Délai pré-greffe de poumon : des disparités de parcours importantes entre hommes et femmes

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Publié le 13/01/2025
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Selon une étude française, les femmes attendent plus longtemps une transplantation et ont un taux d’accès à la greffe plus faible. Mais une fois greffées, elles bénéficient d’un meilleur taux de survie.

Crédit photo : VOISIN/PHANIE

Durée d’attente, taux d’accès, survie après la greffe : le parcours de transplantation pulmonaire se caractérise par des différences significatives entre les hommes et les femmes. Désavantagées dans les étapes précédant la greffe, les femmes ont un meilleur taux de survie après.

Ces observations sont tirées d’une étude menée en France et publiée dans European Respiratory Journal Open Research. L’analyse a porté sur 1 710 participants – 802 femmes et 908 hommes – pris en charge dans l’un des 12 centres de transplantation français entre 2009 et 2018 et suivis pendant environ six ans après la transplantation. Les principales pathologies sous-jacentes étaient la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), la mucoviscidose et la pneumopathie interstitielle diffuse.

Six semaines de plus sur liste d’attente pour les femmes

Il ressort de l’analyse que les femmes passent en moyenne six semaines de plus sur la liste d'attente pour une transplantation pulmonaire que les hommes (115 jours contre 73 jours). Deux causes peuvent expliquer cet écart. Chez les femmes, les anticorps anti-HLA, qui peuvent se développer pendant une grossesse, sont plus fréquents. La présence de ces anticorps, connus pour être responsables des rejets hyperaigus, limite le choix du donneur. « On évite de choisir un donneur auquel les anticorps vont s’attaquer », précise au Quotidien le Dr Adrien Tissot, pneumologue au CHU de Nantes et premier auteur de l’étude.

Une autre cause relève d’un écart de taille entre les sexes : les femmes sont en moyenne plus petites de 13 cm que les hommes. Ces derniers, majoritaires (à 56 %) parmi les donneurs, ont un volume pulmonaire plus important et cette différence compte dans l’appariement des greffons. « L’inadéquation entre la taille des donneurs et celle des receveuses entraîne un temps d’attente plus long pour les secondes », souligne le Dr Tissot.

Les receveuses d’un poumon « surdimensionné » n'ont pourtant pas de moins bons résultats après la transplantation. « Faire des découpes du poumon, enlever des lobes ou des parties de lobe, entraîne un temps opératoire plus long et un risque accru pour les patientes, mais l’intervention ne se traduit pas par une différence de survie chez les femmes avec un greffon réduit par rapport aux autres », insiste le Dr Tissot.

L’étude montre également que les femmes ont moins accès à une transplantation pulmonaire que les hommes (91,6 % contre 95,6 %). Des recherches antérieures avaient déjà mis en évidence qu’elles étaient plus susceptibles de mourir sur la liste d’attente. Mais sur cet aspect, l’étude n’a pas permis de déterminer les raisons de l’exclusion de la liste (décès, dégradation incompatible avec une greffe, etc.).

Une différence de survie à 5 ans surtout marquée dans la BPCO

Autre enseignement, après la transplantation, la survie à 5 ans était plus élevée chez les femmes que chez les hommes (70 % contre 61 %). Cet écart en faveur des femmes « s’observe surtout pour les patientes et patients atteints de BPCO, la différence étant moins marquée pour les autres pathologies, relève le Dr Tissot. Ce point est intéressant car la BPCO est une maladie comportementale, liée au tabagisme ». Alors que les causes de meilleure survie des femmes restent à déterminer, un travail spécifique est en cours sur la population de patients BPCO.

Pour remédier aux inégalités, plusieurs pistes sont envisageables. Les femmes qui ont des anticorps anti-HLA et/ou un petit volume pulmonaire pourraient être inscrites plus tôt sur les listes d’attente. « Cela permettrait d’éviter qu’elles se dégradent et n’accèdent pas à la greffe », estime le Dr Tissot. Au niveau des centres de transplantation, les équipes chirurgicales pourraient également être encouragées à des réductions de volume plus systématiques. Au niveau national, une réflexion sur les modalités d’allocation des greffons est à mener, préconise par ailleurs le pneumologue.


Source : lequotidiendumedecin.fr