VISAGE, face, profil désignent tout à la fois dans ce qu’ils montrent et dans ce qu’il leur est donné à voir le lieu anatomique et, au-delà, abstraction faite, tout corps, toute chose qui offre à voir sous un certain angle. C’est dans cette acception qu’il faut comprendre le titre de l’ouvrage de François Delaporte, « Figures de la médecine », même s’il y est souvent question et de visages et de médecins.
Six chapitres, recouvrant six domaines, six événements et territoires, juxtaposent, un peu à la manière des nouvellistes, non sans hasard ni volonté, cet ouvrage historique. Qui connaît l’auteur, son engagement philosophique auprès de Georges Canguilhem et les livres qu’il a signés (« le Second Règne de la nature », « Histoire de la fièvre jaune », « le Savoir de la maladie », « Essais sur le choléra de 1832 à Paris », « les Épidémies », « Histoire des myopathies », « la Maladie de Chagas », « Anatomie des passions »...) sait a priori que sa démarche nourrit ces six « petites histoires », dont on vantera la précision documentaire exemplaire, d’un regard épistémologique qui souligne la dimension novatrice et conceptuelle de chacune d’entre elles.
Interprétation sémiologique.
On vantera en effet un style précis, dense et fouillé, pointilleux même sur la valeur sémantique de l’attribut ; mais on vantera surtout la démarche du chercheur dans son interprétation sémiologique des événements : « Un fait n’est pas simplement un fait, c’est d’abord le produit d’un cadre qui rendait possible sa visibilité et c’est ensuite toute une possibilité de conversion conceptuelle qui s’ouvre avec lui. » Forte leçon dont doit sans cesse s’inspirer le médecin dans sa propre pratique.
Signature stylistique et intellectuelle, donc, qui fait sans nul doute l’unité de ce recueil. Quels liens en effet entre les commencements de la transfusion sanguine, le lambeau brachial de Tagliacozzi, la greffe de visage, la filaire de Bancroft, le mal de Robles et la maladie de Chagas, enfin ? Sinon qu’il s’agit chaque fois d’une naissance, jamais identique, sinon qu’il y eut chaque fois débat et controverse. Et François Delaporte ne s’en prive pas, alliant à la fois le regard émerveillé de l’accoucheur et celui, acéré, du polémiste.
Si le lecteur pressé ou spécialiste se contentait de ne parcourir que telle ou telle partie de ce livre, ce qui peut se concevoir, ou si tel autre, avec obsession, le parcourait dans son ensemble, s’efforçait de trouver correspondance et unicité là où elles ne sont pas nécessairement, qu’ils n’omettent pas de prendre connaissance de la magnifique préface d’Emmanuel Fournier, qu’il faut lire avant et après et qui entoure, tel un cadre, ces six magiques tableaux qui y sont brossés. Il y a là de très belles leçons de vie.
François Delaporte, « Figures de la médecine », Les Éditions du Cerf, 186 pages, 29 euros.
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