LE QUOTIDIEN : Quel constat tirez-vous de votre tour de France sur le recours à la contention et à l'isolement ?
Pr Senon : Il y a eu une sidération en 2016 provoquée par les prises de position successives du Contrôleur général des lieux de privation de liberté, de la Conférence des présidents de commission médicale d’établissement (CME), et de la Haute Autorité de santé (HAS).
Cette prise de conscience, mais aussi l’inscription dans la loi de l’obligation d’encadrer l’isolement et la contention, ont conduit à réorganiser les établissements. Il a aussi fallu faire un travail pour que ces pratiques soient l’objet d’une décision médicale et non d’une prescription médicale qui supposait qu’elles aient un effet thérapeutique, ce que dément la littérature internationale.
Les droits des patients sont davantage pris en compte qu’il y a cinq ans. Il n’y a plus un établissement qui ne propose pas de formation sur le sujet. Néanmoins, des progrès restent à faire. Surtout lorsque l’établissement est confronté à des problèmes d’organisation et d’accès aux soins ou de pénurie médicale et paramédicale. Même dans les établissements qui ont fourni un grand effort, un retour en arrière est toujours possible.
Quels sont les leviers pour réduire le recours à l’isolement et à la contention ?
Il faut distinguer deux groupes de patients. Dans les services d’entrée ou d’urgence, nous constatons que ces pratiques sont d’autant plus fréquentes que le patient n’est pas connu. Il faut donc le présenter à l’équipe en évoquant le diagnostic, pour qu’elle ne le considère pas comme un facteur de trouble, mais bien comme un patient avec une pathologie psychiatrique.
Le second groupe est celui des patients hospitalisés dans les services de long séjour dans les hôpitaux psychiatriques. Les problèmes viennent du non-respect de « la bulle de protection » de chaque patient et d’une trop grande proximité institutionnelle. Nous préconisons donc de revoir les règles (ne pas lever tous les patients à la même heure, par exemple) et d’établir des projets personnalisés.
Plus largement, le souci de ne pas avoir recours à des méthodes attentatoires aux droits du malade doit être partagé au sein de tout l’établissement.
Quelles pistes propose votre mission ?
Nous proposons que des comparatifs soient établis au niveau régional, sur des territoires équivalents, afin qu’un établissement qui constaterait davantage d’isolement et de contention s’interroge et s’inspire de bonnes pratiques voisines.
Nous allons aussi travailler à la mise en place d’un observatoire des droits des patients en soins sans consentement, qui devrait voir le jour d’ici la fin du premier trimestre 2020. Il doit permettre de porter une réflexion et une communication d’ampleur sur ces sujets, et d’avoir des chiffres nationaux.
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