LE QUOTIDIEN : Comment avez-vous découvert le statut de collaborateur libéral ?
Dr ÉRIC SENBEL : C’était il y a une dizaine d’années. Je cherchais quelqu’un pour venir m’épauler au cabinet, car j’étais en surcroît d’activité, avec des délais de rendez-vous qui s’allongeaient à l’infini. J’ai étudié les formules de remplaçant ou d’associé, et j’ai fini par tomber sur ce statut de collaborateur, dont, à l’époque, je connaissais très peu de choses. Ce qui m’a intéressé, c’est sa simplicité de fonctionnement. On peut s’engager des deux côtés sans fixer les choses dans le temps et en laissant une sorte de période de probation pour voir si les deux parties sont satisfaites.
C’est ce qui s’est passé dans votre cas ?
Oui, tout à fait. J’ai d’abord recruté comme collaboratrice une rhumatologue avec laquelle les choses se sont très bien passées. À tel point qu’au bout de quelques années elle est devenue associée au sein du cabinet. Du coup, j’ai pu recruter une autre collaboratrice, qui, elle, au bout d’un an et demi, a choisi de s’en aller pour travailler dans un établissement privé à but non lucratif. Les choses se sont faites très simplement, sans procédure administrative complexe.
Sur quelles modalités fonctionne cette collaboration ?
Le collaborateur peut signer un contrat à durée déterminée ou indéterminée. Il faut que le futur collaborateur soit « thésé », en capacité de s’installer, inscrit à l’Urssaf et à la Caisse de retraite des médecins, avec ses feuilles de soins et sa carte de professionnelle de santé (CPS). Une fois dans le cabinet, il touche ses propres honoraires, et en reverse un pourcentage au médecin principal. Le pourcentage est fixé entre les parties : cela peut aller de 30 % à 80 % selon les situations. Le collaborateur paie lui-même ses propres charges sociales et fiscales, mais les charges communes (secrétariat, loyer…) sont incluses dans la rétrocession.
Le médecin principal peut-il être présent quand le collaborateur est au cabinet ?
Oui, c’est une différence avec le statut de remplaçant. Quand son remplaçant est au cabinet, le médecin libéral ne peut pas être là en même temps ou même exercer au même moment ailleurs. Avec le collaborateur libéral, on se met d’accord sur le temps passé au cabinet, par exemple trois jours par semaine. Ces jours-là, le médecin principal peut faire lui aussi ses consultations. De son côté, le collaborateur peut travailler dans plusieurs endroits au cours de la semaine : au cabinet et à l’hôpital par exemple. Il peut aussi être le collaborateur de plusieurs médecins en même temps.
Quels sont les avantages de ce système ?
Avant tout, sa grande souplesse de fonctionnement. Les deux parties ne s’engagent pas d’emblée dans la durée. Cela peut être attractif pour de jeunes médecins qui hésitent à franchir tout de suite le pas de l’installation en libéral. On sait aujourd’hui que seulement 10 % des médecins choisissent ce mode d’installation. Cela peut donc être une bonne approche, une alternative au remplacement. Cela peut aussi être une solution pour les médecins installés désireux d’inciter un confrère ou une consœur à venir les rejoindre. Les deux parties restent assez libres, ce qui peut être un avantage, sauf pour les médecins qui sont à la recherche d’un associé stable ou d’un successeur.
Quels en sont les inconvénients ?
Il y a un point sur lequel il faut être attentif. Il existe, pour un médecin libéral, un plafond pour toutes les activités qui ne concernent pas son exercice conventionnel. Cela concerne toutes les activités annexes (collaborations avec l’industrie, expertise…). Si les sommes touchées pour ces activités dépassent un certain plafond, le médecin est alors obligé de payer la TVA de manière intégrale. Or, les reversements d’un collaborateur libéral entrent dans le cadre de ces revenus considérés comme annexes. Si les rétrocessions dépassent un certain plafond, le médecin peut donc se retrouver à devoir la TVA au premier euro sur ces sommes. Il faut en être conscient.
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