EN 2011, LE BOTOX (toxine botulinique A, laboratoires Allergan) a reçu une autorisation de mise sur le marché (AMM) dans le traitement, chez l’adulte, de l’hyperactivité détrusorienne neurologique conduisant à une incontinence urinaire non contrôlée par un traitement anticholinergique chez les patients blessés médullaires et chez ceux atteints de sclérose en plaques et utilisant l’autosondage comme mode mictionnel. « Cette AMM en France a été un peu plus restrictive que dans d’autres pays, où le Botox est indiqué dans l’hyperactivité détrusorienne neurologique quelle que soit la cause, chez des patients sous autosondage ou non », précise le Pr Pierre Denys. Les résultats sont très bons, l’efficacité se maintient avec le temps et reste comparable à celle obtenue après la première injection. Il s’agit donc d’un vrai traitement de deuxième ligne en alternative à l’agrandissement vésical. D’autres populations de patients pourraient également bénéficier du traitement par Botox : maladie de Parkinson, sclérose en plaques sans autosondage et autres hyperactivités détrusoriennes neurologiques. Des études doivent être menées afin de déterminer la dose offrant le meilleur ratio efficacité/risque de rétention, car selon le profil des patients, le taux de complications peut varier. Dans l’hyperactivité détrusorienne idiopathique, le Botox a donné des résultats intéressants dans les études de phase III et un dossier d’AMM a été déposé en France. Les études ont permis de définir un cut-off pour le résidu postmictionnel, valeur au-delà de laquelle les patients (6,5 % des cas) doivent passer à l’autosondage : 350 ml, voire 200 ml en cas de signes associés. « Ce type d’incontinence concerne une large population, pour laquelle la neuromodulation était jusqu’alors la seule alternative aux anticholinergiques. Les injections de Botox, faciles à réaliser, offrent une nouvelle solution thérapeutique. Les effets sont réversibles en quelques mois et les éventuelles complications (rétention) ne sont de ce fait pas définitives », note le Pr Denys. Une étude indépendante récemment publiée (1) montre, sur une population pouvant répondre aux antimuscariniques et donc différente de celle des études de phase III, que le Botox a une efficacité équivalente à celle des anticholinergiques sur le nombre de fuites, mais permet d’obtenir un taux plus élevé de patients continents que les anticholinergiques. En termes de tolérance, les auteurs rapportent un taux plus élevé de rétention dans le groupe Botox et plus d’effets secondaires (sécheresse buccale, constipation…) dans le groupe anticholinergique. « Le Botox se montre ainsi efficace, au prix d’un risque de rétention certes faible, mais qui doit conduire à bien surveiller les patients ». Dans l’hypertrophie bénigne de la prostate, les résultats d’une étude de phase II (2) ont été décevants : les injections de Botox à différentes posologies (100, 200 ou 300 UI), réalisées chez une centaine de patients par groupe n’ont pas donné de résultats différents du placebo, qu’il s’agisse de l’analyse du débit maximal ou du score IPSS. Une amélioration a été rapportée dans tous les groupes. Une analyse post-hoc montre toutefois que les patients traités auparavant par un alphabloquant ont de meilleurs résultats avec le Botox à la dose de 200 UI que la population globale. « Il est toujours difficile de faire des études dans l’hypertrophie bénigne de la prostate. Les populations ne sont pas homogènes, les symptômes urinaires relèvent de causes intriquées, il existe des comorbidités et surtout l’effet placebo est majeur, estime le Pr Denys. S’il paraît peu probable que le Botox ait un avenir dans l’hypertrophie bénigne de prostate, une autre indication potentielle émerge : les cystites interstitielles, avec là aussi le problème de l’hétérogénéité des patients qui imposera de bien cibler certaines populations ».
D’après un entretien avec le Pr Pierre Denys, hôpital Raymond-Poincaré, Garches
(1) Visco AG et al. Anticholinergic Therapy vs. Onabotulinumtoxin A for Urgency Urinary Incontinence. N Engl J Med 2012;367:1803-13
(2) Marberger M et al. A Randomized Double-blind Placebo-controlled Phase 2 Dose-ranging Study of OnabotulinumtoxinA in Men with Benign Prostatic Hyperplasia. European urology 2013;63:496-503.
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024