Dans la fibrose pulmonaire idiopathique, on peut observer une dysbiose, associée à un excès de bactéries ou à une perte de diversité microbienne. Cette dysbiose favorise la progression et contribue potentiellement aux exacerbations, aux hospitalisations et à la mortalité. Mais les données sur le bénéfice éventuel du traitement par antibiotique sont discordantes. Avec le cotrimoxazole, le traitement s’est avéré efficace dans une première étude randomisée mais inefficace dans un plus large essai contrôlé. De son côté, la doxycycline a donné des résultats préliminaires intéressants. Mais ils ne sont que des résultats préliminaires… D’où l’idée de tester à nouveau ce concept dans un vaste essai pragmatique, en utilisant l’un ou l’autre de ces agents, versus traitement standard, sur un critère clinique dur (1). C’est un échec. L’antibiothérapie au long cours par cotrimoxazole ou par doxycycline ne modifie pas le délai avant hospitalisation pour cause respiratoire ou décès.
Une étude menée sur plus de 30 sites américains chez des plus de 40 ans
Il s’agit d’un essai randomisé ouvert testant, chez des sujets porteurs de fibrose pulmonaire idiopathique de plus de 40 ans, un traitement antibiotique au long cours – cotrimoxazole ou doxycycline – versus prise en charge standard.
Au total, plus de 500 patients ont été inclus dans 35 sites, entre août 2017 et juin 2019.
Ils ont 71 ans d’âge médian et les quatre cinquièmes sont des hommes. Près des deux tiers sont d’ex-fumeurs. Environ 60 % sont sous pirfenidone, 30 % sous nintedanib, soit 90 % de patients sous traitement antifibrotique.
Le cotrimoxazole était administré à la dose de 160 mg trimethoprime/800 mg sulfamethoxazole deux fois par jour, plus 5 mg/j d’acide folique, et la doxycycline à la dose 100 mg/j pour les poids de moins de 50 kg et à 100 mg deux fois par jour au-delà de 50 kg de poids. Les patients randomisés pour le traitement antibiotique ont eu le choix de la molécule.
Le critère primaire est le délai de survenue d’une hospitalisation pour raison pulmonaire ou du décès. Soit un critère purement clinique. À noter, l’adhésion au traitement assigné n’est pas extraordinaire. Elle est aux alentours de 66 % à 6 mois et 47 % à 1 an.
Pas de recul des hospitalisations et décès à 1 an de suivi
Après un an de suivi, le nombre d’évènements – hospitalisation pour cause pulmonaire ou décès – est de 52 évènements dans le bras antibiothérapie plus soins standards, versus 56 évènements dans le bras soins standards. Il n’y a pas plus de différence après multiples ajustements. Il n’y a pas d’interaction avec l’antibiotique utilisé, cotrimoxazole ou doxycycline. Enfin, on a observé significativement plus d’effets secondaires graves dans le bras antibiothérapie (16 % vs 10 %), même si les infections étaient moins nombreuses, avec en particulier nombre de diarrhées et rashs.
Après deux études convergentes, exit le cotrimoxazole
En pratique clinique, cet essai est la deuxième grande étude randomisée à ne pas mettre en évidence de bénéfice au traitement des patients par cotrimoxazole au long cours et ce, sur des critères cliniques durs : hospitalisations pour raison pulmonaire et décès toutes causes. Dans cet essai, la doxycycline ne fait pas mieux. Pour les auteurs, ces résultats closent le débat d’une antibiothérapie prolongée dans la fibrose pulmonaire idiopathique. Ces données suggèrent aussi que la progression de la maladie n’est pas nécessairement en rapport avec la survenue de pneumonies.
(1) FJ Martinez et al. Effect of Antimicrobial Therapy on Respiratory Hospitalization or Death in Adults With Idiopathic Pulmonary Fibrosis: The CleanUP-IPF Randomized Clinical Trial. JAMA 2021;325:1841-51
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