Ces recommandations EULAR de 2019 fournissent des conseils actualisés sur la gestion des vaccinations chez les patients atteints de rhumatismes inflammatoires ou de maladies auto-immunes systémiques (1). Il y a parfois quelques divergences avec les recommandations nationales du Haut Conseil de Santé Publique (HCSP) (2).
Un programme vaccinal expliqué par le spécialiste
Ces recommandations comprennent six principes généraux et neuf recommandations.
« Parmi ces principes généraux, le rôle du spécialiste traitant prescripteur est bien mis en avant. C’est à lui qu’il revient de faire une réévaluation annuelle du statut vaccinal, souligne le Pr Jacques Morel. Le programme de vaccination personnalisé doit être expliqué au patient par l’équipe de rhumatologie avec l’évaluation du rapport bénéfices/risques afin que la prise de décision soit partagée. Avec une bonne information, le patient peut adhérer beaucoup plus à la vaccination et améliorer ainsi la couverture vaccinale ».
Quant au moment choisi pour la vaccination, les recommandations sont en faveur d’une vaccination lorsque l’activité de la maladie est stable, de préférence avant l’instauration du traitement de fond et le début de l’immunosuppression.
« Mais, la recommandation de l’EULAR pour la prise en charge d’une polyarthrite débutante est d’instaurer un traitement de fond dès que le diagnostic est posé », rappelle le Pr Jacques Morel.
Ainsi, en pratique, la stratégie de vaccination dans la polyarthrite rhumatoïde (PR) dépendra de l’activité de la maladie, des traitements de fond en cours ou à venir et des spécificités de chaque vaccin. « Chez des patients présentant une PR ou une spondylarthrite débutante, il n’a pas été observé d’aggravation de la maladie à administrer un vaccin inactivé, le plus tôt possible. En revanche, face à une maladie inflammatoire auto-immune avec des manifestations systémiques graves (atteinte rénale ou pulmonaire…), les vaccinations ne sont pas recommandées pendant la phase active de la maladie. »
Deux vaccins vivants possibles sous certaines conditions
D’une façon générale, les vaccins non vivants peuvent être administrés en toute sécurité aux patients sous DMARDs et glucocorticoïdes, alors que la vaccination avec des vaccins vivants atténués doit être considérée avec prudence (cas particulier du vaccin contre le zona et du ROR).
La vaccination antigrippale (annuelle) et anti-pneumococcique doit être fortement envisagée pour la majorité des patients. Le schéma initial de vaccination contre le pneumocoque est le suivant : une dose de vaccin 13-valent (Prevenar 13), puis une dose de vaccin 23-valent (Pneumovax) deux mois plus tard, comme dans la population générale (recommandations HCSP). « Mais chez les patients immunodéprimés, recevant une biothérapie, il existe des données montrant que la protection vaccinale avec le vaccin conjugué diminue rapidement dès 18 mois. Il convient donc de faire un rappel à 5 ans avec un vaccin non conjugué contre le pneumocoque » explique le Pr Jacques Morel.
Pour la vaccination contre l’hépatite B, chez des patients sous immunothérapie, la réponse au vaccin peut être diminuée. « Après le schéma habituel de vaccination, il est ainsi recommandé de faire une sérologie pour être sûr que le taux d’anticorps protecteurs est suffisant. Dans le cas contraire, on fera une dose de rappel ».
En ce qui concerne les vaccins vivants, on note quelques divergences sur les délais d’arrêt des traitements entre les recommandations du HCSP et celles de l’EULAR. « L’HCSP recommande trois mois d’arrêt des traitements de fond, quel que soit le vaccin vivant. Alors que les recommandations EULAR sont plus nuancées. Un rappel ROR ou la vaccination contre le zona peuvent être envisagés avec certaines doses de traitements ayant un effet immuno-suppresseur limité ». Pour l’EULAR, les traitements n’ayant qu’un faible effet sur l’immunosuppression sont les suivants : méthotrexate ≤ 0,4 mg/kg/semaine, azathioprine ≤ 3 mg/kg/jour, 6-mercaptopurine ≤ 1,5 mg/kg/jour et pour les corticoïdes 20 mg/jour depuis plus de 2 semaines (contre10 mg/j pour l’HCSP).
Des données rassurantes ont en effet été obtenues avec les vaccins vivants ROR et contre le zona chez des patients atteints de maladies inflammatoires sous traitement de fond. Pour la prévention du zona, un vaccin inerte est disponible dans certains pays mais ne le sera pas avant 2021 en France.
En revanche, pour la vaccination contre la fièvre jaune, au vu du risque mortel, la durée d’arrêt reste de trois mois.
Deux nouvelles recommandations ont été ajoutées :
1. Les membres immunocompétents de l’entourage des patients atteints de maladies inflammatoires à médiation immune devraient recevoir les vaccins conformément aux directives nationales, à l’exception du vaccin antipoliomyélitique oral.
2. Les vaccins vivants atténués doivent être évités au cours des six premiers mois de la vie chez les nouveau-nés de mères traitées avec des biomédicaments au cours de la seconde moitié de la grossesse.
(1) Furer V et al. 2019 Update of Eular recommendations for vaccination in adult patients with autoimmune inflammatory rheumatic deseases. Ann Rheum. Dis. 2019 ; 0 :1-14.
(2) HCSP. Recommandations vaccinales spécifiques des personnes immunodéprimées ou aspléniques. 2014 Novembre
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