influencé par les pics épidémiques : bronchiolites à VRS, gastro-entérites à rotavirus, grippes, entéroviroses estivales… »
Dans le même temps, note le Dr Foucaud, la place prise par les maladies chroniques ne cesse de progresser. « Elle nécessite des compétences particulières dans des domaines tels que le diabète, l’asthme, l’épilepsie, l’obésité, la drépanocytose (en Ile-de-France tout particulièrement), l’endocrinologie, etc…, souligne-t-il. Le souhait d’autonomiser nos patients avant le passage vers les services adultes, d’obtenir une meilleure observance des traitements, de réduire le nombre de complications évitables, donne à l’éducation thérapeutique une place prépondérante. Elle réclame formation, temps dédié, mais l’on doit regretter l’absence ou l’opacité des modes de facturation actuels ».
Dans une période de démographie des professionnels en berne, les services des centres hospitaliers doivent faire face à une difficulté majeure : le recrutement médical. « Il s’agit de profils de poste exigeants pour satisfaire à la fois aux compétences de pédiatrie générale et de néonatologie, tout particulièrement en garde. Les gardes sont multisites : lits d’hospitalisation de courte durée, maternité, service de pédiatrie et unité de néonatologie. En cas de détresse vitale chez un jeune nourrisson, nous ne pouvons pas nous appuyer sur les services de réanimation adulte de l’hôpital et devons assurer nous-mêmes la mise en condition technique et la réanimation initiale en attendant l’arrivée du SAMU pédiatrique », indique le Dr Foucaud.
La territorialisation des filières patients.
Afin de faire face aux nombreuses missions des services de pédiatrie générale, la loi HPST offre, selon lui, une opportunité à saisir : la territorialisation des filières patients. « Le temps est probablement révolu où un service peut déterminer sa stratégie de développement en interne, indique le Dr Foucaud. Les Communautés hospitalières de territoire ou les Groupements de coopération sanitaire facilitent le développement de complémentarité entre services de pédiatrie. S’ils sont situés à des distances raisonnables pour la population, leur offre de spécialités peut être coordonnée et un maillage réfléchi s’organiser dans une région donnée. Les regroupements sur site peuvent avoir un certain rationnel si la mutualisation des professionnels facilite l’organisation de la continuité et de la permanence des soins. Encore faut-il que les distances supplémentaires imposées à la population soient limitées et n’entraînent pas de perte de chance, que soient traités concomitamment les transferts de pédiatrie, de néonatologie et de maternité, que les tutelles offrent un pilotage à ces mutations et qu’elles ne soient pas contrariées par les élus locaux… »
Au-delà de la qualité et de la sécurisation du soin, les services des centres hospitaliers sont confrontés à deux autres missions. « L’une est l’enseignement des étudiants en médecine de troisième cycle, autrement dit les internes, et pour certains services les étudiants de deuxième cycle, notamment dans les grandes villes. La deuxième mission est une mission de gestion, notamment médicoéconomique et d’animation d’équipe. Certains services (c’est le cas à Versailles) sont en capacité de participer à des travaux de recherche clinique. On peut rajouter que nos services participent à la veille sanitaire, et que nous constituons de mini-observatoires de la santé de l’enfant, identifiant de nouveaux besoins ou des problématiques mal satisfaites », conclut le Dr Foucaud.
D’après un entretien avec le Dr Pierre Foucaud, chef de service de pédiatrie-néonatologie de Versailles, président du Collège des pédiatres des hôpitaux d’Ile-de-France (COPHI).
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